Origine et histoire du Pont transbordeur
Le pont transbordeur du Martrou est le dernier pont transbordeur en fonctionnement en France et le seul témoin national de ce type d'ouvrage, les autres ayant été détruits. Conçu et réalisé par l'ingénieur Ferdinand Arnodin entre mars 1898 et juillet 1900, il relie Rochefort et Échillais en Charente-Maritime et a été inauguré le 29 juillet 1900. L'ouvrage repose sur huit piles en maçonnerie et quatre pylônes métalliques disposés deux par deux de chaque rive, hauts de 66,25 mètres. La travée entre pylônes mesure 139,75 mètres ; le tablier, long de 175,50 mètres, culmine à 50 mètres au‑dessus des plus hautes eaux. Les piles sont ancrées à 19,5 mètres de profondeur côté Rochefort et à 8,5 mètres côté Échillais ; l'espace entre piles est de 129 mètres et l'espace quai à quai de 150 mètres. Une nacelle suspendue permet la traversée de la Charente sans gêner la navigation des cargos desservant les ports locaux. Elle se déplace sur deux rails solidaires du tablier, suspendue par des câbles croisés et entraînée par un câble enroulé sur un treuil installé dans la machinerie côté Rochefort. L'énergie du treuil est fournie par un moteur électrique ; à l'origine la traction était assurée par un moteur à vapeur jusqu'en 1927. Conçu pour remplacer un bac devenu insuffisant, l'ouvrage a coûté 586 500 francs de l'époque. À l'ouverture, la nacelle pouvait transporter par traversée neuf voitures à cheval à deux attelages et cinquante piétons, ou deux cents piétons seuls ; sa charge nominale était alors de 14 tonnes et la traversée durait 75 secondes hors embarquement. En 1912, Lucien Deneau passa sous le tablier à bord de son avion. Des travaux de consolidation menés en 1933–1934 par l'entreprise Fives‑Lille‑Cail ont remplacé et modifié des poutres du tablier et porté la capacité de la nacelle à 16 tonnes. Après la Seconde Guerre mondiale, de nouvelles consolidations ont été réalisées, mais l'accroissement du trafic routier allongeait les temps d'attente. Un pont à tablier levant a été construit en aval en 1967, rendant l'usage du transbordeur moins adapté, et un projet de démolition est envisagé en 1975. Classé monument historique le 30 avril 1976, le pont échappe à la démolition. Entre 1980 et 1994, grâce à des financements de la Communauté économique européenne, l'ouvrage a été réhabilité pour un montant de 7 millions de francs : remplacement d'éléments métalliques, rénovation du platelage de la nacelle, contrôle de l'ossature et de la câblerie, et mise en peinture. Réinauguré, il est depuis exploité principalement à des fins touristiques et permet de nouveau le passage des véhicules non immatriculés, des vélos, des cyclomoteurs et des piétons. Le pont levant en aval a été remplacé par le viaduc de Martrou inauguré en 1991 ; le pont levant a été détruit quelques mois plus tard, ne laissant que la base des piles en béton armé. De 2016 à 2020, une nouvelle restauration a remplacé le tablier à âmes pleines datant de 1933 par un tablier à treillis conforme à l'origine ; les traversées ont été interrompues pendant les travaux et la réouverture a été programmée pour l'anniversaire des 120 ans. Le transbordeur a servi de décor à la scène inaugurale du film Les Demoiselles de Rochefort de Jacques Demy en 1966 ; Demy avait envisagé de le faire peindre en rose, proposition refusée par les habitants. Il apparaît également dans le téléfilm La boule noire (2014) de Denis Malleval. Des vues illustrent le pont depuis les rives nord et sud, la nacelle en translation au‑dessus du fleuve, le local machinerie, les piles de fondation et les massifs d'ancrage qui assurent l'équilibre de l'ouvrage.