Origine et histoire du Château de Longecourt-en-Plaine
Le château de Longecourt‑en‑Plaine se situe au centre du village, dans un parc de 40 hectares bordé par l'Oucherotte et entouré de douves franchies par trois ponts dormants. Le site a d'abord accueilli une maison forte de plaine du XIIIe siècle, dont seules les cuisines subsistent, tandis que la vieille forteresse fut abandonnée et partiellement démantelée en 1421 lorsque la duchesse Marguerite de Bourgogne fit réemployer ses pierres pour les fortifications de Rouvres‑en‑Plaine. Après être passé de Robert de Boisleux au duc Robert II puis, en 1323, à Édouard Ier de Bar, le domaine demeura de jure aux sires de Bar jusqu'à sa cession en 1436 par René d'Anjou à Jean de Fribourg. À l'état de ruine, le site ne conservait qu'une « cave » utilisée comme cuisine, une motte et des fossés ; Jean de Fribourg fit reconstruire un moulin et privilégia les aménagements du domaine seigneurial. En 1459, la famille de Baissey hérita du lieu et entreprit une reconstruction en brique, initiée par Jean puis poursuivie par Antoine à son retour des guerres d'Italie, travaux qui s'achevèrent en 1539 sous Claude de Baissey ; le plan général, la chapelle et les douves datent de cette période, de même que la restauration des bâtiments de la basse‑cour et la construction d'un colombier. Catherine de Médicis, accompagnée du jeune roi Charles IX, fut reçue dans la demeure en mai 1564, et en juin 1593 la forteresse fut le théâtre d'un combat entre Ligueurs et partisans d'Henri de Navarre, la prise du château provoquant la fuite des Royalistes vers Vergy. Dévastée en 1636 par les Impériaux de Gallas, la seigneurie passa ensuite entre plusieurs mains ; à la fin du XVIIe siècle Jacques Berbis fit dévier le cours de l'Oucherotte en 1690, aménager des jardins aujourd'hui disparus et supprimer le corps de bâtiment nord pour transformer l'ancienne place forte en demeure. La transformation la plus importante eut lieu de 1757 à 1761 par l'architecte Nicolas Lenoir dit « Le Romain » pour Nicolas‑Philippe Berbis : de nouvelles baies furent ouvertes, des guirlandes et décors de stuc réalisés par des spécialistes allemands et italiens furent appliqués en façade, des portiques d'ordre toscan furent ajoutés en avancée sur les ailes et des balcons à balustrades aménagés. L'intérieur du corps central fut entièrement réaménagé avec un hall à colonnes au rez‑de‑chaussée, un vaste salon décoré de stuc imitant le marbre à l'étage, le remplacement des escaliers à vis par un escalier intérieur à double rampant et la redéfinition du mobilier en accord avec la nouvelle organisation. Une inspection de 1793 signala l'excellent état du château et proposa, sans suite, d'en faire une manufacture d'étoffes de laine. Le XIXe siècle modifia encore l'aspect de la cour intérieure par l'adjonction d'une galerie d'un étage éclairée de larges baies, la construction d'un pont en 1860 et la restauration des lucarnes des tours dans un style néo‑gothique ; les stucs du grand salon, saccagés lors de l'occupation allemande de 1870, furent ensuite restaurés. Pendant la Seconde Guerre mondiale, le château et quelques maisons voisines furent réquisitionnés par les Allemands du KG55 pour loger officiers et services, puis de novembre 1944 à mars 1945 le 320th Bomber Group américain y établit son quartier général tandis que le 441th Squadron campait sous tente dans les jardins. Inscrit aux monuments historiques par arrêté du 20 septembre 1946, le château est aujourd'hui habité par la famille Le Gouz de Saint‑Seine et propose un hébergement comprenant cinq chambres et une suite. Sur le plan architectural, le quadrilatère flanqué de quatre tours résulte des travaux menés sous les Baissey entre 1459 et 1539 ; les cuisines, vestiges du premier édifice, conservent une voûte retombant sur un pilier central et des culots ornés de grotesques, angelots aux postures indécentes. La chapelle castrale, logée dans la tour nord‑est à la fin du XVe siècle, présente des voûtes d'ogives à liernes et tiercerons ornées de feuillages et de clefs d'armoiries, une piscine ménagée dans l'épaisseur du mur et un pavement de carreaux émaillés armoriés alternant avec des dalles de pierre. Le grand salon conserve des décors de 1756 — palmiers, guirlandes de roses et un « bain de Diane » surmontant la cheminée — ainsi qu'un mobilier du XVIIIe siècle et des panneaux de stuc. Les remarquables pavements de faïence datés de 1495, à la charnière du Moyen Âge et de la Renaissance, montrent des motifs armoriés et des représentations nouvelles comme des portraits en médaillon ; Antoine de Baissey y associe la tradition du blanc et bleu et le savoir‑faire d'un artisan italien. Un portrait de Marie de Bourgogne orne l'escalier menant à la galerie, et les jardins conservent une collection de rosiers.