Origine et histoire du Pont
Le pont Royal est un ouvrage parisien franchissant la Seine, troisième plus ancien de la ville après le pont Neuf et le pont Marie ; il est classé monument historique depuis le 1er mai 1939. Il relie la rive droite au niveau du pavillon de Flore à la rive gauche entre la rue du Bac et la rue de Beaune, et se situe entre le pont du Carrousel en amont et la passerelle Léopold-Sédar-Senghor en aval ; du côté sud il donne accès aux promenades Édouard-Glissant et Marceline-Loridan-Ivens, et du côté nord au quai Aimé-Césaire. Le site est desservi par la station de métro Tuileries.
Le devis de 1685, établi d’après les plans de Jules Hardouin-Mansart, fixe les principales caractéristiques techniques du pont : cinq travées comprenant une arche centrale de 72 pieds (23,40 m), des arches intermédiaires de 69 pieds (22,42 m) et des arches de rive de 64 pieds (20,80 m). L’épaisseur de toutes les piles est de 14 pieds (4,55 m) et un rapport de 5 entre l’épaisseur des piles et l’ouverture des travées est imposé pour assurer la stabilité lors du décoffrage successif des voûtes. Les voûtes sont en anse de panier à trois centres et sont surbaissées d’un tiers, soit 24 pieds pour une ouverture de 72 pieds.
Le devis précise l’emploi de pierres selon les usages : pierres dures de Saint-Cloud sous les basses eaux ; pierres de Bagneux pour les piles jusqu’à la naissance des voûtes, leurs becs et chaperons, les têtes d’arche, les tympans, les cordons de couronnement, les parapets et les bordures de trottoirs ; Vergelet pour le corps des voûtes ; et moellons de Vaugirard ou du faubourg Saint-Jacques pour les remplissages des voûtes et des culées. La composition des mortiers inclut l’emploi de pouzzolane, et la mise en œuvre prévoit l’utilisation de dragues pour le sol d’assise des piles et de caissons pour les fondations.
Une échelle hydrographique indiquant le niveau des grandes crues est apposée sur la dernière pile de chaque rive, à l’instar de celle du pont de la Tournelle. Le devis du pont Royal a servi de modèle pour le pont Jacques-Gabriel de Blois, et Lieven Cruyl a dessiné et gravé les différentes phases de sa construction. Le pont se distingue par la sobriété de sa décoration.
Le nom de « pont Royal » vient de son aboutissement au palais des Tuileries. À cet emplacement un bac autorisé en 1550 assurait déjà la traversée de la Seine et a donné son nom à la rue du Bac ; après un accident observé lors d’une promenade, Louis XIII décida la construction d’un pont. En 1632 Pierre Pidou fit édifier un pont en bois à péage, appelé successivement pont Sainte-Anne, pont Rouge ou pont Le Barbier, qui remplaça le bac ; cet ouvrage, fragile, subit de nombreuses réparations, reconstructions et destructions par le feu et les crues. Un projet de financement proposé par le banquier Lorenzo Tonti pour reconstruire le pont en pierre n’aboutit pas, mais a laissé le nom de « tontine » dans la langue française.
Après plusieurs destructions, le pont de bois fut emporté par les glaces en 1684 puis remplacé entre 1685 et 1689 par un pont en pierre entièrement financé par le roi Louis XIV ; Jacques Gabriel, Jules Hardouin-Mansart et François Romain furent chargés de sa réalisation, la réception des travaux étant attestée par Libéral Bruant et ratifiée par le Conseil d’État. Au XVIIIe siècle le pont fut un lieu de fêtes et réjouissances ; le cortège transportant les cendres de Voltaire y passa le 11 juillet 1791. Pendant la Révolution et l’Empire il porta successivement les noms de pont National puis de pont des Tuileries, et Napoléon y fit disposer des canons pour défendre le palais des Tuileries.
En 1852 l’épaisseur de la clé de la travée centrale fut réduite pour limiter la raideur des accès. Classé en 1939, le pont fut illuminé en 2005 à l’occasion de la candidature de Paris aux Jeux olympiques de 2012. Il a inspiré de nombreux artistes — Camille Pissarro le représente depuis sa chambre du quai Voltaire, Jacques Bourotte en réalise une aquarelle en 1954, et d’autres peintres l’ont également figuré — et a été évoqué par des écrivains, parmi lesquels Alphonse Allais et Michèle Audin. Une bibliographie et des gravures anciennes documentent sa construction et son histoire.