Origine et histoire du Prieuré d'Ardevon
Le prieuré d'Ardevon est un ancien établissement bénédictin situé dans le hameau d'Ardevon, aujourd'hui rattaché à Pontorson (Manche), à environ huit kilomètres au sud‑est du Mont‑Saint‑Michel, le long de la D280 et à une altitude proche de dix mètres marquant la limite entre les marais et les premiers coteaux. Sa fondation n'est pas précisément établie : la tradition évoque une origine au Xe siècle liée aux moines du Mont‑Saint‑Michel, tandis que, après examen des sources, le duc Richard Ier est souvent considéré comme le fondateur le plus probable ; l'existence du prieuré est en tout état de cause attestée au moins dès 1207. Le cartulaire du Mont‑Saint‑Michel qualifie Ardevon de marescus dans des notices de 1066 et 1159. Les archives médiévales conservées sont fragmentaires et portent essentiellement sur 1239 et la fin du XIVe siècle, mais il apparaît que le prieuré accueillait des pèlerins se rendant au Mont. L'ensemble a été largement rebâti aux XIIe et XIVe siècles : vers 1400 la grange aux dîmes, appuyée de vingt contreforts, était réputée pouvoir contenir quinze mille gerbes de blé, et le corps de logis fut reconstruit peu après. Entre le XIIe et le début du XIVe siècle, les moines ont mené d'importants travaux de poldérisation et de drainage sur les terres saumâtres environnantes, en profitant d'une légère élévation du terrain culminant à douze mètres et en déviant partiellement les cours estuariens de la Sée et de la Sélune ; ces terres, principalement consacrées à l'avoine une fois drainées, restaient toutefois vulnérables aux événements exceptionnels, comme la tempête de 1457 qui rompit digues, écluses et fossés. Pendant la guerre de Cent Ans, le prieuré fut occupé par quatre cents soldats anglais sous le commandement de Jean de Lancastre. À la Révolution, les bâtiments étaient fortement dégradés et l'ensemble évalué à deux mille quatre cents livres. Au XXe siècle, l'intérêt architectural du site a conduit à sa restauration, à sa mise en valeur et à sa protection : l'ensemble des bâtiments a été inscrit à l'inventaire supplémentaire des monuments historiques le 15 septembre 1937. Propriété du conseil départemental de la Manche jusqu'en 2013, le prieuré a été le siège du Syndicat mixte de la baie du Mont‑Saint‑Michel, et certaines dépendances ont abrité la buanderie de l'auberge de la Mère Poulard. En 2014, les diocèses de Coutances et Avranches et de Rennes ont acquis le site pour en faire un lieu d'accueil et de prière destiné aux pèlerins du Mont ; une campagne de fouilles préventives menée par l'INRAP a précédé les travaux, et l'ancien pigeonnier est destiné à devenir un oratoire. Des aménagements et des travaux de restauration ont été réalisés à partir de l'été 2014, notamment par des Scouts et Guides de France, la première tranche d'aménagement du dortoir ayant coûté environ 220 000 euros et l'ensemble du projet étant chiffré à 2 500 000 euros, financé largement par des dons en ligne ; le projet a par ailleurs reçu le grand prix culturel 2014 de la Fondation Louis D., décerné par l'Institut de France et doté de 450 000 euros. Le prieuré peut accueillir cinquante nuitées simultanées et a suscité une demande importante dès l'ouverture des inscriptions, cinq mille réservations étant enregistrées en quelques jours ; les responsables envisagent également l'aménagement de places supplémentaires en bivouac. Outre l'hébergement, le projet comprend un accueil culturel et spirituel : la grange aux dîmes sert désormais de lieu d'expositions, d'ateliers et de débats, et le bâtiment principal accueille une salle de conférences et une bibliothèque, dont une partie numérique, en lien avec le Mont‑Saint‑Michel. L'aile principale du logis se compose de deux bâtiments alignés et bien conservés : le tiers nord, qui conserve son étage résidentiel autrefois desservi par un escalier extérieur aujourd'hui disparu, relève de la première moitié du XIIIe siècle, tandis que les deux tiers restants résultent d'une importante reconstruction du début du XVe siècle. Dans l'enceinte se trouvent encore l'ancien pigeonnier, la grange aux dîmes, une croix de pierre et l'église du village qui jouxte le prieuré. Le prieuré d'Ardevon bénéficie d'une protection au titre des monuments historiques depuis l'arrêté du 15 septembre 1937.