Origine et histoire du Château de Châlus-Chabrol
Le château de Châlus-Chabrol, érigé au milieu du XIe siècle sur d'anciennes fortifications, était à l'origine un puissant château-fort ceint d'une double enceinte. De profondes transformations y furent effectuées au XIIIe siècle sous Géraud de Maulmont et, à la fin du XVIIe siècle, sous Magdeleine de Bermondet, veuve du comte de Bourbon. Installé sur un promontoire rocheux en rive droite de la Tardoire, il domine le bourg de Châlus ; en face se dresse le château plus récent de Châlus-Maulmont, construit par Géraud de Maulmont. Sa situation de frontière entre Périgord et Limousin explique son rôle stratégique : une chaîne de quinze châteaux protégeait l'accès sud de Limoges entre ces régions. Selon la tradition rapportée par les frères de Sainte-Marthe, les seigneurs de Limoges — vicomtes et évêques — voulurent contrôler la route de Limoges au Périgord ; Ithier Chabot (ou Chalas) est cité comme évêque élu en 1052. Le détour de la voie pour éviter les terres des seigneurs de Lastours favorisa le développement d'un bourg castral, la Villehaute, et l'essor de foires, renforcé par la fondation voisine de l'abbaye de l'Abeille par l'abbaye Saint-Augustin-lès-Limoges. Lors du siège de 1199 mené par Mercadier, Richard Cœur de Lion fut atteint d'un carreau d'arbalète tiré depuis le donjon par le chevalier Pierre Basile et mourut ensuite des suites de sa blessure. À cette époque, la place, possession d'Aimar V de Limoges, abritait trente-huit personnes réfugiées dans le donjon ; les assaillants tentèrent notamment de saper la tour. En 1592 la forteresse passa aux mains des catholiques après un siège et des tirs d'artillerie menés par le gouverneur du Limousin et le comte de Bourbon de Busset, tandis que le capitaine Labesse la défendait pour les protestants. Démantelé pendant la Révolution, le château fit l'objet de restaurations au XIXe siècle : le comte de Châlus y installa des religieuses de l'Instruction de l'Enfant-Jésus en 1854 et fit consolider la tour en 1861. Au XXe siècle et au début du XXIe, il changea de propriétaires et fit l'objet de nouvelles restaurations, notamment après son acquisition par Bertrand Heyraud en 1995 ; des cérémonies du huitième centenaire de la blessure de Richard s'y déroulèrent en 1999. L'ensemble comprend un corps de logis ancien, une tour d'angle attenante et un donjon datant de la fondation, ainsi que les vestiges d'une chapelle castrale des Xe–XIe siècles devenue église paroissiale, une chapelle du XVe siècle, un puits et un corps de logis du XVIIe siècle. Le donjon, seul élément conservé du XIe siècle avec la tour engagée dans le corps de logis, s'élève au centre de la cour ; sa porte d'accès unique se situe à sept mètres au-dessus du sol. Le rez-de-chaussée du bâtiment du XIIIe siècle est organisé en deux salles rectangulaires qui ne formaient à l'origine qu'un seul espace et qui ouvrent sur la salle polygonale de la tour. Les étages supérieurs de la tour furent arasés en 1861 et transformés en terrasse ; le sous-sol comporte une vaste salle voûtée surmontée d'une coupole en moellons et le quatrième étage s'est effondré en 1870. Dans la chapelle castrale, Richard exigea que ses entrailles y soient ensevelies ; un faux gisant en ciment placé devant les vestiges rappelle cette sépulture. Le site bénéficie d'une protection aux monuments historiques : le donjon et la tour d'angle sont classés, les façades et toitures de l'ancien corps de logis attenant à la tour sont classées, les façades et toitures du corps de logis du XVIIe siècle sont inscrites, et le site lui‑même est inscrit au titre des monuments historiques. La seigneurie passa des premiers constructeurs — Bernard Chabrol agissant pour les vicomtes de Limoges — à la famille de Maulmont, puis entra dans les successions liées aux rois de France, aux familles Sully et d'Albret, fut apportée en dot à César Borgia puis, en 1535, à Philippe de Bourbon Busset, et resta dans la branche des Bourbon Busset jusqu'en 1995. Après plusieurs ventes successives, le château appartient à des propriétaires privés au XXIe siècle, la dernière acquisition mentionnée datant du 5 mars 2019. Le monument a par ailleurs inspiré la littérature : il figure dans le roman Celui qui revenait de loin de la série Les Conquérants de l'Impossible de Philippe Ebly.