Origine et histoire de la Villa de Noailles
Villa Marie-Laure-de-Noailles, dite aussi château Saint‑Bernard, est une villa d'hivernage édifiée sur le Clos Saint‑Bernard à Hyères pour le vicomte Charles et Marie‑Laure de Noailles. Commandée en 1922, elle a été conçue par l'architecte Robert Mallet‑Stevens, avec la collaboration de l'architecte local Léon David pour les extensions et les annexes. Le noyau initial est construit de 1923 à 1925 et la maison est habitée dès novembre 1925, puis agrandie et modifiée à plusieurs reprises jusqu'en 1933, avec des retouches d'étanchéité et de confort jusqu'en 1939. L'édifice repose sur une maçonnerie traditionnelle enduite, complétée par quelques éléments en béton armé, et développe un ensemble de volumes cubiques percés de larges baies privilégiant la lumière et la fonctionnalité. Conçu au départ comme une « petite maison dans le Midi », le programme a évolué vers un complexe privé culturel et sportif comprenant salons, piscine intérieure, gymnase, squash et un grand nombre de chambres ; la surface totale et le nombre de pièces ont été progressivement accrus au cours des extensions. Fidèles aux principes du mouvement moderne, les toits, terrasses et larges ouvertures structurent la composition tandis que le mobilier intégré et transformable y tient une place importante. Charles de Noailles fit appel à des artistes et décorateurs de l'entourage de Mallet‑Stevens et de l'Union des Artistes Modernes : Pierre Chareau, Eileen Gray, Francis Jourdain, Louis Barillet, Georges Djo‑Bourgeois, Gabriel Guévrékian, Théo van Doesburg, Jacques Lipchitz et d'autres ont participé au décor, au mobilier et aux aménagements, y compris des pièces emblématiques du mobilier moderne. Gabriel Guévrékian créa le jardin cubiste dit jardin triangulaire et la piscine, et la sculpture La Joie de Vivre de Lipchitz ornait la pointe du jardin ; cette œuvre est aujourd'hui conservée au Musée d'Israël à Jérusalem. La villa devint rapidement un lieu de rencontre de l'avant‑garde : écrivains, artistes et cinéastes y séjournèrent et y travaillèrent, Man Ray y tourna Les Mystères du château du Dé et Buñuel y écrivit le scénario de L'Âge d'Or, financé par les Noailles. Le couple donna également de grands bals costumés qui rassemblaient la communauté artistique. Après la mort de Marie‑Laure de Noailles, la ville d'Hyères acquit la propriété en 1973. Inscrite aux monuments historiques en 1975 et 1987, la villa, longtemps délaissée, a fait l'objet de campagnes de restauration engagées à partir de 1991, puis poursuivies depuis 1997 sous la maîtrise d'œuvre de cabinets d'architectes, pour devenir un centre d'art et d'architecture ouvert au public et accueillant expositions et résidences d'artistes. Dirigée depuis 2003 par Jean‑Pierre Blanc, la Villa Noailles a développé une programmation centrée sur l'architecture, la mode, la photographie et le design et a reçu le label « Centre d'art contemporain d'intérêt national ». Des difficultés financières et des problèmes de gestion ont toutefois donné lieu à une enquête et à un audit à la fin de 2024 ; en mai‑juin 2025, des mesures conservatoires et la suspension de soutiens financiers ont été annoncées dans l'attente d'une nouvelle gouvernance.