Origine et histoire
La Via Domitia est une ancienne voie romaine construite à partir de 118 av. J.-C. pour relier l'Italie à la péninsule Ibérique en traversant la Gaule narbonnaise. Elle porte le nom de son initiateur, le proconsul Cneus Domitius Ahenobarbus. Dans l'Antiquité, la dénomination « via Domitia » est attestée principalement pour le tronçon entre le Rhône et les Pyrénées, tandis que la traversée des Alpes cottiennes, de Gap à Suse, était appelée via Cottia per Alpem. Une variante littorale existe, mais le passage par le col de Montgenèvre resta longtemps privilégié jusqu'à la construction ultérieure d'autres axes comme la via Julia Augusta. Selon des traditions, la voie se superposerait à une ancienne route dite « voie héracléenne » attribuée à Héraclès. Conçue après la conquête de la partie sud-est de la Gaule, la Via Domitia assurait d'abord les communications militaires et l'acheminement des représentants de Rome, puis le cursus publicus et le trafic marchand. Sa construction visait également à relier et rationaliser les réseaux de voies italiennes et hispaniques. Sur son tracé fut fondée Narbo Martius (Narbonne), colonie romaine devenue la principale ville du sud de la Gaule. Le tracé est connu grâce à des documents anciens — gobelets de Vicarello, table de Peutinger, itinéraire d'Antonin — et à des indices archéologiques et toponymiques, et il est souvent repérable sur les cartes actuelles où certaines routes modernes (N85, N100, A9...) suivent son itinéraire. La voie franchissait les Alpes par le col de Montgenèvre, suivait la vallée de la Durance, remontait le Luberon, franchissait le Rhône à Beaucaire, traversait Nîmes et longeait la côte du golfe du Lion jusqu'à l'Espagne, en reliant des étapes importantes telles que Ugernum/Beaucaire, Nemausus/Nîmes, Baeterrae/Béziers, Narbo/Narbonne et Ruscino. Elle contourna le territoire de la cité grecque de Massalia. La Via Domitia était jalonnée de bornes milliaires — plus de quatre-vingt-dix ont été recensées — et pénétrait généralement dans les villes par une porte ou un arc, comme à Nîmes ou à Glanum. Sa construction cherchait la rectitude sur des terrains stables ; en milieu urbain la chaussée était pavée ou dallée, ailleurs il s'agissait le plus souvent d'un chemin de terre battue reposant sur des couches de gravier et de cailloutis. Plusieurs ouvrages remarquables subsistent le long du parcours, parmi lesquels le pont Julien à Apt, le pont romain de Lurs et le pont Ambroix sur le Vidourle, ainsi que des sections pavées mises au jour à Ambrussum et Glanum. Après la période romaine, certains tronçons demeurèrent en usage au Moyen Âge et, entre Narbonne et le Roussillon, firent partie du « Strata francesa » ou « Caminum Gallicum ». La longueur totale de l'itinéraire est de 780 kilomètres. Au sommet des Pyrénées, l'entrée en Hispanie, Summum Pyrenæum, est aujourd'hui identifiée au col de Panissars où furent repérées des ornières taillées dans le roc et les fondations du trophée élevé par Pompée. La Via Domitia figure aussi dans la littérature latine, notamment dans la plaidoirie Pro Fonteio de Cicéron, qui évoque la réfection de la voie. Certains vestiges bénéficient d'une protection au titre des monuments historiques, parmi lesquels le pont Ambroix, l'oppidum d'Ambrussum, le pont de Lurs et divers tronçons inscrits ou classés dans plusieurs communes. Des recherches continuent d'affiner le tracé, en particulier dans les Pyrénées orientales où plusieurs variantes intérieures et côtières ont été proposées et où les jalonnements antiques restent difficiles à préciser.
