Prieuré de Meillerie en Haute-Savoie

Patrimoine classé Patrimoine religieux Prieuré Eglise gothique

Prieuré de Meillerie

  • Route des Greys
  • 74500 Meillerie
Prieuré de Meillerie
Prieuré de Meillerie
Prieuré de Meillerie
Prieuré de Meillerie
Prieuré de Meillerie
Prieuré de Meillerie
Prieuré de Meillerie
Crédit photo : Sido74500 - Sous licence Creative Commons
Propriété de la commune ; propriété privée

Période

XIIIe siècle

Patrimoine classé

Les éléments suivants de l'ancien prieuré, situé chemin de l'abbaye, sur la parcelle n° 1836 figurant au cadastre section OA : la tour-clocher, l'église, l'ancienne cuisine et l'ancien poêle en totalité, les façades et toitures du logis et de la tour d'habitation, les caves de l'aile est et de l'ancienne aile nord. Sont également inscrites les parcelles n° 1836 et 1856 à 1859 figurant au cadastre section OA : inscription par arrêté du 22 juin 2015

Origine et histoire du Prieuré

Le prieuré de Meillerie, situé dans le village du même nom en Haute‑Savoie (région Auvergne‑Rhône‑Alpes), est un établissement de chanoines réguliers de saint Augustin dépendant de l'hospice du Grand‑Saint‑Bernard. Il conserva son contrôle spirituel et temporel jusqu'à sa suppression en 1752 et appartient à la typologie des prieurés‑fortifiés. Les bâtiments comprenaient alors un château et une tour de défense isolée servant de prison ; la nef actuelle relie l'ancienne chapelle au beffroi primitif. En 1803 l'ancien prieuré fut récupéré comme église et presbytère ; les vitraux brisés par un orage en 1822 entraînèrent le murage de l'oculus et de deux baies géminées du chevet, puis de nouveaux vitraux de Jean‑Augustin Bessac furent posés en 1877 et la toiture refaite en 1895. Du XIIIe siècle subsistent le chœur de l'ancienne chapelle et le clocher‑tour. La tour‑clocher et le chœur ont été inscrits au titre des monuments historiques le 17 juillet 1990, et la protection a été étendue par arrêté du 22 juin 2015 à la tour‑clocher, à l'église, à l'ancienne cuisine et à l'ancien poêle en totalité, aux façades et toitures du logis et de la tour d'habitation, aux caves de l'aile est et de l'ancienne aile nord, ainsi qu'aux parcelles OA n°1836 et 1856 à 1859.

Les premières mentions des chanoines remontent au XIIe siècle ; une enquête du XIIIe siècle donne comme fondateurs trois personnages — Boson d'Allinges, Boson et Gaudemard de Lugrin — et situe la fondation vers 1130 avec l'accord du comte Amédée de Maurienne. Dès le XIIIe siècle le prieuré prit de l'importance lorsque le sire Aymon II de Faucigny et Amédée IV de Savoie cédèrent aux religieux les droits de justice sur Meillerie, Lugrin et Thollon, ce qui provoqua la construction d'un nouvel établissement et la nomination de deux prieurs comme prévôts du Mont‑Joux. Meillerie devint jusqu'au XVe siècle résidence du prévôt et centre administratif, chef d'une seigneurie couvrant une grande partie de l'est de l'actuelle communauté de communes du Pays d'Évian ; ses limites vont du nant de Torrent au nant du Locum en passant par le mont Bénand, le mont César, le pic de Borée et les pointes de Pétalouse, Blanchard et du Pré Désert. La seigneurie disposait de sa propre prison dans la tour et de fourches patibulaires, et certains prévôts portèrent le titre de « seigneur de Meillerie, de Thollon, de Lugrin, de Tourronde et de Novel », si bien que le prieuré fut parfois appelé « château ». De violents conflits avec la ville d'Évian surgissent dès le XIIIe siècle au sujet des limites et des droits seigneuriaux ; malgré une confirmation des droits en 1289, les altercations se poursuivirent et aboutirent notamment, en 1314, à un pillage commis par soixante‑neuf habitants d'Évian sanctionné par des amendes et par de nouvelles confirmations des limites. Les comtes Amédée V, Édouard et Aymon intervinrent à plusieurs reprises pour garantir les droits de Meillerie contre Évian. La mise en commende du Grand‑Saint‑Bernard au XVe siècle affaiblit le prieuré, les querelles se poursuivirent avec Évian autour des bois de Bret et la résidence des prévôts se déplaça au château de Rives‑sous‑Thonon.

