Origine et histoire du Pont de Moulin sur Cance
Le pont suspendu sur la Cance, dit Pont du Moulin, enjambe la Cance dans le nord de l'Ardèche et relie les communes de Quintenas et de Vernosc-lès-Annonay, copropriétaires de l'ouvrage. Classé au titre des monuments historiques depuis le 6 avril 1981, il a longtemps tenu une place singulière entre passerelle et pont.
La construction du pont est estimée entre 1863 et 1865, vraisemblablement motivée par la présence sur la rive droite du moulin de Quintenas. Le propriétaire du moulin, monsieur Léorat, aurait proposé de financer personnellement l'édifice en demandant en retour une compensation des deux communes, dont le montant aurait été fixé le 19 décembre 1865. L'ouvrage reprend les principes des ponts en fils de fer popularisés par Marc Seguin, mais il est improbable que Seguin lui-même en soit le concepteur ; l'attribution est plus souvent portée vers un des frères Seguin ou vers un membre de la famille Mignot, liée aux Seguin.
Pendant la période d'activité de l'usine de tissage qui succéda au moulin, le pont fut régulièrement entretenu, puis il tomba dans l'oubli après la fermeture de l'usine en 1965. En très mauvais état depuis des années, il a fait l'objet d'une restauration fidèle réalisée entre 2012 et 2013 après une dizaine d'années d'études, de procédures administratives et de recherche de financements. L'inauguration des travaux a eu lieu le 7 novembre 2013 en présence du sous-préfet de Tournon-sur-Rhône.
Le projet de restauration a été engagé par le Syndicat des Trois Rivières : les premières études ont débuté en 2003, le projet a été inscrit au contrat de rivière en 2004, la décision de restauration à l'identique a été prise en 2008 et le dossier technique finalisé en 2009. Les entreprises ont été consultées et choisies en 2010 et 2011, et les travaux se sont déroulés de octobre 2012 à octobre 2013 sous la maîtrise de l'architecte des Monuments historiques Olivier Naviglio. Le chantier a notamment nécessité la mise en place d'un échafaudage sous le tablier pour permettre le démontage et l'assemblage en sécurité.
Le coût total de l'opération s'est élevé à environ 750 000 euros TTC, majoritairement subventionné par l'État et les collectivités territoriales ; le dossier détaille des contributions de l'État (205 000 €), du département (205 000 €), de la région (120 000 €) et des apports des communes, de la communauté de communes et du syndicat des Trois Rivières, complétés par des soutiens d'organismes et d'associations patrimoniales.
L'original de 1863 était construit selon la méthode des ponts en fils de fer : quatre câbles porteurs composés de fils parallèles, deux de chaque côté, ancrés dans la maçonnerie des rives, supportaient un tablier formé de traverses en chêne assemblées perpendiculairement et espacées d'environ 60 centimètres. Le tablier était suspendu aux câbles par des suspentes et bordé de garde-corps en bois.
La restauration menée en 2012-2013 a cherché à reproduire fidèlement ces caractéristiques en conservant les piliers maçonnés et en procédant à une reprise des surfaces et des joints au mortier traditionnel. Chaque câble porteur a été reconstitué à partir d'un câble de fer doux de quatre kilomètres plié en va-et-vient pour obtenir cent brins parallèles ensuite ligaturés, puis galvanisés pour améliorer la résistance. Le plancher a été refait en chêne et suspendu par des suspentes métalliques identiques aux originales ; un grillage protecteur a été ajouté au garde-corps pour la sécurité des enfants. Les accès ont été repavés, le chemin depuis la route balisé et des panneaux explicatifs installés.
Deux films documentent le site et son chantier : l'un retrace l'histoire du pont et du site industriel à partir de témoignages, l'autre présente les étapes de la restauration. Le pont, restauré à l'identique, constitue aujourd'hui un élément patrimonial et paysager notable de la vallée de la basse Cance, où un projet de classement pour une liaison cyclable douce entre le réseau Loire et la Viarhôna est à l'étude.