Origine et histoire du Château de Lormont
Le château de Lormont, aussi appelé château des Archevêques ou château du Prince Noir, est situé à Lormont (Gironde), en limite de l'autoroute A10 et du pont d'Aquitaine. La première forteresse a été édifiée vers 1060 par Guillaume VIII d'Aquitaine. Aliénor d’Aquitaine y aurait séjourné en 1137 lors de son mariage avec Louis VII, puis le domaine passa entre les mains des rois d’Angleterre ; le Prince d’Aquitaine, dit le Prince Noir, y aurait résidé dans les années 1360. Au XIVe siècle, les archevêques de Bordeaux s’en firent acquéreurs et le château devint l’un des trois centres principaux de leur seigneurie. Les négociations de la fin de la guerre de Cent Ans s’y tinrent en octobre 1453. Partiellement détruit pendant les guerres de Religion, l’édifice fut reconstruit à partir de 1626 par l’architecte H. Roche pour le cardinal François de Sourdis puis pour son frère Henri. L’ensemble comprenait trois corps autour de deux cours : le bâtiment d’entrée avec chai et corps de passage, le logis de l’Archevêque au sud et le logis des Etrangers au nord, ce dernier resté inachevé. Dévasté pendant la Fronde, le château fut ensuite restauré et l’achèvement du logis des Etrangers fut mené entre 1654 et 1662 par les architectes Habert et Dupuy; divers artisans travaillèrent à l’escalier, à la couverture, à la menuiserie, aux tapisseries, aux peintures et à la serre. L’archevêque F.-M. Mériadec de Rohan renonça à de nouveaux travaux et obtint l’autorisation royale de démolir l’édifice en 1781 ; la démolition commença par le logis de l’Archevêque et dura jusqu’en 1789, date à laquelle le château fut partiellement saccagé. En 1791 une description, confirmée par un dessin du début du XIXe siècle, montre la demeure réduite à trois pavillons ; la Révolution entraîna ensuite la destruction d’une autre partie du logis des Etrangers. Des vestiges furent restaurés vers 1876 et, en 1880, l’architecte Alphonse Blaquière aménagea une nouvelle façade à deux tourelles crénelées (avec vitraux de Gustave‑Pierre Dagrand) et ajouta une aile en retour aux dépendances remaniées, donnant à la demeure son aspect actuel. Un blockhaus fut construit en 1940 et, vers 1960, la création du pont d’Aquitaine entraîna la destruction d’une grande partie du parc. L’aménagement intérieur a disparu et les bâtiments ont subi pillages et dégradations depuis les années 1985, à l’exception de graffiti du XVe siècle et de poutres ornées du XVIIe siècle dans les dépendances. Le puits a été vendu en 1995 et quelques éléments ont été déposés au Musée des Amis du Vieux Lormont. Le château est partiellement inscrit au titre des monuments historiques depuis 1991 et inclus dans une ZPPAUP depuis le 12 janvier 2004 ; des projets d’aménagement le concernent actuellement. Un pont mène au bâtiment principal, de plan rectangulaire, avec un pavillon central dont le porche, encadré de deux pilastres, s’ouvre sous un large arc en anse de panier ; à l’intérieur, un escalier en colimaçon descend vers des sous-sols voûtés qui conservent des graffiti. La partie XIXe siècle, crénelée et encadrée de tours, est adjointe à un pavillon plus ancien ; côté nord, un escalier en fer à cheval provient apparemment d’éléments détruits au XVIIe siècle. Le parc conserve, au sud, l’enceinte du XVIIe siècle enfouie sous les décombres, des murs de terrasses et les restes d’une fontaine en rocaille, tandis que les bases des murs de la forteresse affleurent sous les pelouses et que la chapelle médiévale de l’aile sud a été dégagée. La découverte, vers 1975, de tuiles gallo‑romaines confirme une occupation ancienne autour du château, mais l’absence de documentation pour le haut Moyen Âge limite les conclusions et rend nécessaires certaines hypothèses sur l’existence d’un château dès la fin du XIIe ou à la fin du XIIIe siècle, périodes où il est évoqué dans les sources de la juridiction de Bordeaux et dans les comptes de l’archevêché. Enfin, en 1406, l’archevêque protesta contre le démantèlement envisagé de son "hostau" qu’il venait de réparer, attestant l’existence et l’importance de la demeure avant les transformations modernes.