Au XVIe siècle les attaques nocturnes rapportées par Quaglia, les guerres et les invasions (Valaisans, Genevois, Français) endommagèrent le prieuré et réduisirent fortement le nombre des chanoines ; au XVIIe siècle la situation s'apaise et les archives montrent le fonctionnement agricole et les revenus de la seigneurie, puis en 1676 un accord met fin aux longs procès avec Évian par l'échange des bois de Bret contre une dîme à Publier. Le XVIIIe siècle connaît des restaurations et un important mobilier, mais en 1752 la prévôté du Mont‑Joux est démantelée et Meillerie est donné à l'Ordre des Saints‑Maurice‑et‑Lazare qui y installe un curé ; ce dernier, Guérin Peillex, signale le manque de revenus et l'abandon des bâtiments. Pendant la Révolution française le prieuré sert de logement à une garnison, les bâtiments sont alors très dégradés et la destruction des tours fut ordonnée, mais la municipalité de Thollon obtint de conserver la tour de Meillerie en contrepartie du démantèlement du clocher de Thollon ; les bâtiments furent ensuite vendus aux villageois puis offerts à la municipalité pour loger le curé, après intervention du préfet. Au XIXe siècle la petite église du prieuré est agrandie par la construction d'une nef reliant le chœur à la tour et le cimetière est déplacé autour de la tour devenue clocher, travaux qui s'étalèrent en raison de difficultés de financement.

L'église Saint‑Bernard‑de‑Menthon mêle architecture médiévale (XIIIe siècle) et apports du XIXe siècle ; le chœur, ancienne chapelle du prieuré, mesure dix mètres de long sur sept mètres cinquante de large et sa voûte culmine à dix mètres ; il est rythmé par six colonnes de molasse à chapiteaux végétaux qui portent deux voûtes d'ogives et deux clés de voûte peintes représentant le Christ montrant ses stigmates et l'Agneau pascal. Le chevet est orné d'une rosace particulière à six lobes et six trèfles avec un centre évidé, ainsi que de deux grandes baies encadrées de colonnettes sculptées en molasse ; les vitraux représentent notamment saint Augustin et saint Bernard d'Aoste et une peinture du début du XVIIIe siècle illustre saint Bernard capturant le diable, un temple païen et un paysage montagnard. La nef du XIXe siècle comprend deux travées, est plus large que le chœur et a été insérée entre ce dernier et la tour.

La tour, réemploi du donjon du XIIIe siècle, est construite en blocs de tuf et moellons ; initialement défensive avec archères et fenêtres à meneau, planchers et escaliers en bois, elle fut transformée au début du XVIIIe siècle par un maçon‑nement complet des intérieurs, la création de voûtes d'arêtes et l'installation d'une cage d'escalier, puis percée au XIXe siècle d'une porte au rez‑de‑chaussée et surmontée d'un beffroi. Elle a servi successivement de structure défensive, de prison seigneuriale, de salle de torture et de cellier, avant de conserver les archives et les fonds des chanoines.

Du logis primitif subsistent des portions de l'aile orientale et de la tour d'habitation nord‑est ; il comportait autrefois une aile nord, de hauts murs d'enceinte crénelés et une cour centrale, ainsi que de vastes caves abritant fromageries, pressoir et étable ; l'aile est contenait cuisine, poêle, réserve et chambres dont celle du prieur, tandis que l'aile nord comprenait une aula magna et des chambres détruites au XIXe siècle lors de la construction de la nef. Aujourd'hui la place qu'occupe l'ancienne aile nord a remplacé ces constructions, les murs d'enceinte ont disparu et l'aile orientale sert de sacristie et de logement succédant à l'ancienne cure.

La succession des prieurs et des gouverneurs est documentée : parmi les prieurs figurent Girold (1127–1151), Guido (1191), Guerric (avant 1227–1245), Raymond Bondat (vers 1258), Pierre (?–1265), Martin (?–1274), Nicolas (1299), Pierre de Villario (1380), Jean Jopelli (1438), Jean Genevisi (1476–1482), Guillaume Barbier (1483), Henri Girard (1573), Pantaléon Vautherin (1589), Joseph Annibal Movilliat (1693–1718), Léonard Jorioz (1719–1728) et Jean Léonard Veysandaz (1730–1752) ; parmi les gouverneurs figurent Morard Costani (1409), Jean Jopelli (1438), Jean de Châtillon (14??–1465), Amédée de Bosson (1465–1477), Jean de Châtillon (1477), Guy d'Arlo (1479), Guillaume Folliet (1502), Jean Plat (1523), Louis Duplâtre (1527–15??), Antoine Duplâtre (15??–1569), Jacques Castellet (1573–1574), Nicolas Farnex (1613–1621), les frères Boccard (16??–1699), Jean Pantaléon Tornieux (1669–1684), Joseph Annibal Movilliat (1693–1718), Léonard Jorioz (1719–1728) et Jean Michel Perron (1729–17??).

Liens externes