Origine et histoire de la Tour Saint-Nicolas
La tour Saint-Nicolas fait partie des fortifications maritimes du Vieux-Port de La Rochelle et forme, avec les tours de la Chaîne et de la Lanterne, la porte d’entrée monumentale du port médiéval. Sa construction, entourée de légendes comme celle de la fée Mélusine, est datée de façon incertaine selon les sources, avec des reprises des travaux au long du XIVe siècle ; l’édifice est mentionné comme achevé et en fonction pour la garde du port à la fin du XIVe siècle. Élevée sur un radier de longs pieux de chêne enfoncés dans la vase et calés par des pierres, elle a connu durant sa construction un tassement des fondations qui lui a valu une inclinaison marquée vers l’est, conservée lors des restaurations. Destinée à commander la passe, la tour a servi de point d’attache à la chaîne fermant l’entrée du port et a abrité un capitaine et sa garnison. Au cours du XVIIe siècle, elle fut adaptée à l’artillerie par l’aménagement d’un petit ouvrage à corne et l’abaissement du parapet, puis complétée par un corps de garde ; à partir de 1695 un accès direct par rampe fut créé vers le premier étage. La tour joua un rôle notable pendant la Fronde : occupée par les insurgés, elle subit des tirs et des destructions et fut l’enjeu d’une explosion au moment de la perte de la tour de la Chaîne, avant d’être reprise par les troupes royales. À d’autres périodes elle servit de dépôt d’armes, de poudrière et de prison pendant les guerres de Religion, accueillit des prisonniers protestants à l’époque de la révocation de l’édit de Nantes et des Chouans pendant la Révolution. Intégrée au domaine militaire, elle fit l’objet de projets et de travaux à la fin du XVIIe siècle puis de restaurations importantes : accès direct aménagé à la fin du XVIIe siècle, démolition partielle de l’ouvrage à corne en 1813, restauration extérieure par Juste Lisch à partir de 1884 et restauration intérieure par Albert Ballu entre 1901 et 1904 ; le ministère de la Guerre céda ensuite la tour au ministère des Beaux-Arts. Classée au titre des monuments historiques le 17 février 1879, elle a fait l’objet de consolidations des fondations dans les années 1950. La tour est visitable et accueille régulièrement des manifestations, parmi lesquelles des compétitions de plongeon organisées à plusieurs reprises au début du XXIe siècle ; une terrasse submersible, installée depuis le milieu du XIXe siècle, sert à des essais de matériaux en milieu marin. D’un plan circulaire, la tour mesure environ 37 mètres de hauteur pour un diamètre variant de 18 à 23 mètres ; elle est néanmoins perçue comme pentagonale du fait de la présence de quatre tourelles semi‑cylindriques et d’une tourelle rectangulaire plus élevée. Ses murs en pierre calcaire, épais de 3 à 6 mètres, forment un appareil robuste percé d’archères et couronné d’un parapet pourvu de créneaux, merlons, mâchicoulis et d’une bretèche ; un profond fossé l’isole encore de la ville. L’intérieur présente un vide central d’environ 9,5 mètres de diamètre autour duquel s’organisent escaliers, couloirs et salles : trois grandes salles octogonales superposées de style gothique, dont deux voûtées sur croisées d’ogives, ainsi que de nombreuses petites pièces aménagées dans l’épaisseur des murs. Les oculi centraux, qui servaient de monte-charge, de porte‑voix ou d’assommoir, ne sont plus parfaitement alignés du fait du redressement partiel effectué lors de la construction. Les circulations comprennent plusieurs escaliers, dont deux principaux logés dans les murs nord et sud pour assurer des voies de repli indépendantes, un escalier à vis et des escaliers à double révolution. L’accès primitif s’ouvrait au rez‑de‑chaussée puis fut déplacé à l’étage avec pont‑levis au XVIe siècle ; la rampe d’accès actuelle, adossée à la courtine, date de 1695. Parmi les salles remarquables figurent la salle de l’armateur, qui recevait la chaîne du port, la salle du capitaine avec son oculus central, la chapelle gothique munie d’un autel et d’un retable et la salle dite du troubadour ornée d’une sculpture de musicien. Le chemin de ronde au troisième niveau, ceinturé de créneaux et de mâchicoulis, permettait la défense rapprochée ; son couronnement primitif en poivrière, détruit pendant les combats, ne fut pas restitué avant les restaurations du XIXe siècle. Des éléments architecturaux singuliers, tels que la naissance d’un grand arceau sur le flanc ouest et de nombreuses gargouilles, témoignent des aménagements médiévaux et des hypothèses d’articulations anciennes avec la tour de la Chaîne, bien que leur réalisation complète ne soit pas démontrée. La tour Saint-Nicolas reste un élément central du patrimoine rochelais, accessible au public et intégré dans la gestion des trois tours par les services compétents.