Origine et histoire de la Batterie allemande de Longues sur Mer
Perchée sur un plateau de 65 mètres dominant la Manche, la batterie d'artillerie de Longues-sur-Mer est un élément du « mur de l'Atlantique » construit par l'armée allemande et placé au cœur du secteur d'assaut allié du débarquement. Elle disposait de quatre canons de marine de 150 mm, installés dans des casemates en béton armé, et d'un poste de direction de tir implanté au bord de la falaise, ce qui lui permettait de couvrir les plages d'Omaha et de Gold ainsi que les navires au large sur une vingtaine de kilomètres. Désignée Wn 48, la position se trouve à environ 450 mètres du rivage, à mi‑chemin entre Port‑en‑Bessin et Arromanches‑les‑Bains, à huit kilomètres au nord de Bayeux. La décision d'y installer une batterie date de la fin 1943 ; sa construction, conduite par l'Organisation Todt avec l'entreprise Wiener & Trachte, comprit de larges terrassements, la coulée des dalles des casemates M272 et l'excavation du poste de commandement M262 Anton. Les quatre casemates, aux murs et plafonds d'environ deux mètres d'épaisseur, et le poste de commandement partiellement enterré furent achevés et rendus opérationnels au printemps 1944, tandis que des réseaux de tranchées, tobrouks, abris Vf, ceintures de barbelés et champs de mines complétaient la défense. La batterie était placée sous l'autorité de la Kriegsmarine et rattachée à la Heeres‑Küsten‑Artillerie‑Abteilung 1260 ; elle comptait une garnison d'environ 184 soldats placés sous le commandement de l'Oberleutnant Kurt Weil assisté du Leutnant Herbert. Outre les canons TbtsK C/36 montés sur affût fixe, le dispositif comprenait des pièces antiaériennes, des mitrailleuses, des mortiers et quelques pièces de campagne récupérées, dont un canon restauré encore visible sur le site. Avant le débarquement la position fut repérée par des reconnaissances aériennes et soumise à plusieurs raids, dont des bombardements importants le 27 mai et le 2 juin 1944 ; la casemate n°2 subit des dommages notables lors du raid du 27 mai mais les quatre pièces restèrent globalement intactes grâce à l'épaisseur du béton. Dans la nuit et la matinée du 6 juin, des vagues de bombardements aériens et des tirs de croiseurs et cuirassés alliés visèrent la batterie ; au cours de la journée la position tira 115 coups, en visant les plages et parfois des navires, avant d'être réduite par les duels d'artillerie et l'isolement de sa garnison. Le lendemain, après un dernier bombardement et l'abandon par le bataillon d'infanterie de protection parti vers Bayeux, des unités britanniques prirent la batterie et firent prisonniers une partie des équipages restants. Après la guerre le site fut abandonné mais les canons restèrent en place et la batterie servit plus tard de décor pour le film Le Jour le plus long. À partir de 1984, une partie du terrain est passée sous la gestion du Conservatoire du littoral ; la batterie a été inscrite puis classée au titre des monuments historiques et fait l'objet d'un aménagement en musée à ciel ouvert. Le site, apprécié pour l'état de conservation de ses bunkers et pour la présence des canons d'origine, est intégré aux parcours de visite du débarquement et reçoit un flux touristique important ; des travaux d'accueil et de valorisation furent menés entre janvier 2021 et mai 2022 avec le concours de l'État, du Conservatoire du littoral, du conseil régional et de la mairie, pour un coût global annoncé de 2,5 millions d'euros hors taxes. La batterie comprend toujours les quatre casemates M272 abritant les canons, le poste de commandement M262 Anton à deux niveaux et plusieurs abris Vf, tobrouks et encuvements antiaériens reliés par un réseau de tranchées, et elle conserve des éléments de son système de transmission et de direction de tir qui n'étaient toutefois pas totalement opérationnels le jour J. L'érosion littorale affecte la falaise et menace les ouvrages en bord de falaise ; une étude a souligné la dangerosité de certaines portions et le poste de commandement a été fermé au public en avril 2025 en raison de la corrosion des supports de la dalle et du risque d'effondrement à moyen ou long terme. La batterie de Longues-sur-Mer demeure un témoignage majeur des fortifications côtières de 1944 et de leur rôle pendant le débarquement.