Origine et histoire du Château de Largentière
Le château de Largentière, d'origine XIIIe siècle, est un ancien château fort situé à Largentière (Ardèche, Auvergne-Rhône-Alpes) et inscrit au titre des monuments historiques. Il est bâti au ras du rocher et domine la ville en gradins. Les origines du site sont liées à l'exploitation de mines de plomb argentifère le long de la Ligne et aux rivalités entre l'évêché de Viviers et le comté de Toulouse pour le contrôle de ces richesses. Une mention ancienne indique qu'au IXe ou Xe siècle le chanoine Audebert possédait Largentière et Saint‑Pierre‑de‑Colombier. Dès le XIIe siècle, l'évêque de Viviers obtint le droit de battre monnaie, droit confirmé à plusieurs reprises puis abandonné à la fin du XIVe siècle, sans doute parce que les mines s'épuisèrent. Pour protéger les mines et affirmer sa souveraineté, l'évêque fit édifier sur un éperon dominant la Ligne une tour appelée Argentaria ou argentière, qui contrôlait la route vers Tauriers et Jaujac ; cette tour carrée, citée en 1210, devint le donjon du château. L'accès à ce donjon se faisait au premier étage ; ses murs avaient environ 3 m d'épaisseur et la tour atteignait environ 30 m de hauteur. Les rivalités avec les comtes de Toulouse aboutirent à des accords de partage : en 1198 le castrum de Ségalières fut divisé entre le comte et l'évêque, le comte recevant la moitié du fief et des mines tandis que l'évêque conservait l'autre moitié, elle‑même partagée entre coseigneurs. Le comte fit édifier une tour au sud du donjon épiscopal, dont ne subsiste que le soubassement et une terrasse semi‑circulaire, et les autres coseigneurs ajoutèrent des tours pour protéger l'accès de l'enceinte. La croisade des Albigeois et les conflits qui l'accompagnèrent influèrent sur la possession du site : l'évêque accorda des franchises aux bourgeois en 1208 pour obtenir leur soutien et la seigneurie changea de mains à plusieurs reprises jusqu'à l'intervention du roi de France, après quoi l'évêque de Viviers resta le seigneur principal et le produit des mines fut réparti entre l'évêque et le chapitre. À la fin du XVe et au début du XVIe siècle, les évêques Jean de Montchenu et Claude de Tournon agrandirent le château, renforcèrent l'enceinte, intégrèrent les deux tours et édifièrent un bâtiment dit « tour pentagonale » reliant les tours au donjon. Un puits fut creusé jusqu'au niveau de la rivière pour assurer l'autonomie en cas de siège, et Claude de Tournon est également associé à la construction d'une tour de l'horloge et d'une ligne de remparts entre le château et l'église. Après une longue période de déclin, en 1562 Victor Bermond de Combas et des troupes protestantes pillèrent et incendièrent le couvent des Cordeliers, massacrant les religieux, prirent la ville et occupèrent les châteaux de Largentière et de Montréal ; Victor de Combas fut tué la même année. Le château servit ensuite de résidence au gouverneur du Bas‑Vivarais pour le roi, qui y maintenait une garnison d'une trentaine d'hommes d'armes, et les troubles religieux sous Louis XIII marquèrent encore la région. En 1670, lors de la révolte de Roure, la ville tomba mais le château résista deux mois avant d'être délivré par un détachement commandé par d'Artagnan et le commandant Le Bret ; le chef des révoltés fut sévèrement puni. Le 5 novembre 1714, le marquis de Brison acheta le château, la baronnie et les droits seigneuriaux ; il remit en état l'édifice, transforma l'enceinte basse en perron à double escalier, perça de larges fenêtres et fit aménager une route carrossable bordée de marronniers entre la ville et le château. Le marquis adapta le château en demeure seigneuriale en y créant des étages et des aménagements de résidence, mais la famille se désintéressa ensuite du site. Pendant la Révolution et l'Empire, le château fut utilisé comme tribunal et prison, et en 1792 le comité révolutionnaire envisagea de brûler des tableaux issus du château. En 1816, la tour dite de Toulouse, qui s'élevait au‑dessus des autres, fut démolie et ses pierres réemployées pour construire une usine. La ville acheta le château en 1847 pour en faire un hôpital ; deux étages y furent ajoutés en 1858, d'abord couverts par une terrasse puis par une toiture qui engloba le donjon, lequel devint invisible de l'extérieur. Des annexes et des balcons en ciment furent ajoutés ultérieurement le long de la route de Tauriers et sur la façade sud‑ouest. Le château servit d'hôpital pendant plus d'un siècle, jusqu'en 1995, puis accueillit brièvement un lycée hôtelier, un musée et des associations avant d'être restitué à la commune. Des travaux de restauration menés par des bénévoles de l'association Chantier histoire et architecture médiévales commencèrent en 1997 et s'achevèrent en 1998. Les restaurations reprirent en 2013 : les balcons en béton furent démolis, la toiture et les combles furent retirés, faisant réapparaître le haut du donjon, dont la toiture a été restaurée en 2015. Le château est protégé par un arrêté du 31 mai 1927.