Origine et histoire de la Tour de Ganne
La tour de Ganne, ou tour Ganne, est une tour fortifiée située à Grez‑sur‑Loing (Seine‑et‑Marne) sur la rive gauche du Loing; elle constitue les vestiges du donjon de l'ancien château de Grez‑sur‑Loing. Le donjon remonte au début du XIIe siècle. La tour est classée au titre des monuments historiques depuis le 6 juillet 1907. Le surnom « Ganne » — également orthographié Gannes, Gal ou Galles — est attesté dès la Révolution et proviendrait du latin gannum, « ridicule », ou de ganea, « bouge ». Le fief passa par mariage au XIVe siècle à la famille d'Aussy, qui rendit hommage aux rois de France pour le château de Grez‑en‑Gâtinais. Le château, édifié au Moyen Âge pour contrôler le passage sur le Loing et remplir une fonction défensive, contribua à la fortification des confins de l'Île‑de‑France face à la Bourgogne et à la Champagne. Il fut mis en défense et restauré à la même époque que d'autres châteaux du Gâtinais; Yèvre‑le‑Châtel et Moret devinrent alors châtellenies royales. À l'époque médiévale, l'ensemble fortifié protégeait le village en complément des quatre portes et du mur d'enceinte. La cour de France, nomade, séjourna plusieurs fois au château; Blanche de Castille y résida à de nombreuses reprises, et l'on relève aussi des passages de Philippe IV le Bel et de Jean II le Bon. Le château devint une résidence royale aux XIIIe et XIVe siècles, appréciée des reines, comme l'attestent des chartes et actes signés en ce lieu. La guerre de Cent Ans détruisit la majeure partie de l'édifice en 1359 et 1370; il ne subsista alors que le donjon. On suppose que Louise de Savoie décéda dans ce donjon le 22 septembre 1531 de la peste, alors qu'elle fuyait vers Romorantin. Le système de protection ayant vieilli, la forteresse et les murailles furent supposément démantelées à partir du XVIIe siècle sous Henri IV ou au XVIIIe siècle, laissant la cité ouverte; une gravure de Cl. Chastillon vers 1600 montre déjà une enceinte ruinée. À la Révolution, l'édifice, alors propriété du duc d'Orléans Philippe Égalité, fut vendu comme bien national. Les ruines sont aujourd'hui entretenues et conservées dans un bon état. Le donjon est décrit comme quadrangulaire et mesure 15,30 m sur 12,10 m; il présente, à la manière du donjon de Moret‑sur‑Loing, deux contreforts plats encadrant chaque angle. Après les destructions, subsistent principalement le côté nord‑ouest, une grande partie du côté sud‑ouest et une petite portion du côté sud‑est, de sorte que les angles nord, ouest et sud demeurent, ainsi que deux courts retours sur les murs manquants aux angles nord‑est et sud‑est. Les murs du gros œuvre s'élèvent sur deux étages, ont une épaisseur de 2,30 m et sont en pierre calcaire à joints assez épais, ponctués de trous de boulins utilisés pour les échafaudages. Les contreforts sont en pierre de taille assemblée à joints minces; ils sont plus massifs et d'une pierre plus dure que les murs. Chaque face comporte deux ouvertures rectangulaires visibles de l'extérieur; une ouverture au niveau du seuil, près de l'angle nord, semble correspondre à une porte. Près du contrefort de l'angle sud, des pierres d'attente évoquent soit l'emplacement d'une échauguette, soit celui de latrines accessibles depuis l'angle du donjon. Sur le retour est de l'angle sud, l'amorce d'une tourelle extérieure, peut‑être la tourelle d'accès, est encore observable; celle‑ci aurait pu abriter un oratoire orienté vers l'est et supposer l'existence d'un dôme aujourd'hui disparu. Certaines sources évoquent toutefois le donjon comme une tour circulaire dont subsistent des vestiges, description qui diffère de l'architecture quadrangulaire détaillée ci‑dessus. Un parc de 3 000 m2 entoure la tour et les ruines; ces jardins, peints par de nombreux artistes au XIXe siècle, ont été reconstitués tels qu'ils apparaissent dans des œuvres de Carl Larsson et de Jean‑Baptiste‑Camille Corot, et figurent aussi dans une peinture de Kuroda Seiki. La tour se trouve à proximité du pont qui enjambe le Loing et conserve à ses pieds une borne royale fleurdelisée numérotée « 36 ». En contrebas du parc se situent deux lavoirs restaurés du XIXe siècle, dont l'un a été représenté par Asai Chū, ainsi qu'une grange donnée à la ville par une dénommée Guillerat.