Origine et histoire des Ruines romaines
Nasium, identifiée aujourd’hui à Naix-aux-Forges (Meuse), fut la première capitale de la civitas des Leuques et l’une des principales villes antiques de l’actuelle Lorraine. La ville romaine s’est développée à la fin du Ier siècle av. J.-C. en contrebas de l’oppidum de Boviolles, au confluent de l’Ornain et de la Barboure. À son apogée, l’agglomération disposa d’un important appareil monumental et atteignit une superficie de 120 ha ; les vestiges repérés en surface suggèrent cependant une emprise de 65 ha correspondant à un rectangle d’environ 900 m sur 800 m. Le géographe Ptolémée qualifiait Nasium de « ville des Leuques ».
Le site est implanté dans un fond de vallée dont l’altitude varie d’environ 245 m au centre à 285 m sur le plateau de Mazeroie ; les coteaux sont généralement abrupts sauf sur la liaison entre le centre antique et ce plateau. La terrasse de l’Ornain présente une succession de dépôts : un cailloutis calcaire jurassique de 2 à 3 mètres, des horizons organiques et tourbeux, des niveaux sableux et limoneux, des horizons argileux et humifères, puis une couche pierreuse et enfin le sol actuel. Sur les coteaux affleurent deux calcaires : l’oolithe de Bure, très dur, et la pierre de Savonnières, calcaire oolithique et coquillier qui a servi aux sculptures découvertes sur le site.
L’agglomération s’étendait sur les communes actuelles de Naix-aux-Forges et de Saint-Amand-sur-Ornain, occupant les deux rives de l’Ornain au sud du plateau de Boviolles. Depuis l’Antiquité, la physionomie du site a été profondément modifiée par divers aménagements : le creusement du canal du moulin au VIIIe siècle, la construction d’une route en 1705, la réalisation du canal de la Marne au Rhin en 1847, le tracé de la voie ferrée en 1874 et, plus récemment, la rectification d’un virage sur la route départementale en 1984. Le cours de l’Ornain a par ailleurs bougé au fil du temps, comme en témoignent des méandres fossiles qui réapparaissent lors d’inondations hivernales ; le tracé précis du cours antique reste inconnu.
Aucun toponyme local, à l’exception du « Mont de Chaté » lié à l’oppidum, ne conserve clairement une origine antique ; des noms comme « Moulin du Temple » et « Gros Therme » apparaissent au XIXe siècle. Le nom de la ville a connu de nombreuses variantes attestées dans les sources anciennes, depuis Nasion chez Ptolémée jusqu’aux formes intermédiaires NASIE, NASIUM, NAIS, NARCEYUM, NAYS ou NAS, la forme NAIX n’apparaissant qu’au XVIIIe siècle.
Les connaissances archéologiques montrent une monumentalisation de l’agglomération dès l’époque augustéenne, avec la mise en place d’un réseau de rues orthonormé ; une inscription gallo-latine retrouvée indique l’importance du gué sur l’Ornain. Deux inscriptions découvertes à Naix suggèrent que la cité des Leuques a pu bénéficier du droit latin à l’époque de Tibère, l’une étant une dédicace honorifique et l’autre une épitaphe flavienne. L’oppidum de Boviolles, antérieur à la conquête, disposait d’un atelier monétaire et aurait atteint une superficie d’environ 80 ha ; des prospections géophysiques ont mis en évidence un carroyage urbain sur cet habitat de hauteur.
Le déplacement de l’habitat de la hauteur vers la plaine est traditionnellement lié à l’époque augustéenne : le premier fanum de Mazeroie est daté entre 20 et 5 av. J.-C. et des découvertes monétaires et céramiques documentent l’extension de l’occupation. La diversité du mobilier, notamment la présence de sigillée italo-gauloise, témoigne d’un rôle de pôle commercial et d’un processus de romanisation dès le début de l’Empire. L’urbanisme et le développement architectural se renforcent pendant la période tibéro-claudienne, lorsque des constructions en pierre remplacent des bâtiments en matériaux légers ; on note aussi, au pied de l’oppidum, l’édification d’un bâtiment circulaire dont la fonction demeure incertaine.
La plupart des objets découverts lors des fouilles sont conservés au Musée barrois de Bar-le-Duc, et le site figure sur la liste des monuments historiques depuis 1862.