Origine et histoire du Château de la Napoule
Le château de La Napoule, situé en bord de mer à l'entrée du port de Mandelieu-la-Napoule, dans les Alpes-Maritimes, est une demeure édifiée au XIVe siècle par les comtes de Villeneuve et remaniée aux XIXe et XXe siècles ; l'édifice est inscrit au titre des monuments historiques. Les premières mentions du castrum lié au domaine remontent au IXe siècle sous le nom d'Avignonet ou Avinionet, dépendant des évêques de Fréjus et des princes-évêques d'Antibes, tandis que des abbayes comme Saint-Victor de Marseille et Lérins possèdent des droits sur le territoire. Vers 1030, une église Sainte-Marie est fondée près du castrum par Lambertus Barbera et devient prieuré de Saint-Victor en 1043, donation confirmée en 1079 puis attribuée à Lérins selon le cartulaire de 1089. Entre 1130 et 1134 des cessions de biens au profit de l'évêque d'Antibes sont attestées, et le toponyme La Napoule apparaît pour la première fois en 1134 dans un acte de donation ; la chapelle du château est citée en 1181 sous le vocable Saint-Pierre. Le château sur le mont San-Peyre est évoqué dès le XIIe siècle, et en 1224 l'abbaye de Lérins rétrocède l'église Saint-Pierre tout en détenant alors la plupart des églises locales avec des droits féodaux difficiles à préciser ; en 1244 le siège de l'évêché d'Antibes est transféré à Grasse et les droits ecclésiastiques sont transmis au chapitre de la cathédrale. En 1284 l'abbaye de Lérins inféode sa part du castrum à Raymond de Fayence, membre de la famille de Villeneuve-Tourettes, laquelle possèdera la seigneurie de La Napoule jusqu'au XVIIe siècle et verra progressivement le nom d'Avignonet remplacé par celui de La Napoule. Le castrum de Napola est mentionné en 1303 et la période connaît destructions et reconstructions : en 1387 Raimond de Turenne prend et détruit le château du mont San-Peyre, puis des lettres patentes de Marie de Blois attribuent la seigneurie à Guillaume de Villeneuve. Un récit ancien attribue à Guillaume la construction du nouveau château et l'abbaye de Lérins reconstruit alors le prieuré Sainte-Marie ; la propriété est ensuite partagée entre la famille de Villeneuve-Tourettes et le chapitre de Grasse, et divers actes autorisent la remise en état des fortifications, dont une autorisation de construire une tour et des murailles en 1415. Au XVe siècle des arrangements de garde et de droits se succèdent, avec des confirmations de possession par René d'Anjou et des chartes de franchise accordées par Antoine de Villeneuve, qui renforcent les défenses contre les attaques venant de la mer. Louis XII confirme la possession de la seigneurie à Honoré de Villeneuve en 1501, et c'est en 1521 que l'existence d'un port à La Napoule est mentionnée pour la première fois ; en 1530 le corsaire Barberousse attaque et met à sac La Napoule, entraînant la dépopulation de la ville. La fin du XVIe siècle voit une épidémie de peste en 1580 puis, en 1589-1590, l'attaque de l'armée savoyarde contre le château alors tenu par David de Villeneuve-Tourettes ; les châteaux de Tourettes et de Mons sont partiellement détruits et la ville ne se relève pas, un dessin de 1589 montrant le site et ses ruines. Décrite en 1608 comme une cité en grande partie ruinée, la seigneurie passe ensuite à la génération suivante des Villeneuve et connaît, au XVIIe siècle, l'installation de tours de défense côtière décidée par Richelieu et l'exploitation d'une manufacture de savons à Théoule, transformée à partir de 1912 par Leland de Langley. Une carte d'Adam Pérelle de 1690 représente le château cantonné de quatre tours ainsi que la manufacture de Théoule, et des restaurations sont entreprises par Pierre de Villeneuve avant que les troupes de Victor-Amédée II ne saccagent le château en 1707 ; endetté, Pierre-Jean de Villeneuve met ensuite en vente la seigneurie et un mémoire de vente décrit le château comme un ensemble important situé sur un rocher au bord de la mer, garni de deux tours anciennes et entouré de bâtiments et d'une grande cour. La seigneurie est achetée en 1719 par Dominique de Montgrand, qui la transmet à son fils Jean-Baptiste ; en 1746 le château est mis à sac par les armées austro-sardes et, selon un rapport de 1750, de grands travaux de réparation ont été faits mais le village reste détruit et la population réduite. Joseph Jean-Baptiste de Montgrand est le dernier seigneur avant la Révolution : le château est abandonné et pillé pendant cette période, puis restitué en 1815 au marquis de Montgrand, qui autorise en 1837 l'installation d'une verrerie dans les bâtiments, provoquant la disparition de ce qui restait de la charpente comme combustible. La famille de Montgrand conserve les ruines jusqu'en 1876, période durant laquelle une nouvelle voie de chemin de fer passe à proximité à partir de 1863. En 1876 le parfumeur Charrier acquiert la propriété et, entre 1878 et 1880, fait démolir les ruines pour édifier une maison de maître sur le front de mer, avec des ailes de service appuyées sur les fondations anciennes ; la demeure est ensuite louée à des estivants aisés au début du XXe siècle et mise en vente pendant la Première Guerre mondiale par l'héritier Béranger. En novembre 1918 Henry Clews et son épouse Elsie, dite Marie Clews, achètent les restes de la demeure médiévale et entreprennent, entre 1919 et 1930, une importante restauration et des constructions nouvelles ; Henry, sculpteur, et Marie, qui conçoit et dessine les aménagements, conçoivent un ensemble néo-médiéval sans recherche archéologique, orné d'un bestiaire fantastique et de devises gravées, et travaillent directement avec des maçons locaux tels que Jean et César Cossano ainsi qu'avec architectes locaux pour des aspects techniques. Les travaux comprennent l'agrandissement en 1919 de l'aile sud-ouest pour y loger un atelier de sculpture, la création d'une terrasse-balcon côté mer portée par un cryptoportique, entre 1924 et 1928 la construction d'une salle à manger conçue comme une salle de chevaliers adossée à une tour semi‑cylindrique à mâchicoulis, la réalisation d'une galerie de cloître entre 1925 et 1928, et la construction en 1927 d'une tour détachée dite La Mancha sur un terrain acquis en 1924 ; les travaux s'arrêtent en 1930, la maison de maître de 1880 est conservée et remaniée intérieurement, la basse-cour est transformée en jardin anglo-provençal et une porterie monumentale est créée. En 1943 le château est incorporé aux batteries marines du Südwall par l'armée allemande, qui fait édifier un blockhaus camouflé au nord-est du jardin et endommage une partie du mur ; Marie Clews rétablit ce mur en 1950. Marie Clews fonde en 1951 l'Association d'art de La Napoule Mémorial Henry Clews, qui fait du château un lieu d'échanges culturels internationaux accueillant colloques, expositions, concerts, spectacles et résidences d'artistes. Les jardins dessinés en 1919 comprennent un jardin principal ouvert par une grande allée à la française et trois jardins secondaires — le jardin de La Mancha, les terrasses sur la mer et le jardin secret — et intègrent des éléments tels que l'allée régulière, un bassin, une fontaine, un puits ainsi que des constructions comme la conciergerie, la chapelle, une tour de jardin, une pergola et un pont ; ces aménagements sont inscrits au titre des monuments historiques. Le château et ses jardins ont été inscrits au titre des monuments historiques par arrêté du 6 janvier 1947 et le parc a reçu le label Jardin remarquable en 2005.