Origine et histoire
La prison Montluc, située 4 rue Jeanne-Hachette dans le 3e arrondissement de Lyon, a été construite en 1921 comme établissement militaire sur les glacis du fort Montluc. L'édifice comprend un bâtiment cellulaire flanqué de deux quartiers inégaux et un avant-corps abritant les escaliers ; le portail d'origine subsiste malgré deux percements dans le mur d'enceinte. Destinée à la justice militaire régionale, elle disposait à l'origine de 122 cellules individuelles et d'équipements annexes (greffe, cuisines, pavillon des officiers, douches, ateliers) ; la prison ferma en octobre 1932 puis rouvrit en 1939. Remise en service dès décembre 1939, elle accueillit des justiciables militaires mais aussi de nombreux militants communistes visés par l'état de siège. Sous le régime de Vichy, Montluc reçut des militaires jugés par des juridictions militaires, des insoumis, des premiers résistants et des membres de groupes interdits, et sa population carcérale augmenta fortement, atteignant dès 1941 près de 400 détenus pour une prison prévue pour 127. Progressivement réquisitionnée par les autorités allemandes à partir de janvier 1943, elle fut entièrement occupée le 17 février 1943 et placée sous le contrôle des services allemands, dont Klaus Barbie. Montluc devint alors un centre de détention pour otages, persécutés raciaux et résistants, en attente de transfert ou de déportation ; la surpopulation fut extrême, des cellules de 4 m2 accueillant parfois jusqu'à huit détenus. Les estimations du nombre de personnes ayant transité par Montluc pendant l'occupation varient, évoquant plusieurs milliers (entre environ 7 000 et 10 000 selon les sources), parmi lesquelles figurent Jean Moulin et Marc Bloch. Plusieurs événements marquants se déroulèrent à Montluc : Jean Moulin y fut interné après son arrestation du 21 juin 1943, André Devigny s'y évada le 25 août 1943 et les enfants d'Izieu y furent conduits le 6 avril 1944 avant leur déportation. Entre le 8 avril et le 21 août 1944, 669 internés furent exécutés en 33 lieux distincts ; d'autres massacres liés à l'évacuation allemande firent plusieurs centaines de victimes, notamment au fort de Côte-Lorette et sur l'aérodrome de Bron. Les Allemands quittèrent la prison le 24 août 1944 en remettant les clés à des officiers français, le drapeau fut hissé le 25 août et la ville de Lyon fut libérée le 3 septembre 1944. Après la guerre, Montluc fut affectée à l'administration pénitentiaire en 1947 et devint le troisième quartier des prisons de Lyon ; un décret de 1955 fixa les exécutions capitales pour la ville à Montluc, d'abord appliqué le 6 août 1958. Durant la guerre d'Algérie, entre 1959 et 1961, des membres du FLN et du MNA condamnés par le tribunal permanent des forces armées furent incarcérés à Montluc et onze condamnés à mort y furent guillotinés entre février 1960 et janvier 1961. La prison continua d'accueillir réfractaires, déserteurs et autres prévenus militaires jugés par le TPFA, juridiction supprimée en 1982 ; on note également des événements ponctuels, comme une intrusion militante en 1974, l'incarcération symbolique de Klaus Barbie en 1983 et l'utilisation d'une aile désaffectée pour l'entraînement des ERIS en 1997, tandis que l'aile des femmes resta en activité jusqu'à la fermeture de l'établissement en 2009. Inscrite au titre des monuments historiques le 25 juin 2009, une grande partie de la prison a été transformée, avec le concours d'associations et des autorités locales, en Mémorial national consacré à l'internement sous Vichy et l'occupation allemande ; le Mémorial, inauguré le 14 septembre 2010, appartient au ministère des Armées et est géré par l'Office national des anciens combattants et victimes de guerre. Le site figure parmi les hauts lieux de mémoire nationaux, propose des visites gratuites et des expositions temporaires, et a inspiré plusieurs œuvres cinématographiques.