Origine et histoire du Château de Lacassagne
Le château de Lacassagne, à Saint-Avit-Frandat (Gers), résulte d’apports successifs du XIIIe au XIXe siècle. Son nom, issu du gascon cassanha « chênaie », a connu plusieurs graphies (Cassaigne, Lacassaigne, La Cassagne) ; l’orthographe actuelle est Lacassagne. Installé dans un parc à l’anglaise créé au XVIIe siècle, le monument conserve au centre une ancienne tour-salle, autour de laquelle se sont greffés divers éléments architecturaux. Le noyau primitif paraît correspondre à la tour ronde qui abrite l’escalier sur la façade nord‑est ; cette salle a été remaniée à la fin du XVe ou au XVIe siècle, comme l’attestent l’escalier en vis et certaines croisées. Au XVIIe siècle fut ajouté un corps de logis et les deux tours rondes qui encadrent le corps central ; l’ensemble reçut alors une toiture à comble brisé, de type Mansart, couverte de tuiles canal et plates. Au XVIIIe siècle, les deux tours furent reliées au premier étage par un balcon porté par des corbeaux — adjonction probablement réalisée à cette époque — et un remaniement général des ouvertures y fut effectué. Une aile d’habitation fut rajoutée à l’ouest au XIXe siècle et les communs, portant la date de 1850, délimitent la cour. Le château, ses communs et l’orangerie, ainsi que la salle dite des Chevaliers de Malte avec son décor, font l’objet d’une protection au titre des Monuments historiques (inscription et classement du 20 février 1980).
La salle des Chevaliers de Malte, aménagée au premier étage entre 1620 et 1640 pour Jean‑Bertrand de Luppé du Garrané, constitue l’élément le plus remarquable du château. Jean‑Bertrand de Luppé, chevalier de l’ordre de Saint‑Jean de Jérusalem et prieur de Saint‑Gilles, est à l’origine du décor peint et la famille demeure propriétaire depuis 1582 jusqu’à une époque récente. La salle, longue de 13 m, large de 9 m et haute de 5 m, est revêtue de lambris de chêne jusqu’à deux mètres de hauteur, découpés en panneaux ornés de bandeaux peints à motif de galons laurés ; une vaste cheminée en bois, de même hauteur, porte des figures allégoriques et la croix de Malte. Quatorze grandes toiles occupent le reste des murs : treize scènes évoquent le Grand Siège de Malte par Soliman le Magnifique en 1565 et la quatorzième est un portrait en pied de Jean‑Bertrand de Luppé. Ces peintures, réalisées sur toile par des artistes de l’école italienne, ont été exécutées à La Valette d’après les fresques de Matteo Pérez d’Aleccio qui ornaient la salle du grand conseil du palais magistral. Les boiseries et les poutres de la salle comportent également une décoration peinte ; quarante cartouches sur les poutres représentent des vues de Malte.
La salle de Lacassagne n’est pas une reproduction strictement identique de celle de La Valette : les dimensions diffèrent et les toiles présentent des variantes, dont l’ajout d’une vue de La Valette qui figure dans les recueils de gravures mais pas dans les peintures d’origine. L’original de La Valette, souvent dit détruit en 1798, n’a pas été consumé à cette date ; il a toutefois été endommagé par les bombardements de la Seconde Guerre mondiale et restauré, ce qui confère à l’ensemble de Lacassagne un intérêt documentaire. Plusieurs autres séries dérivées du cycle de Pérez d’Aleccio subsistent ailleurs, dont huit tableaux conservés au musée maritime de Greenwich.