Origine et histoire du Prieuré Saint-Victor de Bray
Le prieuré Saint-Victor de Bray-sur-Aunette est un ancien prieuré de chanoines réguliers de saint Augustin, dépendant de l’abbaye Saint-Victor de Paris, situé sur la commune de Rully dans l’Oise, en Hauts-de-France, au cœur du parc naturel régional Oise‑Pays de France. Il a été fondé par testament de Guillaume le Bouteiller en 1249 et rattaché à Saint‑Victor de Paris, la fondation ayant reçu confirmations royales et pontificales et été adaptée à une communauté de six chanoines en raison de revenus limités ; l’abbaye reçut une somme destinée à la construction et des revenus annuels affectés au prieuré. Le prieur Raoul de Crécy et cinq chanoines furent installés le 24 décembre 1263, date présumée de l’achèvement de la chapelle, qui était réservée à l’usage des religieux tandis que les habitants assuraient le culte paroissial à Saint‑Georges. La guerre de Cent Ans et la faiblesse des ressources entraînèrent une longue période de raréfaction des religieux, au point qu’un décret permit d’entretenir un seul chanoine, le prieur étant alors souvent seul avec le personnel laïc chargé de l’exploitation agricole. Le prieuré connut peu d’événements saillants dans les sources conservées, mais les auteurs soulignent son implication dans la vie spirituelle et économique locale. Vers 1650 les bâtiments furent dévastés par les troupes du maréchal de Turenne puis réparés sous le prieur Benoît Faure, qui remit la maison en état ; sa dalle funéraire, comme celle de Jean‑Louis Hardy de Gely, est encore signalée dans la chapelle. Le dernier prieur, Jean‑Baptiste Casnet, mourut au début des années 1770 ; l’abbaye ne le remplaça pas et loua le domaine à un bourgeois parisien chargé d’entretenir la chapelle. Vendu comme bien national en 1791, le prieuré devint définitivement une ferme et les bâtiments conventuels furent démolis entre 1827 et 1836. Ne subsistent aujourd’hui la chapelle de style gothique rayonnant, une cave, un pigeonnier médiéval, des éléments du mur de clôture et du portail, ainsi que des bâtiments des deux basses‑cours datés de l’époque moderne et deux constructions agricoles de 1900. La cave et des vestiges archéologiques au nord de la chapelle furent inscrits aux monuments historiques en 1926, la chapelle et le colombier furent classés en 1943 au moment où Christiane et Charles de La Bédoyère prirent possession du lieu ; ils firent poser des tirants d’acier en 1963 pour éviter l’effondrement des voûtes et restaurèrent le corps de ferme dans les décennies suivantes. La famille Delacharlery, propriétaire depuis 1981, mena des travaux importants et refit charpente et couverture en 1996, et la famille Sirot Saunier, acquéreuse en 1998, organisa la restauration des bâtiments des basses‑cours puis, avec l’association des Amis du prieuré fondée en 2004, entreprit la restauration intégrale de la chapelle entre 2005 et 2012 ; la chapelle accueille désormais chaque année concerts et autres manifestations culturelles, et l’étang du prieuré a été réhabilité en 2012‑2013. Le site s’étend à l’est du hameau de Bray‑sur‑Aunette, à 85,5 m d’altitude, accessible par la RD 582 et bordé au nord par la source de l’Aunette ; l’ensemble des bâtiments se dispose dans un enclos approximativement rectangulaire avec la chapelle au centre et la ferme concentrée sur la partie occidentale, le grand étang faisant aussi partie du domaine. La chapelle présente un plan assez simple et typiquement rayonnant : un vaisseau central de cinq travées voûtées sur croisées d’ogives se termine par un chevet à pans coupés, auquel s’adjoint, au nord et au niveau de la quatrième travée, une chapelle latérale plus basse ; la cinquième travée comporte une partie droite et un chevet à trois pans. Les dimensions intérieures sont notées : longueur du vaisseau 25,60 m, largeur 7,75 m, hauteur sous clés 11,70 m, hauteur au faîte 19,00 m, hauteur des fenêtres 7,20 m et épaisseur des murs 0,80 m ; la chapelle latérale mesure environ 6,50 m par 4,86 m et la superficie utile dépasse 220 m². À l’extérieur, l’architecture, sobre du fait d’un budget restreint, manifeste une exécution soignée : les murs sont construits en blocage de moellons avec arase de briques, dissimulés par un parement appareillé excepté aux soubassements des fenêtres et contre la chapelle latérale, tandis que contreforts minces, larmiers continus et un pignon percé d’un quadrilobe rythment les élévations ; le portail occidental, haut et étroit, conserve des éléments sculptés mais son tympan est aujourd’hui un bloc de béton et les vantaux sont modernes. Les grandes baies, qui occupent une large part des élévations, ont été en grande partie obturées avant et après l’abandon, mais quelques fragments de vitraux du XIIIe siècle subsistent dans le mur gouttereau nord. L’intérieur révèle pleinement l’esprit rayonnant par l’harmonie des proportions, la finesse des moulurations, la minceur des fûts et l’importance de la surface vitrée ; les clés de voûte rondes sont ornées de feuillages et flanquées de têtes sculptées, les ogives et arcs-doubleaux partagent un profil commun qui donne de la légèreté, et les supports forment des faisceaux de petites colonnettes tandis qu’un élégant bassin liturgique est ménagé dans l’épaisseur du mur du chevet. La chapelle latérale, moins éclairée, communique par une grande arcade à double rouleau et présente une sculpture et une modénature analogues à la nef ; elle semble avoir servi à des offices privés de fondation. Au fil des siècles la plupart des aménagements conventuels ont disparu ou été transformés, mais la chapelle conserve des éléments architecturaux et décoratifs remarquables qui ont motivé sa protection et les campagnes de restauration menées au XXe et XXIe siècles, permettant aujourd’hui la valorisation culturelle du prieuré.