Origine et histoire des Ruines gallo-romaines
Le site a livré les vestiges d’une villa gallo-romaine, d’un cimetière du haut Moyen Âge et des sarcophages romans du XIIIe siècle. La villa comprenait notamment un sudatorium cruciforme, un caldarium à abside, un ensemble de murs formant trois côtés d’une cour ou d’un gymnase, un tepidarium et un frigidarium, ce dernier et le tepidarium étant ornés de mosaïques. Classée monument historique, la villa de Montcaret a été partiellement dégagée entre 1921 et 1939 ; les fouilles ont mis au jour la partie résidentielle et de riches mosaïques en place, restaurées dans les années 1950 et protégées sous des toits. D’après l’archéologue Catherine Balmelle, ces décors rattachent la demeure aux riches résidences aristocratiques d’Aquitaine des IVe–Ve siècles. Les vestiges et le musée attenant sont ouverts à la visite toute l’année.
Le site se situe sur la commune de Montcaret, en Dordogne, sur une butte proche de la route reliant Castillon-la-Bataille à Sainte-Foy-la-Grande et Bergerac, à quelques kilomètres du cours de la Dordogne. Installée à 30 mètres d’altitude sur les premiers contreforts dominant la rive droite, la villa bénéficiait d’une situation à l’abri des inondations et des vents du nord, de sources résurgentes pour l’approvisionnement en eau et de la proximité du tracé présumé de la voie antique reliant Burdigala à Vesunna.
Des découvertes fortuites au XIXe siècle avaient déjà signalé une implantation antique : en 1827, le creusement d’un lavoir mit au jour des murs et une mosaïque réutilisés sur place, et en 1873 l’abbé Delpeyrat repéra une tombe antique contenant deux urnes avec des restes d’incinération d’un enfant, ce qui éveilla l’intérêt de Pierre Tauziac. Des sondages et exhumations autour de l’église fournissaient également monnaies et céramiques, parmi lesquelles des bronzes antonins, sévères et constantiniens.
Les campagnes de fouilles menées de 1921 à 1939 sous la direction de Jules Formigé, avec Pierre Tauziac et Auguste Conil, ont dégagé de nombreuses tombes superposées, sarcophages monolithes et tombes en maçonnerie, ainsi que des objets d’époque mérovingienne comme une francisque et une croix-reliquaire en bronze. La découverte d’une monnaie de bronze de Constantin incluse dans un mur de soutien des mosaïques situe au moins une phase de décoration au IVe siècle, tandis que des fragments de sigillée estampillée Eppiae renvoient au potier Eppuis de Montans vers la fin du Ier siècle. Le site fut classé au titre des monuments historiques en 1926 et 1935.
À 300 mètres à l’est du bourg, la mise au jour en 1936 de deux cuves carrées conduisit d’abord à les identifier comme éléments de meunerie, puis, après comparaison avec d’autres découvertes, Jacques Coupry les interpréta comme des cuves viticoles de foulage, dépendances probables de la villa. Les remblais contenant une assiette à marli de type DSP et une épaule d’amphore de Gaza datée du Ve ou du VIe siècle témoignent d’une occupation tardive et d’échanges avec l’Orient.
Formigé proposa une synthèse en distinguant deux grandes phases d’occupation : un premier édifice à partir du Ier siècle interprété comme un complexe thermal et une réorganisation au IVe siècle marquée par la pose des mosaïques, l’ajout d’une salle cruciforme et d’une piscine ; il suggéra aussi la transformation de la grande salle à abside en espace funéraire ou cultuel. Raymond Lantier reprit ces observations mais proposa d’envisager les installations thermales comme dépendances privées de la villa plutôt que comme des thermes publics.
Des sondages complémentaires menés en 1947 et 1951 par Pierre Grimal ont précisé cette évolution en distinguant trois états de construction : un état ancien avec pans de murs et petite abside, un état intermédiaire créant une vaste salle à grande abside chauffée par hypocauste et desservant une pièce cruciforme via des conduits, puis un dernier état correspondant aux mosaïques visibles où l’aire chauffée par hypocauste est réduite et la salle cruciforme perd son système de chauffe. En 1966, Marc Gauthier a dégagé un pavement octogonal partiellement perturbé par deux tombes ; d’autres travaux ponctuels entre 1957 et 1995 ont apporté des précisions topographiques.
La collection de Pierre Tauziac, donnée à l’État par ses héritiers, rassemble des trouvailles issues des fouilles autour de l’église ainsi que des objets de provenances diverses ; son hétérogénéité et des lacunes d’inventaire compliquent l’attribution certaine de certaines pièces à la villa.
Les vestiges visibles occupent plusieurs terrasses sur une surface d’environ 80 sur 56 mètres, partagée par la voie menant à l’église ; l’église occupe la moitié est centrale et le bâtiment du musée borde les côtés ouest et sud-ouest. Les mosaïques conservées, réalisées en pierre locale et en tesselles de terre cuite, sont présentées in situ sous abris.
La partie centrale correspond à un espace dégagé, cour ou jardin, entouré de galeries alignées nord-sud et est-ouest, dont les galeries ouest et est se prolongent au-delà de la route moderne ; la galerie orientale conserve des fragments de pavement et le stylobate d’une colonnade, tandis que la galerie sud, en partie recouverte par l’église, menait aux thermes privés à l’ouest et présentait un sol en mosaïque à motif en écailles.
Le complexe thermal comprend une entrée ornée de boucliers et de nœuds de Salomon et, surtout, une piscine dont le fond est pavé d’une mosaïque carrée subdivisée en seize panneaux, treize d’entre eux représentant des animaux marins exécutés de façon sommaire ; les parois du bassin sont revêtues de carreaux en terre cuite, un gradin permettait de s’asseoir et une baignoire individuelle dallée de marbre se trouve à proximité, l’ensemble se vidant dans un caniveau. Cette piscine repose sur des constructions plus anciennes montrant des traces d’enduit hydraulique, peut-être une installation thermale antérieure.
Du côté ouest, les pièces de réception s’organisent autour d’une grande salle rectangulaire d’environ 350 m², précédée d’un vestibule et dotée d’une abside méridionale ; vestibule et salle étaient jadis décorés de mosaïques géométriques aujourd’hui largement disparues. Le sous-sol de la grande salle comporte des caissons de maçonnerie subdivisés par un réseau de canaux étroits dont la fonction reste discutée, hypocauste ou vide sanitaire. À l’ouest, la grande salle communique avec une pièce cruciforme à absides, au sol mosaïqué mais défoncée en plusieurs endroits par des tombes médiévales ; un caniveau extérieur à fond de tuiles ceinture ces salles et paraît avoir entraîné la suppression du chauffage par le sol, signe de problèmes d’assainissement. Au nord de la salle cruciforme a été partiellement dégagé un bâtiment circulaire au sol de mosaïque dont la fonction demeure inconnue.