Origine et histoire de la Villa Cavrois
La villa Cavrois, située à Croix (Nord), est une commande de Paul Cavrois à l'architecte Robert Mallet-Stevens et a été construite entre 1929 et 1932. Conçue comme une œuvre totale, Mallet-Stevens a imaginé l'architecture, les décors intérieurs et le mobilier. Bâtie en béton armé avec remplissage et parement de briques jaunes, elle illustre l'architecture moderniste par ses grandes surfaces vitrées, toits-terrasses et lignes épurées. La villa mesure 60 mètres de long et comprend 2 800 m2 dont 1 840 m2 habitables, 830 m2 de terrasses et un parc aujourd'hui ouvert au public. Le programme privilégiait air, lumière, travail, sports, hygiène, confort et économie. La maison disposait d'équipements rares pour l'époque : distribution d'eau chaude, froide et adoucie, haut-parleurs TSF et téléphones encastrés, horloges électriques intégrées, appareils électriques pour le linge, chaufferie et cave à vin. L'éclairage a été conçu avec l'ingénieur André Salomon pour produire une lumière indirecte uniforme proche de la lumière naturelle. Jean Prouvé a réalisé des cache-radiateurs en aluminium, aujourd'hui disparus. Les matériaux et le mobilier hiérarchisent les espaces : marbres (vert de Suède, jaune de Sienne, Carrare), essences de bois variées et parquets spécifiques. Le plan associe un corps central (vestibule et grand hall en double hauteur) et deux ailes symétriques, selon une tradition apparentée au château à la française tout en appliquant les principes modernistes.
L'aménagement intérieur comprend au rez-de-chaussée le vestibule, le grand hall-salon avec une baie sur le parc, la salle à manger parentale en marbre vert, la salle à manger des enfants, l'office et une cuisine au caractère clinique par ses surfaces métalliques et faïence blanche. Dans l'aile est se trouvent le bureau de Paul Cavrois, le fumoir et des chambres de jeunes hommes, tandis que l'aile ouest accueille les pièces de service et, à l'étage, les chambres des enfants et de la gouvernante. La suite parentale à l'étage présente mobilier plaqué palmier, boudoir et une vaste salle de bains traversante avec dressing, baignoire et douche et un sol en marbre de Carrare. Le deuxième étage est consacré à la salle de jeux et aux salles d'étude, avec accès à une terrasse-pergola qui pouvait servir de salle à manger d'été. Le rez-de-jardin regroupe la buanderie équipée d'appareils électriques, la chaufferie, les cuves à fioul et une matériauthèque exposant échantillons et éléments techniques.
Pendant la Seconde Guerre mondiale la villa fut occupée et transformée en caserne, puis, après 1947, l'architecte Pierre Barbe adapta l'intérieur à la demande de la famille en créant deux appartements dans l'aile ouest. La famille occupa la demeure jusqu'en 1985; la villa a ensuite été vendue, abandonnée, pillée et dégradée. Un classement au titre des monuments historiques a été prononcé par décret le 12 décembre 1990, et la même année une association de sauvegarde se constitua pour défendre la maison. L'État a acquis la villa en 2001 et a financé une première campagne de restauration du gros œuvre à partir de 2004; le Centre des monuments nationaux en a reçu la dotation en 2008 et a conduit la restauration des décors et du mobilier, ainsi que la remise en état d'une partie du parc. Le patrimoine mobilier a pu être partiellement reconstitué par des achats et des dons afin de restituer l'art de vivre de 1932. La villa a été ouverte au public le 13 juin 2015.
Aujourd'hui le site présente la maison, son parc restitué avec miroir d'eau et allées, la piscine, ainsi que des espaces d'exposition et d'accueil. Le parcours de visite met en valeur façades, hall-salon, salles à manger, chambres, salle de bains parentale, boudoir, salle de jeux, buanderie, matériauthèque et la piscine avec son bassin. On peut accéder à la villa par la station Villa Cavrois de la ligne R du tramway; un parking gratuit se situe à proximité à 10–15 minutes à pied. La villa a servi de décor pour plusieurs films et séries (Les Petits Meurtres d'Agatha Christie, Baron noir saison 3, L'Amant double, Un beau voyou, Emmanuelle de Clara Luciani) et accueille régulièrement des expositions, parmi lesquelles Design ! Muller Van Severen (2020), une présentation de Marie Maillard (2021), Humeurs, carte blanche à Fabrice Hyber (12 juin–15 septembre 2024), That mystery of mysteries d'Éléonore Geissler (24 septembre 2024–5 janvier 2025) et des projets programmés en 2025. Des références bibliographiques et des ressources en ligne complètent la documentation sur la villa et son architecte.