Origine et histoire du Théâtre
Le Théâtre des Champs-Élysées, situé 15 avenue Montaigne dans le 8e arrondissement de Paris, a été inauguré en 1913. Construit à l'initiative de Gabriel Astruc, directeur de la Société Musicale créée en 1904, il visait à doter Paris d'un "palais philharmonique" et la société immobilière acquit le terrain en 1910. Après des projets initiaux d'Henri Fivaz et Roger Bouvard, Henry Van de Velde fut sollicité par le principal financier Gabriel Thomas, puis les frères Auguste et Gustave Perret proposèrent en 1911 un contre-projet fondé sur une poutraison orthogonale en béton armé, qui donna naissance au théâtre actuel. Selon les concepteurs, il s'agit de la première salle de concert réalisée entièrement en béton, l'ossature ayant été confiée à l'entreprise Perret. Auguste Perret habilla toutefois la façade de plaques de travertin et le cadre de scène de plaques de marbre de l'Allier, où s'insèrent plusieurs bas-reliefs en marbre blanc d'Antoine Bourdelle représentant la Sculpture et l'Architecture, la Musique, la Tragédie, la Comédie et la Danse. La façade a été classée au titre des monuments historiques par arrêté du 11 décembre 1957. De style sobre et rigoureux, le bâtiment est considéré comme l'un des premiers représentants de l'Art déco en architecture ; il comprend trois salles et un restaurant en façade, aligné sur le gabarit des immeubles voisins. L'édifice abrite une grande salle à l'italienne de 1 905 places destinée à l'opéra, à la danse et à la musique, ainsi que la Comédie des Champs-Élysées (601 places) et le Studio des Champs-Élysées (230 places). Maurice Denis et Antoine Bourdelle furent chargés du programme décoratif ; d'autres peintres — Jacqueline Marval, Henri Lebasque, Édouard Vuillard, Ker-Xavier Roussel et Raphaël Drouart — participèrent aux décors. Maurice Denis réalisa la décoration de la coupole avec des panneaux intitulés L'Orchestique grecque, L'Opéra, La Symphonie et Le Drame lyrique, séparés par des tondi illustrant Le Chœur, L'Orchestre, La Sonate et L'Orgue. Plusieurs œuvres de Bourdelle (bas-reliefs, bronzes et fresques) figurent à l'intérieur et René Lalique fournit les luminaires et vitraux, au nombre de 62 pièces originales. La Caisse des dépôts et consignations est propriétaire des murs depuis 1970 et constitue le mécène principal des programmations, après être intervenue à la demande du gouvernement et avoir acquis 80 % des actions. Le théâtre est exploité par une société anonyme dotée d'un conseil d'administration ; son chiffre d'affaires annuel est de l'ordre de 9 millions d'euros pour un budget d'environ vingt millions, la Caisse des dépôts versant près de 52 % des recettes, la billetterie représentant environ 33 % et les autres recettes propres environ 15 %. Dès ses débuts, le grand théâtre a été un lieu majeur de la vie musicale et théâtrale parisienne et a accueilli de nombreuses formations symphoniques internationales ; l'Orchestre national de France y est en résidence. L'inauguration de 1913 donna lieu à un concert de musique française avec la participation de compositeurs et d'interprètes de premier plan. La salle fut le théâtre de créations marquantes et controversées, notamment Le Sacre du printemps d'Igor Stravinsky en 1913 et Déserts d'Edgard Varèse en 1954, qui provoquèrent des réactions vives du public. Dans les années 1920, le lieu devint un foyer de créations et d'expériences artistiques, lié aux Ballets suédois et à la Revue nègre, et réunit metteurs en scène, auteurs, compositeurs et artistes graphiques de premier plan. Le théâtre a fait l'objet de campagnes de rénovation importantes : une restauration générale menée en 1986-1987, la modernisation de la cage de scène engagée à partir de 1984 avec l'installation d'un système de machinerie hydraulique, puis des travaux d'acoustique et d'aménagement de la salle et de la fosse entre 2005 et 2008. Ces modernisations ont permis la mécanisation des cintres, de la scène et de la fosse d'orchestre, accélérant les changements de plateau et offrant des possibilités techniques renouvelées. En 1990 l'architecte Brigitte de Kosmi aménagea un restaurant sur la terrasse, intervention qui suscita des controverses au regard du statut de Monument historique ; en 1994 le Conseil d'État a jugé que la surélévation envisagée devait faire l'objet d'un permis de construire. Outre les grandes productions lyriques et chorégraphiques, le théâtre a accueilli des cycles pédagogiques, des concerts variés, des spectacles de théâtre d'essai et a servi de décor pour plusieurs films. La Comédie et le Studio, aménagés et gérés successivement par différentes directions depuis leur ouverture en 1913, ont joué un rôle important pour le théâtre moderne et les premières françaises. La richesse architecturale et décorative, l'innovation technique et la diversité des activités font du Théâtre des Champs-Élysées un monument central du patrimoine culturel parisien.