Origine et histoire du Château de la Tranchade
Le château de la Tranchade, à Garat, domine la vallée de l'Anguienne depuis un piton rocheux et fut le siège d'une des plus importantes seigneuries de l'Angoumois, comprenant notamment les paroisses de Dirac, Garat, Ladoux, L'Isle-d'Espagnac, Magnac, Ruelle, Soyaux et le fief d'Hurtebise. Le nom Tranchade vient de « tranchée » en occitan ; le site porta autrefois les noms de Monestherou et massus de la Truncheda au Moyen Âge, et celui de terre du Prus au XIe siècle. Au XIIe siècle, la Tranchade entra dans les domaines de l'abbaye de Saint-Cybard, qui la céda ensuite à Gérard Ramnulphe en échange de dîmes et de la moitié des moulins. Pendant la guerre de Cent Ans, les Pressac furent seigneurs du lieu ; Aymard de Pressac fit élever le donjon en 1396, à la fin du XIVe siècle. Au fil des siècles, la seigneurie changea de mains : Baud de Saint-Gelais acquit le château en 1492, puis le vendit en 1573 à la famille Nesmond, qui embellit le domaine et fit édifier des ailes de style Renaissance. En 1667, François III Normand de Puygrelier acheta le fief et prit le nom de Normand de La Tranchade ; la famille Normand conserva ensuite une influence locale et fournit plusieurs maires d'Angoulême. Durant la Révolution, le domaine fut vendu comme bien national après l'émigration de Louis Normand de La Tranchade ; il revint cependant aux Normand grâce à l'achat de M. Valet en 1816 et au mariage de sa fille avec Joseph Normand de La Tranchade, maire d'Angoulême au XIXe siècle. Le château resta propriété des Normand jusqu'au début du XXe siècle ; la crise du phylloxéra en 1890 ruina le vignoble et contribua au délabrement du domaine. En 1929, le professeur Louis Portes acheta et restaura le château ; sa veuve épousa ensuite le comte Amédée de Lorgeril, dont la famille assura la conservation du site jusqu'à la tempête de 1999, après laquelle leurs descendants ont poursuivi les travaux. Le portail d'entrée, daté de 1598, présente un parapet crénelé sur mâchicoulis orné de coquilles et est flanqué de tourelles carrées ; les armes des Normand de La Tranchade avec la devise « In fide quiesco » sont sculptées sur le parapet. L'accès au château se fait par une poterne bordée de deux tours carrées dissymétriques ; un pont de pierre a remplacé l'ancien pont-levis et franchit des douves creusées dans le roc, profondes et larges. Le donjon, la partie la plus ancienne, est une tour carrée élevée à la fin du XIVe siècle, avec une façade aveugle ; une tourelle hexagonale ou polygonale contenant un escalier à vis en pierre lui est accolée et l'ensemble est couronné de créneaux et de mâchicoulis ; une coquille Saint-Jacques figure dans la décoration du donjon, laissant penser que le château fut aussi une halte pour les pèlerins. Le donjon comporte plusieurs étages percés de fenêtres étroites et s'élève sur l'à-pic rocheux dominant la vallée. Les bâtiments forment deux ailes en équerre adossées au donjon : l'aile sud-est, incluant la poterne et le chai, date du XVIe siècle, l'aile nord-ouest a été édifiée au XVIIe siècle, et des reprises ont été réalisées au XIXe siècle. Les fenêtres de la façade sud-est sont encadrées de pilastres plats reposant sur des consoles ; sur l'aile ouest figure un écusson aux armes des Normand et, dans la paroi des douves, sont sculptés l'écusson des Normand sous un cadran solaire et un autre écusson ancien gratté. Les matériaux du donjon proviennent en partie des douves asséchées ; dans la cour d'honneur se trouve un puits à colonnes profond de quarante mètres, surmonté d'un dôme, et une croix de Malte est gravée sur le bandeau du toit. Sous la cour, une petite salle voûtée sert de chapelle et porte une plaque commémorative dédiée au docteur Portes ; une tour arasée attenante est antérieure au donjon, tandis qu'une autre tour arasée, située à l'extérieur à l'est des remparts, pourrait avoir été une fuie. Un bâtiment de deux étages accolé au portail, de la même époque, est interprété comme un ancien corps de garde. La grande salle de la Chevalerie a été réhabilitée et accueille des réceptions depuis 2003 ainsi que d'autres manifestations depuis 2007 ; les façades et toitures du château ont été classées au titre des monuments historiques le 4 août 1970.