Origine et histoire du Château de Guermantes
Le château de Guermantes, situé à Guermantes en Seine‑et‑Marne, est classé au titre des monuments historiques depuis le 9 août 1944 et le 21 décembre 1970. Il a inspiré à Marcel Proust le nom de « Guermantes », employé pour plusieurs personnages d'À la recherche du temps perdu et pour le titre du troisième tome, Le Côté de Guermantes, sans pour autant apparaître dans l'œuvre. La famille Viole, propriétaire du fief depuis le milieu du XVIe siècle, voit Pierre Viole (mort en 1638) entreprendre la construction du château. En 1665 la propriété revient à Claude. En 1698 Paulin Pondre (1650-1723), grand audiencier de France et receveur des finances à Lyon, achète le domaine et engage d'importants travaux : il fait appel à Jules Hardouin‑Mansart pour deux perrons et à André Le Nôtre pour un jardin doté d'un très grand miroir d'eau. Pondre, l'un des financiers influents du règne du Roi Soleil, donne au château de somptueuses fêtes ; la longue galerie d'apparat de 31 mètres, « morceau de bravoure » de la demeure, a conservé ses lambris, ses toiles peintes et ses lustres, décor attribué à Robert de Cotte et exécuté par Jean Hanard, visiblement inspiré par la galerie des Glaces de Versailles. Son fils unique, Paulin Gabriel (1698-1775), est appelé « le marquis de Guermantes » après l'achat de la terre de Ravenel. En 1756 la foudre provoque un incendie qui détruit la bibliothèque. En 1812 l'architecte Antoine Léon Thomas Vaudoyer (1746-1846) dessine des études de volières pour les châtelains. Émilie Ernestine Pondre de Guermantes, comtesse Picot de Dampierre (décédée en 1884), connue pour son franc‑parler, interrompait les sermons et avait surnommé ironiquement l'industriel Menier « le Baron Cacao ». Le château abritait une suite de cinq tapisseries d'après Simon Vouet (laine et soie, vers 1640-1650) tissées pour l'ancêtre intendant et contrôleur général des Finances François Petit, seigneur de Passy, de Villeneuve, de Ravannes et d'Etigny, qui occupa plusieurs fonctions judiciaires et financières ; sa fille Anne‑Marguerite épousa Paulin Pondre et François Petit mourut vers 83 ans. Au XIXe siècle la tenture passe à Jules Baillardel de Lareinty (1852-1900), baron de Lareinty et marquis de Tholozan, né à Guermantes, conseiller général puis député de Saint‑Nazaire, qui y résidait encore en 1887 avec son épouse Louise de Sabran‑Pontevès (décédée en 1913). Les héritiers de Louise firent vendre le mobilier du château à Drouot le 19 novembre 1917, vente comprenant ces tapisseries ; la pièce intitulée « Renaud dans les bras d'Armide » traversa l'Atlantique pour figurer à l'exposition La peinture française dans les collections américaines à Bordeaux du 13 mai au 15 septembre 1966. En 1920 un marchand de bois acquiert brièvement le domaine, effectue des coupes et envisage un lotissement ou une clinique, projets qui échouent avant qu'il ne revend quelques mois plus tard. En décembre 1920 le banquier Maurice Hottinguer (1872-1969), issu d'une famille zurichoise liée à la création d'une banque à Paris et à la Banque de France, achète le domaine ; son ancêtre Jean‑Conrad fut baron d'Empire. Pendant les travaux de restauration en 1921 Maurice Hottinguer campe avec son épouse dans l'aile nord, et en 1939 il y accueille leurs cousines Maupeou et leur mère. En 1942 Maurice Hottinguer remet le château à son fils Pierre (1917-2006) lors de son mariage avec Sylvie Feray ; selon Claude Frégnac, Pierre l'entoura de soins éclairés. En 1944 la demeure est menacée de destruction par les troupes d'Occupation en représailles à l'exécution d'un soldat allemand par des résistants, mais elle est sauvée grâce à la médiation de Madame Blanche Hottinguer (née de Maupeou, décédée en 1951). Si le mobilier a disparu, plusieurs pièces conservent un décor peint des XVIIe et XVIIIe siècles. Revendu en 2008, le château a été transformé en centre de séminaires et n'est pas visitable ; la société locataire est Châteauform.