Origine et histoire du Château de Cerisy-la-Salle
Le château de Cerisy, demeure de la première moitié du XVIIe siècle, se dresse sur la commune de Cerisy-la-Salle (Manche) au sommet d’un escarpement dominant la vallée de la Soulles ; il est aujourd’hui Centre culturel international et protégé au titre des monuments historiques. Des linteaux datés de 1613 (ou 1617) et 1625 attestent la période de construction, attribuée à Jean Richier. Le site occupe une terrasse bordée au nord par un escarpement qui descend jusqu’au ruisseau du Robec et, au sud, par un dénivelé offrant une vue sur le vallon voisin. La seigneurie de Cerisy, possédée dès le XIe siècle par les Pirou, a connu au fil des siècles un morcellement en « grande » et « petite seigneurie », cette dernière entrant dans la famille Richier au début du XVe siècle par mariage. Le château actuel, élevé près d’un ancien manoir du XVe siècle partiellement conservé sous forme d’un mur d’enceinte et de la base d’une échauguette, reflète le plan bastionné des manoirs de la fin du XVIe siècle. Jean Richier, propriétaire et huguenot, fit édifier la demeure après les guerres de religion ; le château fut le siège d’une paroisse protestante locale et Jean Richier instaura en 1640 un marché hebdomadaire et deux foires annuelles. La famille Richier conserva la seigneurie jusqu’à la Révolution ; le dernier seigneur avant les troubles révolutionnaires fut Gédéon Jean François Richier, dont l’émigration entraîna la confiscation et la vente des biens. Le château fut vendu comme bien national en 1794 à Pierre-Joseph Hocquet, puis acquis au début du XIXe siècle par François Duhérissier de Gerville, maire de la commune de 1810 à 1815 ; en 1819 il passa à Joseph-Louis-Sébastien Savary, lui-même maire de 1831 à 1854, et resta ensuite dans la famille Savary avant d’entrer, au XXe siècle, dans la descendance de Marie-Amélie Desjardins. Pendant la Seconde Guerre mondiale, les Allemands y établirent leur Kommandantur et un hôpital après le débarquement ; le village fut détruit en juillet 1944 mais le château échappa à l’incendie, bien qu’il ait été gravement endommagé et rendu partiellement inhabitable. Restauré pendant vingt-cinq ans par Marie-Amélie Desjardins et sa fille Anne Heurgon-Desjardins, le château accueille depuis 1952 le Centre culturel international, prolongeant l’esprit des Décades de Pontigny ; de nombreuses rencontres culturelles y ont réuni des personnalités intellectuelles et littéraires. Architectoniquement, le corps de logis central en grès rouge et granit s’élève sur un rez-de-chaussée et un étage ; il est flanqué de quatre pavillons d’angle à plan légèrement losangé, protégé sur trois côtés par des douves sèches, et complété au centre par un cinquième pavillon abritant l’escalier principal, surmonté d’un clocheton. La façade nord et les ponts datent de 1756 ; la sobriété décorative se concentre sur les lucarnes, les bandeaux horizontaux et la polychromie des matériaux, les nombreuses fenêtres ayant été ajoutées aux XIXe et XIXe siècles. À l’intérieur, l’escalier monumental, les cheminées en granit, la bibliothèque — ancienne salle basse avec plafond peint de style Louis XIII — et des salons dotés de boiseries illustrent les qualités intérieures de l’édifice. Le domaine comprend une ferme contemporaine du château, aménagée en salle de réception et disposée en L, ainsi que des dépendances postérieures telles que la charretterie à trois arcades, les écuries, l’orangerie et les serres ; un platane bicentenaire domine un étang issu d’anciens viviers. Au titre des monuments historiques, les dépendances (sauf celles classées) ont été inscrites par arrêté du 31 mai 1946, et le château avec ses décors peints, ses terrasses, ses fossés et ponts, les vestiges de l’ancien château, la barbacane et la ferme (à l’exclusion des écuries nord-est) ont été classés par arrêté du 4 juillet 1995. Depuis 1974, la propriété appartient à la Société civile du château de Cerisy-la-Salle.