Origine et histoire du Vieux Pont de Terrasson
Le Pont Vieux, dit Ancien Pont, se situe à Terrasson-Lavilledieu (Dordogne) et a été classé monument historique par arrêté du 25 juin 1904. Il s'agit d'un pont en maçonnerie à cinq arches — six à l'origine — dont trois sont segmentaires et deux ogivales, qui permet le franchissement de la Vézère sur la RD 6089. Le pont est cité en 1182 par Geoffroy, prieur de Vigeois, lorsque des troupes au service du vicomte de Limoges le franchissent pour envahir le Limousin. D'après Ch. Durand, les écrits du prieur laissent supposer que l'abbaye de Terrasson a fait construire le pont avant 1178, période où l'abbaye apparaissait liée à celle du Dalon et soumise à Saint-Martial de Limoges. Cette filiation explique probablement la typologie du pont, proche de celle des anciens ponts de Limoges, et laisse penser que sa structure primordiale ressemblait à celle du pont Saint-Martial alors détruit. Les cartulaires montrent aussi que Terrasson, anciennement Genouillac, avait des seigneurs locaux, les Comtors de Terrasson, qui édifièrent un premier château féodal dont les fondations ont peut‑être servi de base au château du Fraysse, et que le fief passa par alliance aux vicomtes de Turenne vers 1065. À partir du milieu du XIIe siècle, l'abbaye, sous la suzeraineté des Turenne, représentait l'autorité locale et il est probable que le pont ait été édifié pour remplacer un gué. Les cartes et les aménagements anciens indiquent la présence d'une île et d'une dérivation de la Vézère facilitant la construction sur le rocher, ainsi qu'un moulin en amont, équipement habituel d'une abbaye importante. En 1333, un legs de cinq sols par Raymond du Fraysse, sans doute destiné à des réparations, est signalé ; certains auteurs assimilent cette mention à la construction de l'ouvrage actuel. La guerre de Cent Ans entraîna la destruction de deux arches en rive droite, qui furent reconstruites en arcs de cercle au XVe siècle. Aux XVIe et XVIIe siècles, le pont joue un rôle stratégique : il est franchi par différentes armées lors des conflits de 1569, 1585 et des opérations de 1652–1653, au cours desquelles la grande arche (la quatrième depuis la rive gauche) fut rompue par des troupes royales ; l'abbaye et le pont furent restaurés après 1657 par Jean de Reilhac de Montmège. Des projets et travaux de réparation se succèdent au XVIIIe siècle : un projet d'Ubeleski est étudié en 1722, des adjudications interviennent en 1725 et 1748, et la crue de 1783 impose de nouveaux travaux qui ont probablement modelé la forme arrondie des avant-becs. Au XIXe siècle, les aménagements de la route de Lyon à Bordeaux (RN89) entraînent des interventions sur le pont en 1810 ; un projet d'élargissement rassemblé en 1820 n'est pas réalisé, la reconstruction d'un mur de quai réduit le débouché d'une arche, et la construction d'un nouveau pont, adjugée en 1830 et mise en service en 1833, détourne la route nationale, rendant l'ancien pont de nouveau sous la responsabilité de la commune.
