Origine et histoire du Prieuré
Le prieuré de Saint-Arnoult, situé dans l'Oise (Hauts-de-France), est un prieuré bénédictin qui a dépendu successivement des abbayes de Saint-Germer-de-Fly puis de Beaubec. Il se présente comme une belle maison à pan de bois à double encorbellement, remarquable par la qualité de son ossature et par les sculptures qui ornent les sablières et les entretoises. Ce modeste prieuré ne conserve pas de traces d'un lieu de culte ni d'indices évidents de vie monastique ; son intérêt principal réside dans son architecture en pan de bois et dans son décor sculpté. La rareté de cet ensemble, de tradition tardomédiévale en pan de bois et torchis, a motivé l'inscription au titre des monuments historiques des façades et toitures, ainsi que des deux cheminées du rez-de-chaussée, par arrêté du 30 mai 1988.
Ses origines sont attestées dans des « anciens titres authentiques » conservés aux archives de l'hospice de Clermont, et son histoire s'inscrit dans la propagation du culte de saint Arnoult au XIe siècle dans le comté de Clermont. Le toponyme renvoie à saint Arnoult d'Yvelines ; selon les traditions citées, il aurait été évêque de Tours, épousé Scariberge, nièce de Clovis, et aurait été inhumé à Saint-Arnoult-en-Yvelines. Les reliques du saint firent l'objet d'un vol en 935 au profit de Crépy-en-Valois, où une abbaye fut fondée, et le culte se diffuse largement aux Xe–XIIe siècles au nord de Paris et en Île-de-France. À Clermont-en-Beauvaisis, une collégiale dédiée à saint Arnoult et à Notre-Dame est fondée par les seigneurs de Clermont, et la promotion du culte local est influencée par des religieux tels que Guibert de Nogent.
La façade porte plusieurs coquilles Saint-Jacques, rappelant la place du pèlerinage de Compostelle ; le prieuré se situe sur un axe Boulogne–Chartres emprunté par les pèlerins se dirigeant vers Tours, et les réseaux de dévotion comme celui de saint Martin ont contribué à la popularité des cultes locaux. Les abbés de Beaubec furent partiellement seigneurs de Saint-Arnoult ; un plan de 1751, conservé aux archives départementales de l'Oise, montre les bâtiments d'exploitation agricole autour d'une cour carrée, le logis seigneurial ainsi que les terres et bois dépendant de l'abbaye. Un blâme d'aveu déposé en 1746 par Charles du Sauzet Du Mas, dernier abbé régulier de Beaubec, atteste encore ce lien juridique.
Au fil du temps, le prieuré devient une exploitation agricole, ce qui a contribué à sa conservation malgré des vicissitudes : un incendie en 1972 détruit une grande partie des bâtiments mais épargne le logis du XVe siècle. À la fin du XIXe siècle, le comte Louis Antoine Ferrand et son frère, le vicomte Ferrand, en sont propriétaires indivis ; par adjudication, la propriété et ses terres sont vendues le 30 janvier 1898 à la famille Lenoir, apparentée à la famille de Boufflers. Louée à plusieurs générations de fermiers, elle reste dans cette famille jusqu'en 1982, date à laquelle elle est acquise par Gilles et Nelly Alglave, qui en font leur résidence et entreprennent des travaux de restauration. Le prieuré est désormais partiellement inscrit aux monuments historiques et ouvert à la visite.
Architecturalement, la partie la plus ancienne du corps de logis utilise une technique d'assemblage à bois courts et présente deux niveaux d'encorbellement sur sommiers ainsi qu'un comble à surcroît. Les éléments qui structurent la façade alternent selon le rythme du « tant plein que vide » caractéristique de l'époque. L'ossature, en chêne à cœur, est robuste et le hourdis est en torchis protégé par un enduit de chaux aérienne ; ces qualités témoignent d'une abondance et d'une bonne tenue du bois d'œuvre à la sortie de la guerre de Cent Ans. L'exposition orientale de la façade et le fort surplomb des encorbellements protègent les sculptures des eaux de ruissellement, ce qui explique leur bon état de conservation. Les deux appentis sont des adjonctions de la fin du XVIIIe siècle, période où la construction en pan de bois évolue vers une économie de moyens et où le colombage est souvent masqué par l'enduit. Le corps de logis a par ailleurs été amputé de plusieurs travées, la construction originelle s'étendant plus loin vers la droite.
Le décor sculpté relève d'un vocabulaire symbolique médiéval puisant dans les règnes végétal, animal et humain : roses, coquilles, feuilles de chêne, paons, poissons, serpents, dragons, visages humains, singe et chiens se mêlent sur les éléments de bois. Certains abouts de sommiers conservent des traces de têtes très érodées, encore lisibles par leurs coiffes. Une poutre présente une alternance de roses sculptées en positif et en négatif et de coquilles offertes en face convexe et concave, motif fréquent sur des monuments liés aux itinéraires jacquaires. On relève aussi la présence d'une fleur de lys, d'une dédicace à la Vierge avec les lettres MARIE formées par des serpents, des scènes de combat contre un dragon, ainsi que diverses figures animales — chiens, singe tricéphale, paons — et des détails naturalistes tels que les veines des feuilles et la représentation de la chélidoine.