Origine et histoire
Le presbytère du Petit-Bornand-les-Glières se situe dans la commune du même nom, village du Faucigny, le long du CD 12 reliant Saint-Pierre-en-Faucigny à Saint-Jean-de-Sixt, en Haute-Savoie. L'édifice a été inscrit au titre des monuments historiques en 1985 ; le 14 septembre de la même année ses façades, ses toitures, son mur d'enceinte et son porche ont été classés. Implanté en face de l'église, il domine la Borne et se trouve en contrebas du CD 12.
La construction semble avoir commencé au XIVe siècle sous l'administration de Jean de Verboux, abbé d'Entremont. Lors d'une visite épiscopale le 20 août 1411, la paroisse est décrite comme forte de soixante feux avec un revenu de 80 florins et tenue par le curé don Jean de Burdignin. En 1543, don Jacques de Savoye, protonotaire apostolique et abbé d'Entremont, fut curé ; ses armoiries, de la maison de Savoie traversées d'une barre, furent gravées à gauche du porche et, bien que détériorées pendant la Révolution, restent visibles. Le 19 avril 1626, une visite de l'évêque Jean-François de Sales rapporte que le curé possédait huit journaux de terre autour du presbytère, percevait la dîme sur les grains, le lin et le chanvre ainsi que les prémices des agneaux, et recevait en nature des quantités importantes de blé, d'orge et d'avoine.
Un incendie violent détruisit la cure en 1668 ; Simon Cauly, treizième curé, dut quitter les lieux précipitamment, perdant meubles et archives, puis se retira à La Roche-sur-Foron où il mourut en 1669. Le bâtiment fut reconstruit entre 1780 et 1782 sous la direction d'un maître d'œuvre nommé Vagnat, puis modifié en 1786 sous le curé François Perravex. En février 1794, la cure et l'église furent déclarées propriétés de la Nation par ordre du conventionnel Antoine Louis Albitte, après l'effacement des inscriptions et armoiries de divers bienfaiteurs et ecclésiastiques, notamment celles de l'évêque Magnin.
Pendant la Seconde Guerre mondiale, à partir de la fin 1942, l'abbé Jean Truffy mit le presbytère au service de la Résistance en y abritant des proches traqués par la Gestapo et des acteurs de la création du maquis des Glières. Dans ses mémoires il relate des épisodes de vie quotidienne et d'entraide : l'accueil clandestin d'une femme et de son neveu réfractaire, la célébration de messes pour des maquisards à leur demande et la mise à l'abri d'armes après une arrestation. Le 1er octobre 1943 la cure fut placée sous surveillance, le 30 mars 1944 l'abbé Truffy fut arrêté et déporté à Dachau, puis il retrouva le presbytère en mai 1945. Le presbytère servit également de point d'appui pour les familles des résistants, comme le montrent l'accueil et l'accompagnement des parents de Tom Morel avant son inhumation sur le plateau de Glières.
En octobre 1984 une association se constitua pour empêcher la démolition du bâtiment, alors menacé par un projet municipal de reconstruction et d'aménagement. Au cours d'une réunion en décembre 1984, élus et responsables techniques discutèrent du coût élevé de la restauration, des priorités entre la cure et l'église et des alternatives au déménagement ou à la démolition. Suite au dossier de l'association présidée par Mme C. Périllat, la protection juridique fut obtenue en 1985. Fin 1986 une famille bornianche acquit la bâtisse et le terrain, qu'elle occupa en juin 1987, poursuivant la vie du presbytère dans le respect des contraintes liées à son inscription au registre Mérimée ; le bâtiment n'est pas ouvert à la visite.
Le presbytère est une puissante construction de la fin du XVIIIe siècle, de type « maison forte » savoyarde, entourée d'un haut mur d'enceinte et fermée par un lourd portail en bois. Chaque façade présente un nombre et des dimensions d'ouvertures variables selon l'exposition adret ou ubac ; en 1984 il comprenait dix-neuf pièces habitables. Le bâtiment mesure 18 m de long, 12 m de large et 16 m de haut depuis la cave ; les façades principales comptent vingt-deux ouvertures, la façade à l'ubac en comporte quatre plus petites, et l'épaisseur des murs est de 48 cm. Les archives des intendances du Genevois et du Faucigny conservent des plans dressés par des architectes de la région ou du Piémont.
Le mur d'enceinte protégeait le « jardin du curé », où l'on cultivait légumes, fruits et fleurs ; un écusson épiscopal et de vieux bassins en pierre participent à l'harmonie et à l'aspect robuste de l'ensemble. Le rez-de-chaussée était aménagé pour un usage agricole et la conservation des denrées : un couloir central dessert écurie, cave et grenier, tandis que l'étage regroupe les pièces d'habitation. Parmi ces dernières, « Le Pèle » constitue une pièce chauffée utilisée comme salle à manger et chambre en hiver, et le « contre-cœur » est un renfoncement dans le mur séparé par une plaque de fonte donnant sur une grande chambre. L'édifice est couvert par un toit à quatre pans en ardoises de Morzine ; les façades, bâties en appareil de blocage et simplement enduites, présentent des angles en pierres de taille et des encadrements de portes et fenêtres parfois ornés d'inscriptions.