Origine et histoire de la Salle du Jeu de paume
La salle du Jeu de paume, située au n°1 rue du Jeu de Paume au cœur du quartier Saint‑Louis à Versailles (Yvelines), est surtout connue pour le serment prêté par les députés du Tiers état le 20 juin 1789. Construite en 1686 par Nicolas Creté, cette salle — alors appelée « tripot » — servait au jeu de paume, pratique très prisée à l'époque et ancêtre du tennis. Louis XIV et d'autres membres de la Cour y jouèrent, tandis que plusieurs salles similaires existaient à Paris dont l'accès était excluant pour les roturiers. Le 20 juin 1789, contraints de chercher un autre lieu après la fermeture, pour travaux, de l'hôtel des Menus‑Plaisirs, les députés et leurs alliés reprirent leurs débats dans cette salle. La décision de se réunir fit suite à des tensions lors des États généraux et à la convocation d'une séance royale le 23 juin. Sur proposition de Joseph‑Ignace Guillotin, les députés investirent la salle du Jeu de paume, dont les murs peints en noir et le plafond bleu parsemé de fleurs de lys étaient conçus pour mieux voir la balle. La salle, longue de 29 × 10 m et appartenant à des particuliers, fut aménagée sommairement avec quelques sièges et, pour table, une porte posée sur deux tonneaux. C'est sur cette estrade improvisée que Jean‑Sylvain Bailly, juché sur une table, prononça la formule du serment qui a fait entrer la salle dans l'histoire. La scène inspira Jacques‑Louis David, qui en fit en 1791 un grand tableau historique inachevé, Le Serment du Jeu de paume. La salle devint bien national en 1793. Au XIXe siècle, le lieu fut tour à tour objet de commémoration et d'oubli selon les régimes : plaque rétablie et atelier d'Horace Vernet sous la monarchie de Juillet, banquet civique en mars 1848 après la proclamation de la Deuxième République, puis affermage et utilisation comme tripot pour officiers sous le Second Empire. Abandonnée sous le Second Empire, elle fut transformée par les républicains en musée de la Révolution française lors des commémorations du centenaire en 1883. En 1879, l'architecte Edmond Guillaume entreprit la restauration de la salle en lieu de mémoire : il érigea un édicule dorique soutenu par deux colonnes, surmonté d'un coq gaulois en bronze doré d'Auguste Cain, et y plaça une statue de Jean‑Sylvain Bailly. Des bustes des principaux acteurs du 20 juin furent alignés le long des murs, les noms des signataires furent peints sur une frise, et Luc‑Olivier Merson réalisa une interprétation murale du Serment du jeu de paume à l'échelle du tableau de David. Le musée fut inauguré le 20 juin 1883 par le président Pierre Waldeck‑Rousseau et le ministre Jules Ferry. La salle est classée au titre des monuments historiques par arrêté du 22 mars 1848 ; il s'agit du premier lieu en France protégé par un tel arrêté, et elle resta la seule jusqu'en 1886. Elle a été entièrement rénovée en 1988 à l'occasion des commémorations du bicentenaire et a reçu le président François Mitterrand pour une commémoration. Une nouvelle restauration dirigée en 2021 par Pierre Bortulussi, architecte en chef des Monuments historiques, a porté sur la toiture, la charpente, les menuiseries, le décor peint — notamment le rouge pompéien et les inscriptions — le sol, ainsi que sur la peinture de Luc‑Olivier Merson et l'ensemble du décor sculpté. Gérée par l'Établissement public du château, du musée et du domaine national de Versailles, la salle est aujourd'hui ouverte aux visites guidées et aux visites libres le week‑end. La mémoire du lieu est également entretenue par des éléments et œuvres liés au site, parmi lesquels la représentation de David conservée au musée Carnavalet, la plaque commémorative au‑dessus de la porte et un buste de Joseph‑Ignace Guillotin.
