Origine et histoire
La grotte de Niaux, grotte ornée du Paléolithique supérieur, se situe sur la commune de Niaux en Ariège, à mi-pente dans la vallée de Vicdessos, et fait partie du réseau de cavités ornées pyrénéo-cantabriques. Le système comprenant les grottes de Niaux et de Lombrives présente une dénivellation de 417 m ; la seule grotte de Niaux a un développement de 4 000 m et l’ensemble Niaux-Lombrives atteint 11 100 m. La cavité se développe dans des calcaires d’âges jurassique et crétacé. La grotte a été régulièrement visitée depuis le XVIIe siècle, comme l’attestent de nombreuses inscriptions, et son occupation préhistorique est reconnue et étudiée depuis 1906. Classée au titre des monuments historiques le 13 juillet 1911, elle appartient à un ensemble souterrain d’environ 14 km qui inclut la grotte de Lombrives et la grotte de Sabart, cette dernière n’étant pas reliée aux autres cavités.
Niaux renferme un art pariétal magdalénien très riche, comprenant la plupart des espèces de la faune préhistorique du massif pyrénéen. Les animaux sont le plus souvent peints en noir, avec du charbon de bois ou du dioxyde de manganèse, et parfois en rouge obtenu à partir d’hématite broyée. La salle principale, dite le « Salon noir », rassemble les représentations les plus spectaculaires ; les peintures du Salon noir contenant du charbon de bois ont été datées par le radiocarbone à environ 13 000 ans. On trouve aussi des signes, points et traits en rouge et noir, isolés ou associés aux figures animales. Le bestiaire comprend principalement 54 bisons, 29 chevaux, 15 bouquetins, ainsi que des cerfs et des poissons ; la morphologie des chevaux évoque le pottok, cheval endémique des Pyrénées encore présent au Pays basque, et la présence d’un tracé suggérant une belette est remarquable, cet animal étant rarement représenté dans l’art magdalénien.
La grotte ne semble pas avoir servi d’habitat : aucun vestige domestique n’a été retrouvé ni à l’entrée ni au fond. Niaux s’inscrit dans un ensemble de grottes ornées de la vallée et des vallées voisines qui n’avaient pas vocation d’habitat, même si des cavités habitées existent à proximité, comme la grotte de la Vache ou la grotte des Églises. Les Magdaléniens utilisaient probablement deux entrées pour accéder respectivement au Salon noir et au réseau Clastres ; le passage souterrain entre ces deux parties est aujourd’hui noyé par plusieurs siphons. Les peintures se trouvent profondément à l’intérieur de la cavité : il n’y a pas d’art pariétal à l’entrée et le Salon noir se situe à plus de 700 m de l’entrée préhistorique présumée, ce qui écarte pour ce lieu une fonction d’habitat ou de stockage. Des empreintes de pas humains ont été identifiées sur une dizaine de zones ; leur taille montre que des enfants pénétraient aussi dans la grotte.
L’art de Niaux n’a pas pour objet une représentation paysagère : aucun élément végétal ou solaire n’est figuré et, hormis un petit bouquetin appuyé sur une fissure pouvant figurer une ligne de sol, les animaux semblent « flotter » sur les parois en épousant leurs formes. Seuls des animaux de grande taille, surtout des herbivores, sont représentés ; l’ours et le loup, bien que présents dans la région, n’y figurent pas. Un siècle de fouilles a mis en évidence des campements saisonniers de groupes magdaléniens venus chasser, notamment le bouquetin et le renne, et dont l’économie reposait principalement sur le travail des peaux, des bois et des os. Une hypothèse ancienne associe l’art pariétal à la chasse et à des cérémonies visant la réussite des prélèvements, interprétation renforcée par la présence apparente de traits de projectiles sur certains animaux du Salon noir. Une autre hypothèse, développée notamment par Jean Clottes, rapproche cet art du chamanisme et voit dans ces grottes des lieux de rencontre entre l’homme et les esprits de la nature ; les figures stylisées et conventionnelles suivent les formes de la paroi et la fréquentation de sites voisins présentant des prédateurs renforce cette lecture. Plus récemment, Jean‑Loïc Le Quellec a proposé l’hypothèse du mythe de l’apparition des êtres vivants, dite « émergence primordiale ».
La grotte de Niaux est ouverte au public : les visites sont systématiquement guidées et strictement réglementées pour préserver les œuvres, avec des groupes limités à 25 personnes. Il n’existe pas d’éclairage permanent et chaque groupe s’éclaire à l’aide de lampes portatives sur un parcours de 800 mètres jusqu’au Salon noir. En 2018, une nouvelle salle a été ouverte à la visite, mais elle est réservée à 12 personnes à la fois et seulement une fois par mois. Le réseau Clastres, autre secteur orné, n’est pas accessible au public. La visite emprunte des passages étroits et suit, sur la majeure partie du parcours, le même sol que celui parcouru par les Magdaléniens.