Origine et histoire de l'Hôtel Majestic
Le Grand Hôtel et Majestic Palace, anciennement Hôtel de Royat puis Grand Hôtel Servant, est un vaste ensemble néo‑Louis XIII situé au 1, boulevard Bazin à Chamalières, en lisière de la station thermale de Royat‑les‑Bains. Construit initialement sous le Second Empire et ouvert en 1865, il a été repris par la famille Servant à partir de 1869, qui l’a agrandi par tranches successives jusqu’à sa transformation en « palace » au début du XXe siècle. L’ensemble comprenait le bâtiment principal et plusieurs annexes recevant le public — notamment la Villa des Thermes dite « L'Annexe », la Villa Majestic, la Villa Beauséjour et le Pavillon Majestic, remarquable par sa façade Art nouveau — ainsi que des propriétés privées de la famille Servant disséminées à Royat et Clermont‑Ferrand. À son apogée, le complexe offrait près de 300 chambres, une cinquantaine d’appartements, de nombreux salons et un parc privé d’environ quatre hectares.
Le Grand Hôtel a accueilli de nombreuses personnalités : écrivains et hommes politiques, artistes et membres de familles princières et industrielles, parmi lesquels figurent les frères Goncourt, Alexandre Dumas fils, Émile Zola, Frédéric Bartholdi, Félix Faure, les Rothschild, le prince de Galles, Armand Peugeot ou François Mauriac. Pendant la Première Guerre mondiale, l’établissement fut réquisitionné et occupé successivement comme hôpital militaire français puis hôpital américain lors de la pandémie de grippe espagnole. Durant la Seconde Guerre mondiale, il connut de nouvelles réquisitions : il abrita des services de l’État et le Conseil d’État, fut investi par les troupes d’occupation à partir de la fin 1942, puis servit, à la Libération, de centre d’accueil pour les déportés rapatriés.
Après la guerre, l’hôtel, fortement dégradé et contraint par l’absence d’investissements, cessa définitivement d’accueillir la clientèle. Les propriétaires décidèrent d’abandonner l’exploitation touristique et de transformer le bâtiment en copropriété ; de lourds travaux débutés en 1949 conduisirent à cette conversion au début de 1950. Certains volumes originaux, comme le restaurant Louis‑XVI et l’ancienne salle à manger, furent conservés un temps puis aménagés en appartements au milieu des années 1950.
Architecturalement, le Grand Hôtel présente les traits du style néo‑Louis XIII : brique rouge, pierres de chaîne et toitures d’ardoise avec mansardes. Le plan en L, la composition symétrique de la façade nord — pavillon central coiffé d’un dôme et d’une horloge, ailes et pavillons latéraux — et les fenêtres hautes du rez‑de‑chaussée renvoient aux modèles de l’hôtel particulier et de l’architecture thermale du XIXe siècle. Bâti à flanc de colline, l’édifice compte des niveaux variables selon les façades et a été complété par des lucarnes transformées en portes‑fenêtres au début du XXe siècle ainsi que par une vaste galerie vitrée lors de sa mutation en palace.
La construction et les agrandissements mobilisèrent plusieurs architectes, parmi lesquels Nicolas Mourton pour la première tranche et les architectes parisiens William Klein, Albert Duclos et Ernest Mizard pour les campagnes ultérieures. Le décor, le mobilier et les équipements faisaient appel à des ateliers et fournisseurs réputés pour l’époque : tapissiers et ébénistes, bronziers, miroitiers, serruriers, fabricants de sanitaires et de vaisselle de table, ainsi que sculpteurs et décorateurs locaux.
Le palace s’est illustré par une modernisation constante de ses services : salle de billard, salons, restaurant, raccordement à l’eau potable, éclairage électrique et ascenseur hydraulique, téléphone et installations sanitaires perfectionnées, garages et équipements pour automobiles, parc aménagé et installations sportives comme des courts de lawn‑tennis, ainsi que des dispositifs techniques et de cuisine modernes. Ces innovations reflétaient la volonté de rivaliser avec d’autres établissements thermaux et balnéaires de la région.
Sur le plan foncier, la propriété resta entre les mains de la famille Servant de la fin du XIXe siècle jusqu’à la seconde moitié du XXe siècle, la direction ayant aussi connu plusieurs successions, depuis Mme Clara Neuville au moment de l’ouverture jusqu’à Juste Maurice Marc Rochat entre les deux guerres et après. Le corps principal du Grand Hôtel et Majestic Palace a été inscrit à l’inventaire supplémentaire des monuments historiques par arrêté préfectoral du 7 mai 2021, qui protège notamment ses façades, toitures, parties communes intérieures et son parc ; le Pavillon Majestic bénéficie d’une protection antérieure, initialement inscrite en 1975 et réaffirmée par un arrêté du 6 octobre 2022.