Château de Canchy dans le Calvados

Patrimoine classé Patrimoine défensif Demeure seigneuriale Château

Château de Canchy

  • Ferme de la Planche
  • 14230 Canchy
Château de Canchy
Château de Canchy
Château de Canchy
Château de Canchy
Château de Canchy
Crédit photo : Ikmo-ned - Sous licence Creative Commons
Propriété privée

Frise chronologique

Temps modernes
Révolution/Empire
XIXe siècle
Époque contemporaine
1700
1800
1900
2000
Fin du XVIe siècle
Modification de la toiture
XVIIe siècle
Aménagements intérieurs
1786
Visite royale
1798
Vente comme bien national
1927
Inscription aux monuments historiques
Aujourd'hui
Aujourd'hui

Patrimoine classé

Tours carrées : inscription par arrêté du 2 juillet 1927

Personnages clés

Guillaume de Crèvecœur Seigneur ayant donné sa fille en mariage à Jourdain Ier du Hommet au XIIe siècle.
Jourdain Ier du Hommet Seigneur ayant épousé la fille de Guillaume de Crèvecœur au XIIe siècle.
Louis de Sainte Marie Seigneur ayant adopté puis abjuré la religion protestante, inhumé dans l'église de Canchy.
Charles‑François de Broglie Marquis ayant restauré somptueusement les jardins du château au XVIIIe siècle.
Charles Maurice du Moustier de Canchy Propriétaire ayant racheté les restes du château en 1885.
Jean François du Moustier de Canchy Propriétaire ayant entrepris d'importants travaux de restauration avant de transmettre le château à son fils.

Origine et histoire du Château de Canchy

Le château de Canchy se dresse sur la commune de Canchy, dans le Calvados ; à l’époque médiévale il formait, avec le château de Colombières, l’un des deux verrous protégeant les contreforts de la vallée de l’Esque pour empêcher la progression d’envahisseurs venant de la mer. Au XVIIIe siècle, les vestiges étaient encore importants et illustrés par une gravure montrant les grandes constructions seigneuriales des époques d’Henri IV et de Louis XIII. À l’origine l’édifice était de plan carré, entouré de douves remplies d’eau ; aujourd’hui un seul côté subsiste en intégralité, d’une longueur de cent mètres. Cette façade se compose d’une enfilade de bâtiments avec un pavillon central carré qui renferme, au rez-de-chaussée, la petite et la grande porte. Quatre tours occupaient les angles, dont deux seulement subsistent : la tour sud, le long de l’église, dont la toiture s’est effondrée en 1925, et la tour nord qui a conservé sa couverture. Le pavillon central conserve une belle rangée de mâchicoulis ; il semble qu’à la fin du XVIe siècle un long toit et une haute cheminée aient remplacé le couronnement crénelé médiéval, toiture qui s’écroula brutalement en 1970 en entraînant la voûte et le plancher du premier étage. Dans les escaliers menant aux étages, des meurtrières permettaient aux gardes de lancer projectiles depuis la montée, et les voûtes intérieures, réalisées en pierres noyées dans du mortier, dépassent cinquante centimètres d’épaisseur.

Aux XVIIe et XVIIIe siècles, la grande porte du pavillon central servait d’entrée solennelle aux hôtes ; des jardins à la française occupaient alors la cour intérieure et les abords sur environ cinq hectares, plans relevés lors du voyage du roi Louis XVI à Cherbourg en juin 1786. Au moment de la confiscation et de la vente comme bien national en 1798, la forteresse était encore imposante et venait d’être restaurée ; un siècle plus tard, lorsque la famille du Moustier de Canchy reprit la propriété, seuls subsistaient les bâtiments actuels, transformés en exploitation agricole et privés de trois côtés de leur enceinte et de leurs jardins à la française. La seigneurie de Canchy relevait au XIe siècle de Crèvecœur ; en 1180 Guillaume de Crèvecœur donna sa fille en mariage à Jourdain Ier du Hommet et la famille du Hommet, l’une des plus anciennes et puissantes de la région, fut connétable héréditaire de Normandie jusqu’au XIIIe siècle. Des alliances et litiges successifs, notamment une contestation de dîme en 1222 et la présence de la famille d’Esquay à la fin du XIVe siècle, jalonnent l’histoire médiévale de la seigneurie. Au début du XVe siècle Girard III d’Esquay fut dépouillé de ses biens pendant l’occupation anglaise, puis la trêve de Tours de 1444 permit à Regnier d’Esquay de retrouver la seigneurie.

