Origine et histoire du Château de Granville
Le château de Grandville, aujourd'hui qualifié de villa néo-palladienne, se situe à Port-Saint-Père, dans le Pays de Retz en Loire-Atlantique. Il a été construit entre 1820 et 1825 par l'architecte nantais Étienne Jean-Baptiste Blon pour Aristide Locquet de Grandville. Aristide Locquet de Grandville (1791-1853), qui fut maire de Port-Saint-Père et siégea aux assemblées constituante et législative, acquiert un terrain sur le coteau de Beaulieu dominant les marais et les rives de l'Acheneau pour y édifier sa demeure. Pour la construction du château et de ses dépendances — corps de ferme, potager, réservoir d'eau, pigeonnier et lavoir — il fait appel à Blon ; les travaux semblent s'étendre de 1820 à la fin de 1824. Un contentieux sur le paiement oppose alors le propriétaire et l'architecte : Aristide allègue avoir engagé Blon comme entrepreneur pour 55 000 francs, tandis que Blon se présente comme architecte afin de réclamer un montant plus élevé ; l'architecte sort victorieux des procédures et, après vingt-trois ans, le dossier est clos avec un paiement supplémentaire de 21 000 francs. En 1844 Aristide commande une chapelle à l'architecte diocésain de Nantes, Théodore Nau. Pour l'aménagement du parc, André Leroy est consulté sans suite, et le plan finalement réalisé après 1851 porte la signature de Jean-Dominique Noisette. À la mort d'Aristide, le domaine revient à son gendre Stéphane de Moulin de Rochefort, puis passe par mariages aux familles Dampierre et d'Argenlieu, ces derniers procédant à des restaurations récentes. Le monument est inscrit au titre des monuments historiques en 1992.
Le château relève du néo-palladianisme, un vocabulaire italien adapté à la villa de campagne, et s'organise selon un plan massé, presque carré, proche des modèles palladiens. Côté jardin, l'élévation s'appuie sur un soubassement qui abrite les communs et présente trois niveaux : le rez-de-chaussée, l'étage noble et un attique. L'avant-corps central du premier niveau ouvre par trois baies en plein cintre avec impostes en « soleil », encadrées de travées à baies similaires ; le deuxième niveau présente une loggia en saillie portée par six colonnes ioniques en tuffeau, dont quatre formant des colonnes jumelées, qui rythment la façade en un organe ternaire et intègrent l'attique abritant des chambres secondaires. Un entablement ionique couronne l'élévation et la toiture est à deux versants en ardoise. La façade côté cour, enduite en gris, reprend l'organisation à trois niveaux avec un avant-corps central en tuffeau, une porte d'entrée surmontée d'un fronton et un perron desservi par quatre escaliers ; le deuxième niveau présente trois baies quadrangulaires surmontées de châssis en demi-lune et séparées par des pilastres liés en tuffeau qui prolongent verticalement l'ordonnancement, suggérant un triplet de serliennes, tandis que des travées latérales et un attique à petites baies complètent la composition.
Les dépendances, disposées en « U » autour d'une cour au nord-ouest du château, sont symétriques selon un axe nord-sud ; elles ont des plans rectangulaires, des toits débordants à faible pente en ardoise ou en tuile et des maçonneries de schiste et de granite recouvertes du même enduit gris que la façade ouest du château. Certaines façades comportent de grandes portes quadrangulaires au rez-de-chaussée liées à des usages de stockage, d'autres des portes centrales surmontées de baies parfois murées ou en demi-lune ; les petites baies non recouvertes sont encadrées de briqueterie, évoquant l'emploi de la chantignole dans une tradition italienne.
La chapelle néogothique édifiée par Théodore Nau porte, sur une porte latérale, l'inscription « Année du Seigneur 1844 ». Extérieurement, elle présente des murs en moellons de schiste, des angles en pierres de taille de tuffeau et de granite, des pignons flanqués de contreforts, un portail en anse de panier surmonté d'un gâble ajouré avec un remplage flamboyant et une niche à baldaquin abritant une Vierge à l'Enfant. L'intérieur comporte deux travées de voûtes octopartites dont les voussures rejoignent les murs gouttereaux et sont reportées par des chapiteaux à décor végétal portés par des colonnes engagées correspondant aux contreforts extérieurs ; le chœur, installé dans une abside, est percé de trois vitraux représentant saint Joachim, sainte Anne et sainte Marie.
Le parc a été conçu pour mettre en valeur l'édifice et son site en surplomb des marais de l'Acheneau, selon les principes d'un parc « à l'anglaise » visant une mise en scène pittoresque de la nature. Le plan établi en 1851 par Jean-Dominique Noisette a été mis en œuvre et reste en grande partie lisible aujourd'hui : certaines allées sinueuses dessinées à cette époque sont encore parcourables près du château, tandis que d'autres chemins ont disparu avant 1943 et n'apparaissent pas sur le cadastre napoléonien de cette année. L'analyse de la flore montre que les essences figurant sur le plan — sapins, pins et arbustes — ont été plantées aux emplacements prévus et subsistent, de sorte que, malgré des modifications, les tracés courbes du jardin pittoresque conservent l'aspect d'un parc à l'anglaise hérité de 1851.