Château de Beaumanoir à Évran à Évran en Côtes-d'Armor

Patrimoine classé Patrimoine défensif Demeure seigneuriale Château de style Classique

Château de Beaumanoir à Évran

  • Venelle Pont Saint-Jean
  • 22630 Evran
Château de Beaumanoir à Évran
Château de Beaumanoir à Évran
Château de Beaumanoir à Évran
Château de Beaumanoir à Évran
Crédit photo : Dolly11 - Sous licence Creative Commons
Propriété du département ; propriété privée

Période

2e quart XVIIe siècle

Patrimoine classé

Façades et toitures de l'ensemble des bâtiments, y compris les communs figurant au cadastre sous les n°888, 889, 893 et 894, section I : classement par arrêté du 23 avril 1965

Origine et histoire du Château de Beaumanoir

La seigneurie de Beaumanoir, à Évran, est liée à la famille chevaleresque des Beaumanoir, dont les origines remontent aux débuts de la féodalité. L'emplacement du château primitif, mentionné dès le début du XIIIe siècle, fait l'objet de plusieurs hypothèses : certains situent le site à l’emplacement du château actuel, d'autres au Clos du Petit Bois (cadastre de 1845, section I, 1642), d'autres encore dans l'ancien village de Beaumanoir ou vers la Roche, commandant le passage de la Rance. Ces pistes nécessitent des confirmations archéologiques ; Alphonse Marteville et Pierre Varin signalent en 1843 des ruines à environ trois cents mètres du logis actuel, vestiges qui pourraient aussi relever d'un établissement gallo‑romain selon la carte archéologique. Charles Lemaout, en 1851, met en doute l’emplacement traditionnel et rappelle les débats entourant la résidence de Jean III de Beaumanoir, héros du « Combat des Trente ». L'ensemble des auteurs s'accorde en revanche pour attribuer la ruine du premier château aux guerres de la Ligue : à la fin du XVIe siècle il est mentionné comme abandonné et inhabitable.

La seigneurie est rachetée le 28 février 1619 par François Peschart, gentilhomme ordinaire de la Chambre du roi et conseiller au Parlement de Bretagne, qui entreprend la construction du château actuel vers 1628–1630 (deux dates figuraient sur un bâtiment selon une description de 1843). Les descendants poursuivent les travaux, et les différences stylistiques et constructives témoignent d'une interruption puis d'une reprise du chantier, aboutissant à une simplification du parti originel : le logis, aux travées dépourvues d'ornements, se conforme davantage à la mode du milieu du XVIIe siècle. Le bâtiment a sans doute été édifié pour Jean‑Baptiste Peschart ou pour son fils Joseph Peschart ; la propriété passe ensuite par alliances familiales — Joseph Le Meneust de Bréquigny entre dans la famille par son mariage avec Marie‑Françoise Peschart le 8 avril 1686, puis la possession revient à des héritiers qui l’apportent aux Langle‑Beaumanoir — et les descendants conservent le domaine jusqu'à sa vente au Conseil général des Côtes‑d'Armor le 5 novembre 1963.

Au XIXe siècle, des aménagements datés de 1836, réalisés par Renée Lefranc‑David et Louis Marie de Langle‑Beaumanoir, modifient l'apparence du château : le logis perd ses lucarnes et ses cheminées sculptées en pierre de taille des faluns, les pavillons en carène sont supprimés et la couverture est simplifiée par une toiture à faible pente, répondant au goût plus austère de l'époque. Après 1947, à la mort de Marie de Langle, le château est progressivement dépouillé de son mobilier et de ses boiseries ; des lambris Louis XV sont récupérés en 1980 dans le bûcher d'une ferme voisine puis remontés au manoir de la Motte‑Saint‑Jean à Saint‑Coulomb. Le monument est ensuite loué et partiellement transformé en colonie de vacances et en bâtiment d'élevage agricole.

Les photographies prises lors de l'achat par le département en 1963 attestent d'un état de délabrement, toitures en partie ruinées et végétation envahissante. La rénovation est confiée aux architectes Jean Voizard et Jean Sonnier ; des constructions neuves sont intégrées pour adapter le site aux besoins de l'Institut départemental d'éducation spéciale, occupant les lieux à partir de 1969, puis aux services de l'hôpital psychiatrique Saint‑Jean‑de‑Dieu de Léhon entre 1979 et 1998. Après plusieurs années d'inoccupation, le château a été récemment vendu à un particulier.

L'attribution architecturale du château reste incertaine : Salomon de Brosse, Jacques et Étienne Corbineau ainsi que Thomas Poussin ont été cités, tous intervenant sur le chantier du Parlement de Bretagne à Rennes. René Couffon écarte Salomon de Brosse en raison de son décès en 1626 ; l'attribution aux Corbineau n'est pas définitivement établie car la qualité sculpturale ne correspond pas toujours à leur œuvre. L'hypothèse Thomas Poussin est suggérée par certains éléments — traitement des trompes en encorbellement, jeu des bossages et bossages aplatis des piliers du portail — et par des rapprochements avec des réalisations connues, mais la paternité reste ouverte.

Le château se compose de quatre corps de bâtiment entourant une cour d'honneur rectangulaire, flanquée au sud d'un mur percé d'un chemin de ronde à balustres accessible par deux escaliers latéraux. Une porte monumentale d'inspiration Renaissance italienne, encadrée de pilastres à bossages aplatis et surmontée d'un fronton courbe portant armes et ornementation, ferme la cour ; une statuette d'Éros et des figures d'angelots ornent le fronton et l'architrave. Deux tours carrées, coiffées de toitures en carène et de lanternons, flanquent le chemin de ronde ; au niveau de celui‑ci elles s'appuient sur des figures de cariatides partiellement martelées au XIXe siècle. La chapelle, installée dans la tour orientale, a un plan octogonal et une voûte portée par huit colonnes ioniques concentriques en pierre de jauge du Quiou ; elle conserve un autel en chêne et un retable du XVIIe siècle de style Louis XIII. À la base de la tour se trouvait une crypte qui servait de sépulture aux membres de la famille de Langle‑Beaumanoir. Enfin, la porte d'entrée et les deux tours sont inscrites au titre des monuments historiques par arrêté du 21 novembre 1925, tandis que les façades et toitures de l'ensemble des bâtiments sont classées par arrêté du 23 avril 1965.

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