Origine et histoire du Château de Gageac
Le château de Gageac est situé à Gageac-et-Rouillac, en Dordogne, et domine la vallée de la Dordogne au milieu d'un vignoble renommé. Inscrit au titre des monuments historiques par arrêté du 27 septembre 1948, il figure parmi les édifices les plus importants du sud bergeracois, sur la route des vins à 18 km de Bergerac et 12 km de Sainte-Foy-la-Grande. Sa silhouette simple et imposante en fait l'un des châteaux-forts les plus harmonieux de la région. L'ensemble comprend une cour fermée par des remparts bordés de tours et d'échauguettes; le corps de logis barlong est accosté de tours carrées à mâchicoulis et percé de fenêtres à meneaux. Dans la cour intérieure se remarque une porte d'époque Louis XIV munie d'un heurtoir en fer forgé.
La position du château a été choisie comme place forte avancée du château de Duras, situé une vingtaine de kilomètres au sud, et il fait face au château de La Force, sur les coteaux opposés, ce qui laissait supposer des rivalités entre ces seigneuries. À l'origine, la fortification se réduisait à un donjon carré en pierre, placé à l'ouest et daté des XIe–XIIe siècles, le reste des défenses étant en bois. L'accès se faisait au premier étage par une échelle amovible que l'on retirait en cas d'approche des assaillants. Le donjon comprend deux pièces principales : la salle des gardes, située dans la partie la plus élevée, éclairée par une fenêtre et desservie par un escalier logé dans l'épaisseur des murs, et une pièce presque sans lumière, éclairée seulement par un soupirail et implantée au niveau du rocher, qui servait davantage de réserve que de cachot. Au fil du temps, le site s'agrandit : un corps de bâtiment séparé du donjon fut construit pour loger les troupes et une passerelle amovible permettait de relier les deux constructions au premier étage.
La région connut des invasions anglaises : Gageac fut incendié puis reconstruit, le donjon restant intact. Selon les éléments conservés, en 1360 Du Guesclin fit le siège pendant cinq jours et les Anglais, manquant de vivres, se rendirent sans combattre. Au retour du siège de Duras, en 1370, le duc d'Anjou et Du Guesclin s'emparèrent du château, qui fut ensuite donné à Archambaud YV, comte de Périgord.
En 1650 une tour supplémentaire fut ajoutée, dont la charpente est attribuée à un architecte maritime. Des douves sèches entourent aujourd'hui les bâtiments sur les côtés est, sud et ouest, le nord étant protégé par des marécages, et un second mur d'enceinte flanqué d'échauguettes et de tours s'implantait à l'extérieur des douves. Gaillard de Durfort, puis les familles d'Essenault de Castelnau et du Reclus transformèrent l'édifice en habitation et l'embellirent pour le rendre plus confortable. Les Doussaut de la Primaudière, puis leurs descendants la famille de La Verrie de Vivans, l'occupent depuis plus de six générations; au XXIe siècle, Jacquelin de La Verrie de Vivans en est le demeurant.
Le corps de logis fut surmonté de mansardes — trois doubles au nord et deux simples au sud — dont il subsiste une sur la façade sud. Au XIXe siècle, dans le cadre d'une restauration, on supprima un étage intermédiaire, on agrandit les ouvertures pour éclairer l'intérieur, on élargit l'escalier principal et l'on perça une fenêtre à meneaux supplémentaire dans le donjon à l'ouest. La même période, dite romantique, vit l'aménagement d'une allée de cèdres du Liban; cette allée a été partiellement détruite par les tempêtes de 1999 et 2009. Une terrasse au nord fut créée avec les remblais des anciennes fortifications et une porte monumentale ouverte, et des mûriers furent plantés le long de la route vers 1873 pour l'élevage des vers à soie.
Parmi les familles liées au château, Bertrand de Duras était seigneur de Gageac lorsque, le 22 juillet 1348, le roi d'Angleterre Édouard III lui donna les châteaux et communaux de Sauveterre en compensation de terres confisquées par le roi de France. La famille de Reclus apparaît aussi dans la généalogie des seigneurs : Élie de Reclus, baron de Gageac, épousa en 1725 Marie-Élisabeth de Roche de Tude et eut notamment François-Joseph de Reclus, né en 1748, seigneur et mousquetaire, qui fit un dénombrement au roi en 1769 et mourut en 1792 en laissant au moins un fils. Ce château conserve ainsi des traces de son rôle défensif et de son évolution en demeure seigneuriale.