Origine et histoire de la Passerelle Eiffel
La passerelle Eiffel, ou pont ferroviaire Saint-Jean, est un ancien pont métallique franchissant la Garonne à Bordeaux. Elle a été construite pour relier les réseaux de la Compagnie du chemin de fer d'Orléans et de la Compagnie des chemins de fer du Midi. Conçue en 1858 par Stanislas de Laroche-Tolay et Paul Régnault, elle a été réalisée par la Compagnie générale de matériel de chemin de fer sous la direction de chantier de Gustave Eiffel. Le chantier a dû résoudre deux difficultés techniques majeures : fonder des piles dans un fleuve tumultueux soumis aux marées et établir un tablier long de plus de cinq cents mètres. Les solutions retenues comprenaient la fondation des piles par air comprimé et l'emploi de piles tubulaires selon le procédé Triger, ainsi que la mise en place d'un tablier constitué de poutres en treillis métallique dont les montants verticaux alternent avec des croisillons en X. Les éléments ont été assemblés sur place dans une usine de préfabrication dirigée par Eiffel. Les travaux, commencés le 15 septembre 1858 et achevés en août 1860, ont abouti à un ouvrage de 509,69 m de longueur et de 8,60 m de largeur reposant sur six piles en maçonnerie et deux culées. Des essais en charge ont eu lieu le 13 août, l'ouvrage a été inauguré le 25 août 1860 et ouvert à l'exploitation le 1er septembre 1860. En 1862 une passerelle piétonne a été ajoutée côté aval ; devenue dangereuse en raison de la corrosion, elle a été démontée en 1981. Le nom de « passerelle » n'est pas dû à cet ajout : ce terme était déjà employé pour désigner les nouveaux ouvrages métalliques allégés, comme l'atteste un plan des archives de Bordeaux Métropole. La passerelle comportait deux voies ferrées, ce qui, avec une limitation de vitesse à 30 km/h lors de ses dernières années d'usage ferroviaire, constituait un goulet d'étranglement du trafic vers le nord. Dans le cadre de la suppression de ce bouchon, un nouveau viaduc à quatre voies, maîtrisé par Réseau ferré de France, a été mis en service ferroviaire le 11 mai 2008 après la dernière circulation sur la passerelle le 8 mai 2008 ; la mise en service complète des quatre voies a été réalisée en 2010. Après l'ouverture du nouveau viaduc, la démolition de la passerelle avait été envisagée, mais une intervention du Centre du patrimoine mondial de l'UNESCO a interrompu ce projet et a lancé une réflexion sur sa conservation. La ministre de la Culture Christine Albanel, en liaison avec le maire Alain Juppé, a décidé de soumettre la passerelle à la procédure de classement aux Monuments historiques, la commission régionale du patrimoine et des sites s'étant prononcée en faveur d'une inscription au printemps 2009. La passerelle a finalement été classée au titre des Monuments historiques par arrêté du 22 février 2010. L'architecte Jean de Giacinto et le plasticien David Durand ont conçu une mise en lumière de l'ouvrage. SNCF Réseau, alors propriétaire, a engagé en 2019 d'importants travaux de sauvegarde et a procédé à une mise en peinture de protection en gris anthracite avant de céder l'ouvrage à une collectivité chargée de son entretien. En juillet 2020 la future affectation n'était pas encore définitivement arrêtée ; elle pourrait devenir, dans le cadre du projet Euratlantique, un franchissement pour piétons et vélos. Pendant les travaux, Gustave Eiffel sauva un ouvrier tombé dans la Garonne en plongeant pour le retirer de l'eau.