Origine et histoire du Château de Cramayel
Le château de Cramayel, situé sur l'actuelle commune de Moissy-Cramayel en Seine-et-Marne, avait des origines médiévales et a été détruit au XIXe siècle. À une trentaine de kilomètres au sud de Paris, le fief seigneurial de Cramayau, appelé Cramayel à partir du XVIIe siècle, dépendait de la paroisse de Moissy-l'Évêque, qui appartenait aux évêques de Paris. Ces derniers cédèrent leurs droits aux seigneurs de Cramayel en 1643 et la paroisse prit alors le nom de Moissy-Cramayel. Le château était une vieille construction féodale précédée de deux avant-cours ; il comprenait une chapelle fondée en 1203, des plantations anciennes et de grandes fermes. Au début du XVIIIe siècle la famille de Mesmes, sous la direction de l'architecte Germain Boffrand, fit d'importants travaux d'embellissement et modifia la distribution intérieure. À l'extérieur, le manoir en gresserie était flanqué de quatre tours, accosté de deux pavillons et entouré de fossés à sec franchis par deux ponts-levis. Les Mesmes agrandirent le domaine, firent édifier d'imposants communs, créèrent un potager et un parc de plus de cent arpents, aménagèrent vingt-cinq arpents de parterres et ouvrirent des avenues, tout en obtenant l'établissement d'une route royale entre Cramayel et Lieusaint. Parmi les membres notables de la famille figurent le comte d'Irval, ambassadeur, et le comte d'Avaux, Jean-Antoine de Mesmes, président à mortier au parlement de Paris et membre de l'Académie française. Héritier en 1728, la marquise d'Ambres, née Henriette-Antoinette de Mesmes, vendit le domaine en décembre 1753 à François Fontaine et à sa femme Françoise-Monique de la Borde. François Fontaine, qui avait succédé à son père comme fermier général en 1750, acquit le château meublé et poursuivit les travaux d'embellissement, faisant intervenir les architectes Barreau de Chefdeville, Mac-Laurin et Ledoux aussi bien à Cramayel que dans son hôtel parisien. Au milieu du XVIIIe siècle il fit édifier un théâtre de salle, achevé en 1768, destiné aux divertissements de la noblesse locale et des amis parisiens ; parmi les habitués se trouvaient le comte d'Angiviller, Crébillon fils, Marmontel, le jeune Bernardin de Saint-Pierre et le cardinal de Bernis. Des acteurs professionnels venus de Paris, notamment de la Comédie-Française et de la Comédie-Italienne, jouèrent aux côtés d'amateurs des pièces comme Les Plaideurs, L'Écossaise, Le Rossignol, Rose et Colas et La Partie de chasse de Henri IV. Après l'interdiction faite aux comédiens français et italiens de jouer sans permission hors de leurs théâtres, la mode des théâtres de société déclina ; celui de Cramayel fut utilisé seulement quelques années et pour une douzaine de représentations, dont la dernière eut probablement lieu le 15 novembre 1773. La salle, édifiée sous la direction de Mac-Laurin pour un coût de pas moins de 45 000 livres, mesurait 75 pieds de long avec une élévation de 22 pieds, comportait six fenêtres en façade, un fond circulaire opposé à la scène et une organisation intérieure comprenant parterre carrelé, deux rangs de loges, une galerie, une scène plus vaste que le parterre, des poulies et chemins de plafond pour les machineries, loges d'acteurs, magasin de costumes, foyers, orchestre et amphithéâtre. Le roi Louis XV érigea le domaine en marquisat en janvier 1773 en faveur de François Fontaine, probablement grâce à l'intervention de Madame du Barry et de Madame de Cramayel. François Fontaine mourut en 1779 et son fils Jean-François lui succéda ; au cours de sa vie il occupa diverses fonctions politiques et administratives et fut maire de Moissy-Cramayel de 1816 à 1826. Napoléon Bonaparte séjourna fréquemment à Cramayel pour la chasse ; il est attesté qu'il signa, avec Joséphine, en qualité de témoin l'acte de naissance d'un enfant du château, qui porta le prénom de Napoléonne Joséphine. Jean-François Fontaine participa à la cérémonie du sacre comme maître de cérémonie et fit partie du cortège entourant l'empereur. Le château fut démoli en 1824 ; les causes précises restent incertaines ; la tradition locale rapporte qu'il aurait été perdu au jeu par le marquis, puis abandonné, laissé se dégrader et finalement démantelé faute de moyens pour le réparer. Il subsiste aujourd'hui des vestiges : fondations et parties de caves, les grands fossés de l'avant-cour et leurs ponts d'accès, les écuries, les imposants communs et, sur un promontoire proche, un obélisque. L'obélisque, élevé en 1767 par François Fontaine sous la direction de l'architecte Oudot de Maclaurin, est construit en pierre calcaire de Créteil, haut de 25 mètres et surmonté d'une boule en cuivre ; sa construction a coûté 14 285 livres 9 sols et 3 deniers. L'inscription latine gravée sur le monument célèbre les vingt ans de félicité conjugale du seigneur de Cramayel et de son épouse. L'obélisque a été inscrit au titre des monuments historiques le 25 avril 1975.