Origine et histoire du Château de Brionne
Le château de Brionne, ancienne forteresse du comté éponyme, est un château fort construit à la fin du XIe ou au début du XIIe siècle, aujourd'hui en ruines dont le dernier vestige est un donjon partiellement détruit. Installé sur le territoire de la commune de Brionne, dans le nord-ouest du département de l'Eure en Normandie, il dominait la vallée de la Risle et contrôlait la voie Rouen–Alençon qui franchit la vallée en ce point. Des traces laissent penser qu'un fort existait à cet emplacement dès l'époque romaine, en raison de l'importance du carrefour entre Lisieux, Pont-Audemer, Rouen et Évreux. Le château primitif, mentionné en 1047, se trouvait sur une île de la Risle sous la ville actuelle et fut partiellement détruit en 1735 pour la construction de moulins. Les sources médiévales indiquent que la seigneurie de Brionne passa entre plusieurs membres de la famille de Brionne et des Beaumont, avec des épisodes de siège et de prise, et que le donjon quadrangulaire actuel a probablement été élevé par Robert Ier de Meulan. Le château fut assiégé à plusieurs reprises, notamment en 1047, vers 1090, au printemps 1124 par Henri Ier Beauclerc, puis pris par Philippe Auguste en 1194 et en partie ruiné par les Anglais en 1421. Les fortifications furent ensuite démantelées à la suite de l'ordonnance royale de 1626 visant le rasement de nombreuses fortifications non frontalières. Les ruines furent acquises le 27 mai 1869 par Arthur Join-Lambert, conseiller général, puis données à la ville de Brionne le même jour. Des travaux de consolidation ont été menés par la ville entre 1994 et 1996, accompagnés de recherches architecturales et d'analyses dendrochronologiques qui, en raison du mauvais état des pièces de bois prélevées, n'ont pas permis d'apporter de résultats déterminants. Le donjon roman, renforcé par des contreforts plats, est implanté sur une motte isolée du plateau par un fossé ; sa base a un plan presque carré d'environ 20 × 19,70 mètres, une élévation conservée de 17 mètres et des murs d'environ 4 mètres d'épaisseur, plus massifs aux angles et sous les contreforts. La façade nord, la mieux conservée, révèle trois niveaux : un niveau inférieur accessible par une porte percée dans le mur ouest, un étage principal dont le plancher reposait sur des solives appuyées sur trois sommiers et éclairé par deux grandes baies donnant sur une salle d'une hauteur estimée à 4,20 mètres, puis des combles couverts d'un toit en bâtière dont l'un des versants laisse l'empreinte sur le mur nord-ouest et dont la pente a été évaluée à 10 %. L'intérieur montre des phases de réaménagement : à l'origine, la construction utilisait des moellons noyés dans le mortier renforcés par des longines de bois, puis, à la fin du XIIe siècle, le donjon semble avoir reçu un double parement en pierres de taille à l'intérieur et à l'extérieur ainsi qu'un glacis en escalier. La porte ouest paraît postérieure à la construction primitive, les donjons romans étant généralement aveugles à l'origine. Le premier étage résulte vraisemblablement de la fusion de deux niveaux antérieurs, comme l'indiquent les traces de deux voûtes comblées superposées dans le mur ouest ; la voûte inférieure correspondait à un espace équipé d'une cheminée dont l'un des piédroits, surmonté d'un chapiteau sculpté, subsiste. Des passages étroits, aujourd'hui obstrués, prenaient origine sur la face interne du mur nord à droite de chaque fenêtre et s'ouvraient par deux baies ébrasées à l'extérieur ; leur fonction reste incertaine. Un couloir partant d'une des fenêtres aboutit à un espace non identifié dans l'angle nord-ouest, et des réaménagements sommitaux ont modifié la distribution intérieure en comblant certains locaux, en installant des hourds et en condamnant une cheminée et son conduit. Arcisse de Caumont a signalé la présence de trous carrés dans les façades extérieures destinés à recevoir des poutres saillantes qui supportaient un balcon en bois périphérique, et il a noté des pièces de bois noyées dans le blocage du mur nord dont la fonction était de relier les murs par de grandes traverses pour limiter les dislocations. Les ruines du château sont accessibles librement toute l'année et le donjon est inscrit au titre des monuments historiques depuis l'arrêté du 12 février 1925 ; le donjon et la partie de la côte qui l'entoure sont également classés au titre des sites protégés par l'arrêté du 20 avril 1925.