Origine et histoire du Prieuré du Bourget
Le prieuré du Bourget, ancien monastère du XIe siècle, se situe sur la commune du Bourget‑du‑Lac en Savoie. Des moines bénédictins liés à l'abbaye de Cluny y édifièrent une première église romane dont subsiste la crypte. L'église fut largement rebâtie au XIIIe siècle et rénovée au XVe siècle, de même que les bâtiments conventuels. Le prieuré passa en 1582 sous la dépendance des Jésuites, puis ses biens furent confiés aux Franciscains en 1773 ; la Révolution mit fin à son affectation monastique. Vendu comme bien national, il connut des propriétaires négligents qui endommagèrent certains éléments et transformèrent l'église en grange. Racheté au tournant du XXe siècle par un amateur d'art, il bénéficia ensuite, lors de son acquisition par la duchesse de Choiseul en 1912, d'une restauration et d'un aménagement des jardins à la française. Réquisitionné durant la première guerre mondiale, l'ensemble fut acquis par la commune en 1952, qui l'ouvre depuis à la culture et aux manifestations publiques. La prioriale est aujourd'hui l'église paroissiale Saint‑Laurent ; subsistent également un cloître et un jardin issu de l'ancien potager transformé au XXe siècle. La crypte Notre‑Dame‑la‑Basse, rare vestige du premier art roman en Savoie, est semi‑circulaire et flanquée de deux absidioles ; elle présente trois nefs en berceau séparées par quatre colonnes. On y a retrouvé des inscriptions dédiées au dieu Mercure, et l'édifice a pu abriter autrefois un reliquaire ; l'accès actuel se fait par une porte au nord du chœur. La prioriale, essentiellement de style gothique primitif, conserve une nef de quatre travées précédée d'une avant‑nef et bordée de cinq chapelles communicantes, sans transept marqué. Les chapelles accueillent notamment les fonts baptismaux, une chapelle dédiée à saint Antoine de Padoue, une chapelle Saint‑Laurent à plafond en cul‑de‑four et plusieurs aménagements remaniés au XVe siècle. Le cloître ne conserve qu'une galerie à étage, attribuée à Jacques de Montmayeur au XIIe siècle, dont le niveau supérieur comporte des fenêtres tréflées et des chapiteaux décorés de feuilles et de roses, ainsi que les armes des Montmayeur. La principale œuvre sculptée se trouve dans le chœur : les vestiges d'un jubé de pierre polychrome, classé, dont les panneaux représentent des épisodes de la vie du Christ et des scènes liturgiques. Ces reliefs, découpés en plusieurs blocs et réassemblés au XIXe siècle, offrent notamment le Noli me tangere, les disciples d'Emmaüs, la Descente de Croix, les saintes femmes au tombeau, l'incrédulité de Thomas, l'entrée à Jérusalem et des épisodes du cycle de la Nativité tels que l'Adoration des Mages et l'Annonciation. Au Moyen Âge, le prieuré bénéficia de la faveur de la maison de Savoie, qui lui concéda privilèges et revenus et utilisa parfois ses appartements ; la proximité du château du comte Thomas II a également marqué son histoire. L'activité du prieuré déclina à la fin du Moyen Âge, en partie en raison du déplacement des résidences comtales et des difficultés financières attestées par les visites épiscopales. La famille de Luyrieu, aux XVe et XVIe siècles, fut déterminante dans la rénovation de l'église et du cloître, ornant les élévations de ses armoiries et supervisant des remaniements architecturaux et décoratifs. Les travaux menés sous leur direction comprennent la surélévation des murs de la nef, des arcs modifiés, des culots ornés d'anges portant des armoiries, et l'aménagement d'un chœur voûté d'ogives. L'ensemble conventuel comprenait la salle capitulaire, le réfectoire, la cuisine et une bibliothèque ornée de panneaux de cuir de Cordoue, ainsi qu'une tour comtale d'habitation. Les protections patrimoniales ont été mises en place au XXe siècle : l'église classée en 1900, le cloître, la galerie Montmayeur et l'escalier classés en 1910, le reste du prieuré inscrit en 2006. Le prieuré du Bourget‑du‑Lac demeure un témoin important de l'art roman et gothique en Savoie et accueille aujourd'hui des activités cultuelles, associatives et culturelles qui participent à sa conservation.