Origine et histoire du Château d'Ussé
Le château d'Ussé, situé à Rigny-Ussé en Indre‑et‑Loire, est une demeure de plaisance implantée à flanc de coteau sur la rive gauche de l'Indre et intégrée à un système défensif médiéval comprenant chemin de ronde, mâchicoulis et tours d'angle. Domaine privé ouvert à la visite, il appartient aujourd'hui au 7e duc de Blacas et bénéficie de protections au titre des monuments historiques : certaines parties sont classées (chapelle ; façades et toitures, fossés, terrasses, pavillons d'entrée, communs, orangerie et parc) et d'autres inscrites. Le site, occupé depuis la Préhistoire et la période gallo‑romaine, est cité dès le VIe siècle sous le nom d'Ucerum et occupe un emplacement stratégique contrôlant la route de Chinon et la navigation sur la Loire et l'Indre ; il est bâti au bord d'un bief alimenté par l'Indre, qui desservait un moulin jusqu'en 1892. La seigneurie d'Ussé évolue au fil des siècles : une première forteresse en bois est élevée au début du XIe siècle, puis remplacée par une construction en pierre ; la lignée des seigneurs est suivie par les familles de Montjean, de Bueil et d'Espinay, parmi lesquelles Jean V de Bueil fait édifier la structure de base du château à la fin de la guerre de Cent Ans. Les campagnes de travaux se poursuivent sous Antoine de Bueil, Jacques d'Espinay et leurs successeurs ; la collégiale est entreprise par Charles d'Espinay et Lucrèce de Pons et la chapelle paroissiale est consacrée en 1538. Le domaine change de mains à plusieurs reprises, passe aux Bernin de Valentinay qui font aménager les jardins d'après des dessins inspirés de Le Nôtre, puis à diverses familles jusqu'aux Durfort et enfin aux Blacas ; des personnalités telles que Vauban, Voltaire et Chateaubriand sont associées au château par des visites et des projets. Pendant la Seconde Guerre mondiale, Ussé sert de dépôt de repli pour des collections précieuses de la Bibliothèque nationale de France et de la bibliothèque du Sénat, entreposées dans le donjon, la galerie centrale et la chapelle.
Architecturalement, le château conjugue un vocabulaire médiéval et des éléments de la Renaissance ; les bâtiments s'organisent autour d'une tour carrée dont un côté a disparu, avec à l'angle sud‑ouest un imposant donjon cylindrique daté du XVe siècle. L'aile ouest, l'enceinte sud et la tour sud‑est correspondent aux travaux entrepris au XVe siècle, tandis que l'aile est, châtelet d'entrée et chapelle, témoigne des réaménagements réalisés sous Jacques d'Espinay et de l'affirmation d'un modèle résidentiel orné. Au XVIIe siècle, des transformations modifient l'aspect du logis — ouverture sur le paysage, remplacement de l'escalier à vis par un grand degré, harmonisation des façades et fermeture de la galerie par deux niveaux de fenêtres — et l'on ajoute alors des bâtiments annexes et une orangerie.
L'intérieur conserve de nombreuses pièces meublées et décorées qui illustrent ces évolutions : le hall d'entrée, la salle des gardes — ancienne entrée défendue par un pont‑levis aujourd'hui transformé en fenêtre — et la grande galerie qui relie les ailes contiennent tapisseries, meubles d'époque et collections. La salle des gardes montre un plafond peint en faux marbre et abrite une collection d'armes et d'objets orientaux rapportés au XIXe siècle, tandis que le salon Vauban, ancienne chapelle médiévale rénovée, présente mobilier italien et français des XVIe et XVIIe siècles ainsi que tapisseries de Bruxelles et portraits. L'ancienne cuisine, voûtée en tuffeau, est la plus ancienne salle et conserve des tapisseries d'Audenarde et un coffre gothique ; le grand escalier d'inspiration italienne et les appartements — antichambre et chambre du Roi — exposent meubles, miroirs, soieries et portraits d'époques diverses. La grande galerie accueille des tapisseries du XVIIIe siècle, un buste de Louis XIV d'après Bernini et des éléments décoratifs rapportés d'Italie.
La collégiale Notre‑Dame, construite pour la famille d'Espinay, sert d'oratoire privé et de chapelle funéraire ; sa porte en anse de panier est ornée de médaillons figurant les apôtres, les stalles du XVIe siècle sont attribuées à Jean Goujon, et l'édifice renferme des sculptures et une Vierge en faïence attribuée à Luca della Robbia. Le château conserve également une mise en scène du conte de La Belle au bois dormant, inspiré selon la tradition par Charles Perrault, composée de statues de cire le long du chemin de ronde.
Le domaine comprend, outre le château et la chapelle, des écuries avec une sellerie et une exposition d'attelages, des jardins à la française, des caves et une orangerie ; les parterres et les terrasses, repensés à l'époque des Bernin de Valentinay, participent à l'harmonie du site. Sur le plan culturel, Ussé a inspiré des artistes et a servi de décor au cinéma et à des clips, et une aquarelle de Frank Myers Boggs représentant le château a été signalée dans des ventes aux enchères.