Origine et histoire du Prieuré
Le prieuré de Manthes, situé sur la commune de Manthes au nord du département de la Drôme, a été fondé au XIe siècle par les bénédictins de l'ordre de Cluny. Il dépendait de trois autres prieurés ou obédiences — Charrière, Peaugres et Montchastain — et faisait partie des terres de Moras tout en conférant au prieur quelques droits féodaux. Au XIe siècle, il abritait six ou sept moines qui défrichèrent la région puis se consacrèrent plus tard à l'élevage du ver à soie. Il est attesté au XIVe siècle sous le nom de prioratus de Mantula Cluniaci.
Seul le chevet de l'église conserve un état roman, avec une abside et deux absidioles voûtées en cul-de-four. La croisée est couverte d'une voûte en berceau et repose sur quatre grosses piles en tuf surmontées de chapiteaux. Trois de ces chapiteaux portent des motifs végétaux, le quatrième représente une petite tête d'où sort du feuillage, motif fréquent dans l'art de la vallée du Rhône. Des traces de peintures et de fresques subsistent, notamment sur la voûte d'une absidiole où apparaît le triangle de la Trinité.
Le porche extérieur présente deux voussures en plein cintre surmontées de trois têtes sculptées à longues moustaches, disposées autour d'un vitrail représentant saint Georges; ces têtes semblent être des éléments gallo-romains réemployés. Dans le chœur, un double vitrail figure saint Pierre et saint Paul : les têtes des personnages datent du XVIe siècle tandis que le reste de la verrière a été restauré au XXe siècle. Le clocher, roman, trapu et quadrangulaire de tradition viennoise, a été reconstruit au XVIe siècle en molasse ; il comprend deux étages et des fenêtres géminées au deuxième niveau. En 1741, l'église faillit être interdite en raison de son mauvais état après la combustion du clocher et l'effondrement de la toiture. Rien ne subsiste aujourd'hui du prieuré clunisien ; les éléments visibles datent principalement des XVe et XVIe siècles.
Une légende chrétienne rapporte qu'un chevalier enterré près de l'église apparut à plusieurs reprises à un prêtre nommé Étienne, demandant que son frère Anselme vienne réparer deux péchés non confessés pour le délivrer de ses tourments. Selon la tradition, Étienne entendit un bruit d'armée dans le bois voisin, vit le chevalier défunt à cheval et, pour preuve de ses dires, ne retrouva plus l'argent qu'il avait caché pour un pèlerinage à Compostelle ; la même apparition aurait aussi concerné le chevalier Guillaume du château de Moras. Ne trouvant pas Anselme, Étienne ne put accomplir la tâche demandée.
Parmi les religieux et prêtres qui se sont succédé à Manthes figurent notamment Jean de Beauvoir (1460-?), Vivien (1568-?), Pierre Bourret (d.1675), Bagnoly (jusqu'en 1690), Louis Perrin (1690-?), Argoud (déc.1708), Martignat (1708-?), Joseph Mouret (1721-1772), Jean-François Quincieux (1789-? puis de nouveau en 1805-?), Étienne Escoffier (1792-?), Hyacinthe Revol (1806-?), Jean-François Gondin (1809-?), Jean-Baptiste Antoine Giban (1821-?), Pierre Vassy (1829-?), Jean François Régis Perrier (1838-?), Joseph Montel (1848-1862), Casimir Fiard (1862-? et 1884-1892), André Bouvier (1877-?), Adolphe Fiard (1892-1927), Hippolyte Peloux (1928-1933) et Paul Cabiro (1936-1938). Le site comprend le prieuré, la maison du prieur, le portail, les têtes sculptées de la façade et le vitrail du prieuré.