Origine et histoire du Prieuré Notre-Dame
Le prieuré de Vausse, situé dans la forêt domaniale de Saint-Jean sur la commune de Châtel-Gérard (Yonne), a été fondé à la fin du XIIe ou au début du XIIIe siècle par Anséric de Montréal et dépendait de l'abbaye du Val des Choues. Le fondateur donna les terres du lieu-dit Les Vaulcées (Le Vaux) pour y établir une maison placée sous le vocable de Saint-Denis et de Notre-Dame. Protégé d'abord par les seigneurs de Montréal puis par les ducs de Bourgogne, le prieuré reçut de nombreuses donations — terres, fermes, rentes et dîmes — et connut une grande prospérité aux XIIIe et XIVe siècles, percevant aux alentours du XVe siècle dîmes et redevances sur une quarantaine de villages. Les moines, au nombre d'une vingtaine au plus, menaient une vie rythmée par la prière et le travail agricole selon la règle du Val des Choues, et le prieuré jouissait d'une réputation régionale notable. À la fin du XVe siècle, les bâtiments étaient en mauvais état : le prieur Guy Bousson fit édifier en 1491 deux galeries du cloître et, en 1511, les deux autres galeries furent achevées par un moine natif de l'Isle et par Pichenot de Marmeaux. La perte des protecteurs à la mort de Charles le Téméraire amorça toutefois le déclin : au XVIe siècle les dons diminuèrent et les vocations faiblirent, si bien qu'à mi‑siècle le couvent ne comptait plus qu'un prieur, cinq moines et deux novices. Les héritiers contestèrent parfois les donations et la communauté dut vendre des biens ; la commende, avec des prieurs nommés par le pouvoir royal et souvent absents, accentua le relâchement de la discipline. Un incendie endommagea une aile du prieuré et, en 1745, Denis d'Estiennot de Vassy fit restaurer certains bâtiments et raser des constructions devenues inutiles, notamment dans l'aile orientale où se trouvaient la salle capitulaire et le dortoir. En 1763, le dernier moine quitta Vausse pour l'abbaye du Val des Choues. Mis en vente comme bien national à la Révolution, le prieuré fut acquis en 1792 par Joseph Dumortier, qui transforma l'église et une chapelle en ateliers et four pour y installer une faïencerie ; le clocher fut détruit et un mur de refend supportant un plancher fut établi dans la nef. La faïencerie produisit vaisselle, statuettes, carreaux et pots de pharmacie en utilisant des argiles locales et d'autres provenances, et la production était ensuite expédiée par route ou par bateau depuis Aisy‑sur‑Armançon. Après plusieurs cessions, Nicolas Petit devint propriétaire puis son fils François prit la direction ; la fabrication fut ensuite regroupée avec celle de la faïencerie des Cornes et cessa définitivement à Vausse en 1858. Ernest Petit, né au prieuré en 1835, aménagea vers 1860 l'ancienne église en bibliothèque et cabinet de travail, rédigea de nombreux travaux historiques et entreprit des restaurations qui rendirent aux bâtiments leur aspect monacal. Aujourd'hui les descendants d'Ernest Petit occupent la ferme voisine et, avec l'association Vausse Animation, s'emploient à protéger ce patrimoine ; des visites guidées, expositions et manifestations culturelles y sont organisées. L'église, disproportionnée par rapport au nombre de religieux, mesure 33 m de longueur ; elle comprend une nef voûtée d'ogives avec un bas-côté au nord, un chevet à droite épaulé au sud par un contrefort et une façade occidentale renforcée par un massif de maçonnerie. Le cloître, adossé au nord de l'église, est un carré de 21,30 m de côté construit en 1491 et 1511 ; il s'ouvre sur des galeries composées chacune de neuf arcades en plein cintre autour d'un jardin doté d'un puits, et ses chéneaux en pierre conduisent les eaux de pluie vers une citerne sous le jardin. Seules subsistent quelques traces de l'annexe construite pour accueillir les fidèles et, dans l'angle sud‑est du cloître, le départ de l'escalier à vis qui menait au dortoir.