Origine et histoire de la Tour Vauban
La tour Vauban, dite aussi tour de Camaret ou tour Dorée, est une tour défensive polygonale édifiée sur le Sillon à Camaret-sur-Mer d’après un plan directeur de Vauban et figurant sur les armoiries de la commune. Conçue comme un prototype de fort à la mer à batterie basse et tour de gorge, elle se distingue par son enduit extérieur à base de brique pilée qui lui donne une teinte orangée. Projetée dès 1683 et tracée par Vauban en 1689, sa construction, supervisée par l’ingénieur Jean-Pierre Traverse, s’est déroulée de 1693 à 1696. Sa mission principale était de protéger la batterie qui défendait le mouillage et participait, par le croisement de ses feux avec ceux de la pointe du Grand Gouin, des lignes de Quélern et d’autres batteries côtières, à la sécurité de la rade. La garnison comprenait alors un lieutenant, un sergent, cinq hommes et des miliciens issus des habitants de Camaret. Lors de la bataille de Camaret le 18 juin 1694, l’attaque anglo-hollandaise sur la plage de Trez-Rouz fut repoussée ; la tour, confiée à Alexandre de Boulainvilliers, était encore en travaux et la batterie n’était armée que de neuf canons de 24 livres et de trois mortiers de 12 pouces. Cette victoire valut à Camaret l’exemption de fouages jusqu’à la Révolution et le surnom de « gardienne du littoral armoricain ». Jusqu’au Second Empire, la tour conserva une fonction militaire ; en 1861 une batterie extérieure plus basse, sous forme d’épaulement, fut aménagée vers la chapelle Notre‑Dame de Rocamadour, l’ancienne batterie et la tour restant utilisées comme réduit. Désaffectée à la fin du XIXe siècle, elle fut acquise par la municipalité en 1904 et classée au titre des monuments historiques le 18 septembre 1907. Pendant la Première Guerre mondiale la tour servit de réservoir d’eau potable et une base d’hydravions occupa l’emplacement de la batterie extérieure démantelée. Le 3 septembre 1944, l’aviation américaine mitrailla la tour avec des balles incendiaires, détruisant la toiture; une première restauration eut lieu en 1956 pour réparer ces dégâts. Gérée jusqu’en mai 1993 par le musée national de la Marine, la tour abritait un petit musée ; la gestion fut ensuite confiée à des associations qui organisent des expositions estivales consacrées à Vauban et à la défense du Goulet. Membre du réseau des sites majeurs de Vauban, Camaret et la tour font partie depuis le 7 juillet 2008 du bien serial inscrit au patrimoine mondial de l’UNESCO. Des campagnes de restauration ont été menées pour lutter contre la dégradation et le développement d’algues et lichens : réfection de l’enduit en 2007, restauration de l’escarpe et de la contrescarpe en 2009, travaux sur la batterie, le four à boulets et le corps de garde à partir de 2011, remise en état du pont-levis en 2014 et rénovation de l’intérieur en 2016 ; la municipalité a par ailleurs créé un centre d’interprétation consacré à l’œuvre de Vauban en Bretagne. Construite avec des pierres extraites du port et revêtue d’un crépi rouge composé de sable, de chaux et de brique pilée, la tour hexagonale — plan composé d’un carré aux deux pans coupés flanquant la gorge — s’élève à 18 mètres et comporte quatre niveaux, dont les deux premiers sont voûtés; les parements et les voûtes sont en granit. L’entrée s’ouvre au second niveau depuis le terre-plein de la batterie et un escalier en vis logé dans le saillant arrière dessert les parties hautes; l’étage supérieur est planchéié, ceinturé d’un parapet à archères et couvert d’une toiture ardoisée à six pans. La tour est adossée à des murailles, un corps de garde et une batterie basse semi-circulaire munie d’un parapet pour onze embrasures d’artillerie; cette batterie abritait originellement onze pièces et un four à boulets, ce dernier étant l’un des rares exemplaires encore en élévation et ayant remplacé pendant la période révolutionnaire l’un des corps de garde. Le front de gorge présente deux branches creuses avec galerie de fusillade et une embrasure en crête tirant à revers; l’ensemble est entouré d’un fossé à marée, construit en pierres non cimentées laissant passer l’eau, et s’ouvre par un pont-levis. La tour a servi successivement de tour de guet, de magasin à poudre et de logement pour la garnison.