Origine et histoire du Château de Lunéville
Le domaine du château de Lunéville occupe un site fortifié depuis le Moyen Âge et appartient aux ducs de Lorraine depuis le XIIIe siècle. Le château actuel, érigé au début du XVIIIe siècle pour le duc Léopold, a été reconstruit entre 1703 et 1723 sur des plans de Pierre Bourdict, Nicolas Dorbay et Germain Boffrand, et conserve la forme dissymétrique résultant d'une aile nord jamais édifiée. Léopold installe sa cour à Lunéville et développe un vaste domaine comprenant les Bosquets, une orangerie, un jardin d'utilité et la résidence dite le Petit‑Château ou la Favorite destinée au prince Charles‑Alexandre. Jean‑Nicolas Jennesson réalise des aménagements au milieu du XVIIIe siècle, dont la salle de comédie, puis Stanislas Leszczyński, arrivé en 1737, enrichit surtout le parc en étendant les Bosquets vers le nord, en créant les Bas Bosquets et en confiant à Emmanuel Héré la construction de nombreuses fabriques et résidences annexes. Parmi les réalisations de Stanislas se distinguent le Rocher, la Pêcherie, le Pavillon de la Cascade, le Pavillon de Chanteheux et les Chartreuses, ainsi que d’autres fabriques dont la plupart n'ont pas subsisté. Surnommé "Versailles lorrain" pour son prestige au XVIIIe siècle, le château a accueilli une cour brillante et des intellectuels des Lumières, mais sa vocation politique et son mobilier déclinent après la mort de Stanislas et l'annexion de la Lorraine en 1766. À partir de la fin du XVIIIe siècle et durant le XIXe siècle, l'édifice est largement utilisé par l'armée et par des régiments de cavalerie, ce qui contribue paradoxalement à sa conservation malgré des modifications et plusieurs sinistres. Le château a subi de nombreux incendies au cours de son histoire, notamment en 1719, 1814, 1849 et 1961, et il a été en grande partie ravagé par un incendie majeur dans la nuit du 2 au 3 janvier 2003 qui détruisit la chapelle et une aile d'appartements ducaux. Dès 2005 une campagne de restauration a été engagée sous la direction de l'architecte en chef des monuments historiques Pierre‑Yves Caillault; les premières opérations comprenaient la pose d'une grille, la restauration du vestibule et de l'escalier d'honneur, suivies de la remise en état des charpentes, toitures, façades, de la chapelle et de décors intérieurs. Ces travaux ont été pilotés par les copropriétaires successifs — l'État, le ministère de la Défense et le conseil général devenu conseil départemental de Meurthe‑et‑Moselle — la propriété étant partagée à partir de 2000 et rassemblée entre les mains du conseil départemental en 2017. La restauration est conduite en plusieurs phases et s'appuie sur des financements publics, des assurances, des subventions européennes et des dons collectés par une mobilisation associative importante après l'incendie de 2003. Sur le plan architectural, le château présente une composition en U partiellement inachevée, des façades classiques rythmées par des arcades et des colonnes, un vaste vestibule abritant autrefois les entrées des carrosses et orné du monogramme du duc Léopold, ainsi qu'une terrasse qui domine les jardins à la française. La chapelle palatine, élevée d'après des plans de Boffrand entre 1720 et 1723, se distingue par la richesse de son décor et par des sculptures de Barthélemy Guibal et de François Dumont; elle a été restaurée et accueille aujourd'hui une programmation musicale et culturelle depuis sa désacralisation en 1907. Les intérieurs restaurés comprennent notamment la salle des gardes, devenue accueil et billetterie, la salle de la Livrée et le grand salon orné de trophées sculptés par François Dumont. L'escalier d'honneur sud, décoré du monogramme de Léopold et inspiré de modèles contemporains, dessert les appartements et la tribune de la chapelle; les salles voûtées du sous‑sol, anciennement réserves et celliers, sont aujourd'hui réaffectées à des usages d'accueil et de conférence. Le domaine se déploie autour de cours distinctes — la cour des communs et la cour d'honneur séparées par une grille reconstituée — et d'un parc structuré par les jardins à la française prolongés par les Bosquets, conçus par Yves des Hours et Louis de Nesle et enrichis par les créations d'Emmanuel Héré. Les jardins comportaient autrefois de nombreuses sculptures et fabriques dont quatre œuvres de Barthélemy Guibal — Apollon foulant un dragon, Diane, La Nuit et Flore — ont été restaurées en 2020; de vastes perspectives reliaient le château à des résidences de plaisance aujourd'hui disparues. Déclaré monument historique pour sa chapelle dès 1901 puis pour l'ensemble en 1998, le château de Lunéville fait l'objet d'un programme de restauration ambitieux visant à restituer ses volumes, ses décors intérieurs et la lisibilité de ses jardins, projet qui se poursuit au XXIe siècle. Ouvert au public, le site accueille des espaces muséaux, des services administratifs et des manifestations culturelles et reste un lieu central du patrimoine lorrain et de la mémoire de la principauté des ducs de Lorraine.