Origine et histoire de l'ancien couvent
L'ancien couvent de la Visitation de Caen, aussi appelé monastère de la Visitation de Sainte-Marie de Caen, se situe dans le Calvados et a été fondé par l'Ordre de la Visitation au début du XVIIe siècle dans le quartier du Bourg-l'Abbé. Transformé en caserne pendant la Révolution, il fait désormais partie de l'emprise du Quartier Lorge ; il ne doit pas être confondu avec le nouveau monastère des Visitandines où les sœurs se sont installées au début du XIXe siècle après la refondation de l'ordre. Le cloître a été inscrit au titre des monuments historiques le 13 juin 1927 et les bâtiments conventuels ont reçu une inscription complémentaire le 18 novembre 1988. L'implantation des Visitandines à Caen s'inscrit dans les fondations nombreuses liées à la Contre-Réforme ; l'ordre, fondé à Annecy par François de Sales et Jeanne de Chantal, s'est développé en France au cours du XVIIe siècle. Après un séjour à Dol-de-Bretagne en 1627, six religieuses vinrent s'établir à Caen en 1631 puis, en 1632, s'installèrent définitivement en périphérie de la ville en achetant un ancien manoir entouré de murs, comprenant la maison dite du Grenadier, une cour, un colombier et un jardin. Sous la direction de Marie-Élisabeth de Maupeou et par les soins de l'architecte Guillaume Brodon, l'église et les bâtiments conventuels furent édifiés entre 1632 et 1661 ; les constructions conventuelles entourèrent une cour carrée aménagée en cloître dans les années 1650. L'église, consacrée par l'évêque de Bayeux Mgr de Nesmond, remplaça une chapelle plus exiguë et bruyante proche de la route de Bretagne, et sa réalisation fut en partie financée par la famille d'Harcourt, qui obtint le privilège d'un caveau funéraire dans l'édifice. Un pensionnat fut ajouté à l'ensemble dans les années 1780. À l'origine orientées vers une vita activa, les Visitandines de Caen se consacraient au secours des filles et femmes à la santé fragile et intervinrent ponctuellement dans des institutions comme le Refuge fondé par Jean Eudes, qu'elles dirigèrent brièvement entre 1644 et 1649 avant d'en être contraintes à partir faute de moyens et à cause d'oppositions. Progressivement, la règle de la clôture s'imposa et la communauté adopta une vie plus contemplative, tandis que d'autres initiatives caritatives non cloîtrées prirent le relais au XVIIIe siècle, notamment à Vaucelles. À la suite des décisions révolutionnaires mettant les biens ecclésiastiques à la disposition de la Nation, la chapelle fut utilisée par une section révolutionnaire et, après l'interdiction des monastères, le pensionnat fut fermé et l'armée occupa les lieux à partir de 1792, entraînant l'expulsion des religieuses. Des commissions municipales organisèrent ensuite l'hébergement des soldats dans l'ancien établissement et des procès-verbaux signalèrent des dégradations commises par des troupes de passage. Au début du XIXe siècle, le monastère fut définitivement transformé en caserne ; l'église servit d'annexe militaire pour la manutention et le stockage, des écuries furent établies dans les anciens jardins à partir de 1835, et la caserne prit successivement les noms de dépôt de Remonte puis de Quartier Lorge. Restauré pour accueillir le Fonds régional d'art contemporain de Normandie-Caen, le couvent a vu son ancienne architecture réaménagée pour une vocation culturelle, le FRAC y ayant été inauguré en 2019. L'inscription de 1927 concernait la chapelle et le cloître, mais l'église fut détruite par un bombardement en 1944 et radiée de la liste des monuments historiques en 1946 ; en revanche, le reste du monastère et les bâtiments militaires du XIXe siècle furent inscrits en 1988. Le cloître, dont les galeries datent des années 1650, présente des arcades en plein cintre encadrées par des pilastres à chapiteaux d'ordre toscan, un parti sobre caractéristique du classicisme français local ; lors de la restauration pour le FRAC, ces arcades ont été fermées par des baies vitrées pour former des couloirs de circulation. L'église disparue, construite entre 1648 et 1661, avait un plan en croix grecque avec deux transepts occupés par des chapelles dédiées à Saint-François-de-Sales et à Saint-Joseph, et comportait un chœur pour les sœurs séparé du chœur principal par une grille aujourd'hui disparue ; après la transformation en caserne son sol fut recouvert et certains décors, comme un bas-relief de la fuite en Égypte, furent mutilés. La façade rappelait les modèles jésuites, avec un clocher en dôme surmonté d'un lanternon et un portail rythmé par des ordres dorique et ionique, ce qui lui valut des éloges dès la fin du XVIIe siècle. Enfin, les arrêtés d'inscription protègent aujourd'hui le cloître, la maison dite du Grenadier — notamment ses façades, toitures, sa tour à escalier en colimaçon et son pigeonnier — ainsi que les façades et toitures des bâtiments conventuels et du pensionnat, y compris l'extension du XIXe siècle.