Origine et histoire du Puits Hottinguer
Le puits Hottinguer, l'un des principaux charbonnages des houillères d'Épinac, se distingue par son système d'extraction atmosphérique original. Les bâtiments, édifiés entre 1872 et 1876, abritaient un piston se déplaçant dans un tube de 558 mètres usiné au Creusot selon la technique de l'ingénieur Zulma Blanchet, solution retenue parce que les câbles traditionnels ne permettaient pas alors d'atteindre de grandes profondeurs. Le fonçage du puits a commencé le 26 mai 1863 et, après avoir atteint 447 mètres en 1868, la houille a été trouvée le 17 novembre 1871 à 618 mètres de profondeur, faisant du puits le plus profond de France à sa mise en service. L'exploitation initiale resta faible jusqu'aux années 1884-1885 en raison de difficultés liées au système pneumatique, de la puissance insuffisante d'une machine à vapeur de 40 chevaux et de la qualité médiocre des couches rencontrées. La production augmenta ensuite avec de nouvelles découvertes à l'étage 618 et après la fiabilisation du procédé pneumatique. À la suite du décès de M. Blanchet en 1887, l'extraction par tube fut arrêtée et l'exploitation se concentra sur l'étage 618 en traction par câbles. La centrale électrique du puits fournissait du courant au moins jusqu'à Autun et Meursault en 1910. Le puits cessa définitivement d'extraire en 1936, soit trente ans avant la fermeture complète du bassin d'Épinac.
Par ses dimensions et son architecture de type « tour Malakoff », le bâtiment du puits Hottinguer est unique en France ; il regroupait le chevalement et la machine d'extraction dans un même corps, solution inspirée des systèmes belges et allemands et dictée par les contraintes du procédé atmosphérique. Le principe d'extraction pneumatique employait un tube traversant tout le puits et comportant un piston ; une machine pneumatique située au carreau aspirait l'air au‑dessus du piston pour le faire monter, tandis que des vannes réintroduisaient l'air pour réguler sa descente avec la cage. L'utilisation de ce procédé pour le puits Hottinguer fut autorisée par décision ministérielle le 10 juin 1873 ; le tube, fabriqué au Creusot, fut installé au milieu des années 1870 et le premier essai, le 23 juillet 1876, permit au piston de parcourir 558 mètres en vingt minutes. La machine plus puissante, fabriquée à Saint‑Étienne par les ateliers Révollier et Bétrix, fut livrée en 1880 et mise en service deux ans plus tard ; d'une puissance de 1 500 chevaux, elle comprenait deux machines à vapeur couplées à deux cylindres de 1,2 mètre et réduisait l'ascension à trois minutes et la descente à six minutes.
L'installation comportait un tube assemblé en 485 viroles en tôle de 8 millimètres, d'un poids total de 342 025 kilogrammes et d'un diamètre de 1,6 mètre ; les pistons étaient en bois étanchéifié par une garniture de cuir, la cage en acier comportait trois étages, et le puits, de 4,25 mètres de diamètre utile, était divisé en quatre compartiments pour le tube, les échelles, l'extraction par câbles et l'aérage. L'intérêt patrimonial pour ce site est ancien : dès la fin du XIXe siècle le puits attirait des visiteurs et la visite du Hottinguer fut la seule excursion prévue lors du congrès de la Société de l'Industrie Minérale de France en 1893. Des mémoires d'élèves de l'École des mines et des publications spécialisées ont aussi documenté sa singularité, et la prise de conscience plus large de sa valeur patrimoniale remonte aux années 1980.
Le site fut racheté en 1948 par la société Bitulac qui y installa une usine de peinture ; il a subi un incendie partiel le 12 mars 1989 et a été abandonné en 1998. Le puits et ses bâtiments ont été inscrits au titre des monuments historiques le 26 novembre 1992, puis classés par arrêté du 11 octobre 2022, le classement se substituant à l'inscription antérieure. En 2012 le site était désaffecté ; subsistent la tour Malakoff, ses deux ailes (dont une sans toiture), quelques annexes, une cheminée tronquée, des ruines et plusieurs bâtiments plus récents liés à l'ancienne entreprise de peinture.
Un comité associant collectivités, État, DRAC et associations a débattu d'une réhabilitation comprenant la rénovation des bâtiments et l'implantation d'une centrale photovoltaïque de huit hectares sur un ancien site de stockage ; les travaux sont envisagés sur une période de dix à quinze ans. Depuis la fin 2012 des opérations de déblaiement et des chantiers d'insertion ont permis d'engager la restauration : débroussaillage et nettoyage fin 2012, un chantier d'insertion d'avril à décembre 2013 a commencé la reprise des voûtes et de la charpente, la restauration des ailes attenantes a été achevée au printemps 2014 par l'entreprise Dufraigne, et la tour a fait l'objet d'une rénovation extérieure entre 2015 et 2017. Après 2017, les travaux de construction de la centrale photovoltaïque ont débuté. Le puits Hottinguer, unique exemple d'exploitation par tube atmosphérique et l'un des derniers grands témoignages de l'activité industrielle du bassin bourguignon, bénéficie aujourd'hui d'une protection au titre des monuments historiques et fait l'objet d'interventions de sauvegarde et de reconversion.