Usine Tase à Vaulx-en-Velin dans le Rhône

Usine Tase

  • 69120 Vaulx-en-Velin
Usine Tase
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Crédit photo : Nicolas Nova from Geneva, Switzerland - Sous licence Creative Commons
Propriété d'une société privée

Période

1er quart XXe siècle

Patrimoine classé

Les parties suivantes (figurées sur le plan joint à l'arrêté) du bâtiment sud de l'usine : les façades ouest et sud ; le volume du bâtiment ; les grands bureaux en totalité, soit la partie est de l'aile, correspondant à la parcelle BR 317 (cad. BR 305, 308, 310, 311, 317) : inscription par arrêté du 25 mai 2011

Origine et histoire

L'usine TASE, située à Vaulx-en-Velin dans le quartier aujourd'hui appelé Carré de Soie, a été fondée en 1924 par la famille Gillet et conçue par les architectes Desseux et Alexandre comme un véritable site de production intégrant logements et équipements sociaux, éducatifs, sportifs et religieux. Le bâtiment principal, en U et haut de deux étages, abritait des ateliers couverts en sheds et reposait sur un système poteau-poutre à l'architecture aux lignes épurées ; l'angle est de la façade urbaine est le plus remarquable, tandis que les locaux administratifs, en style Art déco, se distinguent par l'ampleur des vitrages et la finesse des menuiseries. Spécialisée dans la transformation de la cellulose en viscose, la TASE a employé jusqu'à 3 000 personnes et a cessé son activité vers 1980 ; à ce jour seules les ailes sud et est subsistent.

La firme Gillet, déjà active dans la teinture des tissus, choisit Vaulx-en-Velin en 1924 pour des raisons pratiques : un terrain agricole de 75 ha acquis à 0,5 franc le mètre carré, une situation à l'écart de l'agglomération et protégée des nuisances par la hauteur de la cheminée, un approvisionnement aisé en eau grâce à la nappe phréatique sur la haute terrasse alluviale à 185 mètres (15 m au-dessus de la plaine inondable), l'électricité fournie par la centrale hydroélectrique de Cusset et une desserte par la voie ferrée dite de l'Est (VFD). Confrontée au refus d'une main-d'œuvre locale encore marquée par la guerre et peu disposée aux rythmes exigeants et aux exhalaisons des ateliers, l'usine a recruté avec succès dans plusieurs pays d'Europe centrale et méditerranéenne : en 1929 l'effectif atteignait 3 000 salariés et, en 1931, 73 % d'entre eux étaient étrangers.

L'emprise industrielle occupait environ 20 ha, dont 10 ha couverts, avec trois niveaux totalisant 100 000 m² de planchers ; le reste du domaine servait au logement du personnel. Au sud se trouvait le quartier de la Poudrette, formé de 97 villas sur cinq types contenant généralement trois logements et des jardins clos de 120 m², ainsi que des services comme une chapelle, un stade et un dispensaire ; à l'est s'élevaient vingt immeubles de quatre étages sur 8 ha offrant 491 logements, simples et disposés en blocs de béton alignés, avec des rez-de-chaussée consacrés au commerce. Trois cents jeunes filles, majoritairement hongroises à l'origine, étaient logées dans le foyer-hôtel Jeanne d'Arc confié aux sœurs de Saint-Sauveur de Niederbronn ; elles disposaient de chambres individuelles, suivaient des cours pratiques et voyaient le coût de la pension prélevé sur leurs salaires à hauteur de 40 à 50 %. L'essor démographique de Vaulx-en-Velin durant l'entre-deux-guerres reflète l'impact de l'usine : la population passa de 1 588 habitants en 1921 (dont 40 étrangers) à 3 745 en 1926 (1 052 étrangers), puis à 8 124 en 1931, dont 3 905 étrangers, avant que la crise des années 1930 et la Seconde Guerre mondiale n'entraînent une forte baisse des effectifs et de la population municipale.

À sa création l'établissement porta le nom de Société de Soie Artificielle du Sud-Est (SASE), puis devint Textile Artificiel du Sud-Est en 1935. Intégrée, depuis le début des années 1970, à la branche Rhône-Poulenc Textiles (RPT) de Rhône-Poulenc, l'usine a adapté ses productions : elle a fabriqué de la rayonne en fil continu de 1925 à 1975, produit la fibranne sous forme de filé de fibres de 1935 à 1948, puis approvisionné les fabricants de pneumatiques entre 1950 et 1975. À partir de 1958, les polyamides ont progressivement remplacé la rayonne pour l'industrie du pneumatique, production qui a été poursuivie jusqu'à la fermeture, complétée par des polyesters. Face à une concurrence internationale très puissante et à des écarts de productivité — cités dans les documents internes (1,7 heure pour 100 kg chez les grands producteurs contre 5,2 à Vaulx-en-Velin pour les polyamides, et 1,7 contre 6 pour les polyesters) — RPT a concentré les fabrications dans ses sites les plus modernes : en 1977 les polyamides furent transférés à Gauchy et les polyesters à Valence et Arras, et le site de Vaulx-en-Velin ferma finalement en 1980.

Après la fermeture, les logements des petites cités furent vendus en priorité aux occupants, anciens salariés ou à leurs descendants, et 80 % des transactions furent conclues rapidement autour d'un prix moyen de 150 000 F ; la voirie fut prise en charge par la Courly et la municipalité améliora l'éclairage public. Les grandes cités conservées passèrent sous la gestion d'un organisme HLM, Solar, qui les a rénovées. L'ancien hôtel Jeanne d'Arc, situé sur le territoire de Villeurbanne, a connu diverses affectations (école pour professeurs de l'enseignement technique, IUFM, lycée Alfred de Musset) et abrite aujourd'hui une maison des services publics et un tiers-lieu associatif porté par le CCO.

La conservation de la grande façade sud de l'usine a donné lieu à un vif débat : après des expertises contradictoires, une contre-expertise sérieuse a conduit à son inscription à l'inventaire des monuments historiques, puis à l'acquisition du site par Bouwfonds-Marignan, filiale du groupe néerlandais Rabobank, pour une réhabilitation chiffrée à 24,5 millions d'euros. Technip a pris un bail pour installer des bureaux modernes en regroupant deux implantations lyonnaises pour environ 600 emplois, tandis que d'autres sheds arrière devaient être rasés en 2015 pour permettre la construction de logements. Le paysage urbain autour de l'usine a profondément changé au début du XXIe siècle avec le prolongement de la ligne de métro A et la création d'un centre d'affaires nommé Carré de Soie ; le château d'eau, conservé, porte une frise de noms en hommage au passé textile.

L'usine TASE est inscrite au titre des monuments historiques depuis le 25 mai 2011 et avait précédemment obtenu le label "Patrimoine du XXe siècle". Le site a également accueilli des événements culturels, comme l'une des quatre salles d'exposition de la Biennale d'art contemporain de Lyon en 2011, et figure dans la littérature contemporaine, notamment dans le roman historique Et ils dansaient le dimanche de Paola Pigani.

Liens externes