Origine et histoire du Château de Bonnivet
Le château de Bonnivet, situé à Vendeuvre-du-Poitou dans la Vienne, était l’un des projets les plus ambitieux de la première Renaissance française ; il a aujourd’hui disparu. Sa construction remonte au début du XVIe siècle sous l’impulsion de Guillaume II Gouffier, favori de François Ier ; elle fut interrompue après sa mort à la bataille de Pavie en 1525 et reprise aux XVIIe siècle, lors d’importants travaux menés de 1649 à 1672 par Jacques de Mesgrigny. La seigneurie passa ensuite, par alliances et transmissions familiales, aux Mesgrigny puis à la maison de Chasteigner, qui la conserva jusqu’à la Révolution ; en 1788 le domaine fut vendu par lots et transformé en carrière de pierre, entraînant la dispersion de nombreux éléments sculptés. Il reste aujourd’hui du château le mur de clôture nord de la cour d’honneur, daté de 1660, et un logis du XIXe siècle qui a réemployé des éléments de l’ancien édifice. Les vestiges et le site archéologique ont été inscrits au titre des Monuments historiques le 19 septembre 2001.
Le bâtiment, long d’environ 98 mètres et haut d’environ 30 mètres, se présentait par une façade encadrée de deux tours d’angle. Au centre du corps de logis se trouvait un escalier en vis dont la cage, ouverte par des baies en plein cintre sur les deux grandes façades, formait un cabinet à claire-voie ; cet escalier organisait la distribution des appartements et constituait le point focal du décor. Le décor sculpté, de qualité exceptionnelle, mêlait un goût italien et des caractères propres à la Renaissance française, avec des rinceaux, pilastres, candélabres et médaillons.
Après le démantèlement, l’essentiel du décor sculpté fut recueilli par la Société des Antiquaires de l’Ouest pour le musée de Poitiers ; une grande partie est aujourd’hui conservée au musée Sainte-Croix, tandis que d’autres éléments se trouvent dans les collections municipales de Vendeuvre, aux châteaux d’Avanton et de Chincé, ainsi qu’au Cleveland Museum of Art et au Louvre. De nombreux acheteurs privés et collectionneurs ont également acquis reliefs et sculptures, certains escaliers ayant même été numérotés pour être remontés ailleurs.
Le décor et l’art du château de Bonnivet ont exercé une influence marquée sur l’architecture et l’ornementation de la Renaissance poitevine ; on en retrouve l’écho dans plusieurs hôtels de Poitiers, notamment les hôtels Berthelot, d’Estissac et Jean Beaucé. Plusieurs représentations anciennes, bien que imparfaites, ont permis des restitutions plausibles de la façade sud et de l’escalier : gravures d’après Claude Chastillon vers 1600-1610, gravures de Lapointe vers 1670-1680, un dessin d’Hivonnait vers 1800 réalisé avant le démantèlement, et des vues romantiques des ruines par Puissilieux-Drausin vers 1810-1820. Enfin, la renommée du château dépasse l’histoire locale : François Rabelais s’en inspira pour l’abbaye de Thélème et Stendhal y fait référence dans Armance.