La famille de Sainte-Marie d’Agneaux reçut ensuite la seigneurie : Richard d’Esquay transmit Agneaux et Canchy avec la main de sa fille Girette en 1450 à Raoul, et ses descendants, dont Jean II (1450-1518) et Jean III, exercèrent des fonctions militaires et administratives. Plusieurs membres embrassèrent la religion réformée et prirent part aux événements religieux de 1562 ; Louis de Sainte Marie (1555-1616), après avoir adopté puis abjuré la religion protestante, est inhumé dans le chœur de l’église de Canchy avec son épouse, et sa sépulture et son inscription sont encore visibles. La famille du Moustier, noble de Normandie, reprit la seigneurie en 1672 et la conserva jusqu’à sa vente le 8 juillet 1764 au marquis Charles‑François de Broglie pour 300 000 livres.

Charles‑François de Broglie fit restaurer somptueusement les jardins et, après des carrières diplomatiques et des exils, s’installa à Canchy et y mourut en 1781. À la Révolution la famille de Broglie quitta Canchy ; les biens furent confisqués et vendus comme biens nationaux à la suite de délibérations et lois révolutionnaires, puis adjugés le 5 brumaire an VIII (27 octobre 1799) à M. Menage et M. Noël pour 6 525 francs. Le château fut en grande partie dépecé et servi de carrière de pierres ; en 1885 les héritiers vendirent les restes à Charles Maurice du Moustier de Canchy (né en 1838), et la propriété resta dans la famille depuis lors. Elle passa successivement à Étienne du Moustier, à son neveu homonyme, puis à Étienne du Moustier (1909-1976), général de brigade, et fut ensuite léguée à Jean François du Moustier de Canchy qui entreprit d’importants travaux de restauration avant de la transmettre à son fils Nicolas du Moustier de Canchy.

Une observation de la façade sur cour intérieure met en évidence trois états successifs : la partie la plus ancienne, entre l’église et la tour centrale, des remaniements du XIXe siècle et des transformations des XVIIe et XVIIIe siècles autour de la tour nord. La partie ancienne se reconnaît à la présence de boulins et de fenêtres ogivales étroites ; la plupart des volumes intérieurs non restaurés datent d’une période antérieure au XVIIe siècle, tant les petites pièces que les escaliers et passages fortifiés desservant l’ancien chemin de ronde. Les boulins complètent ceux du colombier situé à l’extérieur, qui attestent de l’importance seigneuriale et fournissaient œufs, viande et engrais ; la présence de ce colombier, dont la destruction figure dans les cahiers de doléance de 1789, témoigne des droits seigneuriaux contraignants pour les paysans. La partie centrale du château, où se trouve le grand salon aujourd’hui en cours de restauration, avait été sommairement remontée au XIXe siècle pour servir de grange ; lors des travaux engagés en 1990 l’encadrement de pierre initial de toutes les ouvertures de la cour fut rétabli. Le logis qui prolonge le salon et intègre la tour nord révèle des aménagements probablement du XVIIe siècle : sols et plafonds refaits, fenêtres rectangulaires à petits carreaux et cheminées de pierre ornées de coquilles, et il est vraisemblable que la partie centrale avait bénéficié des mêmes améliorations.

Les tours carrées du château sont inscrites aux monuments historiques par arrêté du 2 juillet 1927.

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