Origine et histoire du Château d'Oricourt
Le château d'Oricourt, en Bourgogne-Franche-Comté, est un château fort à double enceinte édifié vers le milieu du XIIe siècle. La construction initiale est attribuée à Gaucher, connétable du comte de Bourgogne Otton de Méranie, seigneur d'Oricourt dans les années 1170, qui a réalisé l'essentiel de l'ensemble castral. Au XVe siècle, le chancelier de Bourgogne Nicolas Rolin en fut propriétaire. Le château passa ensuite aux Blâmont, puissante famille lorraine, au cours de laquelle il connut une période troublée en raison des querelles de succession entre Jean et son frère Henri. Jean, seigneur de Vellexon, Vaire et d'Oricourt, donna ses biens à son cousin Guillaume de Vienne puis révoqua cette donation dans son testament de 1408 en faveur d'Henri, après réconciliation. En août 1409, Henri transmit Oricourt à son fils aîné Thiébaut II, qui, malgré un arrêt du Parlement de Dole maintenant Guillaume de Vienne dans ses droits, s'appropria les seigneuries revendiquées et installa des soldats dans ses châteaux. Les troupes de Thiébaut dévastèrent les environs de Vellexon et le duc de Bourgogne, intervenant pour Guillaume de Vienne, fit lever le siège de Vellexon ; après plusieurs mois et l'emploi de canons, la place fut prise et détruite. Le duc prit possession d'Oricourt le 16 février 1410 et imposa ses étendards sur le château ; la garnison se soumit, de peur de la puissance du souverain, et Oricourt fut épargné. L'évolution de l'artillerie rendait toutefois de telles fortifications de moins en moins résistantes. Par la suite, Guillaume de Vienne et Thiébaut trouvèrent un accord et, en 1423, la suzeraineté du duc pour le château fut reconnue.
Au XVIIe siècle, la seigneurie passa dans la famille de Cordemoy ; Claude François de Cordemoy, issu d'une famille de Vesoul anoblie, se distingua comme soldat et fut créé chevalier en 1656. Son blason, martelé, est encore visible au-dessus de la porte d'entrée du grand corps de logis. Claude François régna sur Oricourt pendant cinquante ans, y séjournant pendant la belle saison avec sa première épouse, Anne de Bosredon, et ses enfants. En 1680, tombé malade et parti se soigner à Vesoul, il confia la garde du château à sa fille Gabrielle, qui profita de l'absence du père pour s'enfuir et épouser Mathieu Vincent, seigneur de Montjustin ; Claude François la déshérita. En 1700, il acquit la charge de lieutenant des maréchaux de France pour le bailliage de Vesoul et, à son décès fin 1706, légua Oricourt à son fils aîné Claude Pelage, en réservant l'usufruit à sa veuve, qui vécut jusqu'en 1743. En 1708, Gabrielle intenta un procès à sa belle-famille pour recouvrer sa part d'héritage mais échoua ; ce procès, riche de plus de 150 témoignages, éclaire la vie quotidienne à Oricourt à la fin du XVIIe siècle. Les témoins évoquent notamment les missions paroissiales contre l'influence protestante et situent leurs récits dans la période climatique difficile de 1690 à 1709, marquée par de mauvaises récoltes et la disette.
En 1761, Claude Pelage, sans descendance, transmit le château à Jeanne Claude, sa nièce, lors de son mariage avec François Gabriel, marquis de Chapuis, qui devint seigneur d'Oricourt et fut le dernier seigneur. La Révolution n'entama que partiellement la fortune du marquis de Chapuis : seuls le moulin d'Oppenans et une parcelle de bois furent vendus comme biens nationaux, tandis que deux domaines et la plupart des forêts furent conservés. Au XIXe siècle et au début du XXe, la propriété resta dans la descendance : un enfant légitimé, Florent Jean Gabriel, et sa progéniture transmirent terres et maison jusqu'aux de Grivel par mariage. Vers 1864, le vicomte Hippolyte de Grivel, capitaine au long cours, prit possession du château avec son épouse Gabrielle Pélagie Irmine ; en 1867 il fit relever le grand bâtiment de ferme détruit par un incendie et son blason reste visible au-dessus de la porte de la grange. Le château, devenu exploitation agricole, subit des transformations qui firent disparaître une partie de ses fortifications, mais son intérêt architectural fut signalé par l'historien Jules Gauthier à la fin du siècle ; quelques croquis de sa visite sont conservés aux Archives du Doubs. En 1932, la famille de Grivel vendit le château à son fermier Joseph Cornevaux, grand-père du propriétaire actuel. Le monument est classé au titre des monuments historiques depuis mai 1984 et le site est classé par arrêté du 13 juin 1913 pour son caractère historique et pittoresque.
Le château est implanté au bord d'un plateau calcaire et tire parti du relief naturel pour sa défense au nord ; les autres côtés sont protégés par un rempart semi-circulaire comportant autrefois un donjon aujourd'hui disparu et trois tours carrées reliées par des courtines. Ce rempart est entouré d'un fossé profond creusé dans le calcaire, qui atteint par endroits dix mètres de profondeur et près de vingt mètres de largeur, délimitant la haute cour ou cour d'habitation. À l'est, une seconde enceinte entourait la basse cour, qui communiquait avec la haute cour par un passage dans la courtine protégé par un pont-levis ; on y trouvaient les granges et les écuries. La haute cour réunit le logis seigneurial, anciennement donjon, des habitations des XIIe et XVe siècles adossées à l'enceinte, la chapelle, le four, et le puits dont la profondeur est de 22,5 mètres. À l'extérieur, près du potager, se dresse un imposant pigeonnier ; à l'intérieur du château subsistent arcades, galerie à l'italienne, une salle à manger, le four à pain, ainsi que des éléments architecturaux et décoratifs signalés sur place.