Origine et histoire du Château de Maintenon
Le château de Maintenon, situé au bord de l'Eure dans la commune de Maintenon (Eure-et-Loir, Centre-Val de Loire), présente l'essentiel de son architecture dans le style Louis XII et fait l'objet d'un classement au titre des monuments historiques depuis juillet 1944. Édifié à partir de 1505 sur des substructions plus anciennes, il doit son aspect de demeure de la Renaissance aux transformations entreprises au début du XVIe siècle. La construction s'étend du XIIe au XVIIIe siècle, avec des réaménagements successifs au fil des propriétaires. En 1674, Françoise d'Aubigné, dite Madame de Maintenon, acquiert la terre et le château ; elle fait ouvrir une nouvelle aile et confie à André Le Nôtre la création du canal, des parterres et du parc, ces travaux étant en partie financés par le roi. Après Madame de Maintenon, la propriété revient à la famille de Noailles ; au milieu du XIXe siècle les façades du logis principal sont remaniées et le parc transformé en jardin paysager où figurent les ruines de l'aqueduc.
Construit sur une île, le château a un plan globalement carré comprenant un corps de logis central destiné à l'habitation et deux ailes en retour, la courtine du quatrième côté ayant été démolie au XVIIe siècle pour dégager la vue sur les parterres. Aux angles s'élèvent des tours, dont un donjon de plan carré plus important, et le corps de logis est flanqué de deux tours rondes ; l'accès se fait par une avant-cour et un pont, anciennement pont-levis. L'aile sud-est, datée du début du XVIe siècle, se termine par une tour ronde, tandis que l'aile sud-ouest remplace au milieu du XVIe siècle un mur qui reliait le logis principal au donjon. Le donjon en grès, construit au XIIIe siècle, est surélevé au début du XVIe siècle et couvert d'une toiture portée par une charpente en châtaignier. La longue aile nord-est, élevée à la fin du XVIIe siècle, abrite une écurie et une orangerie au rez-de-chaussée et des appartements à l'étage.
Plusieurs pièces restaurées et meublées sont ouvertes à la visite : les appartements du XVIIe siècle situés à l'étage du corps de logis principal comprennent notamment la chambre occupée par Madame de Maintenon avec son antichambre et son petit oratoire, ainsi qu'une seconde chambre liée au maréchal de Noailles. Les appartements du XIXe siècle comprennent la salle à manger, le salon du Roi pourvu de pages porte-lumière en bois et or, le grand salon, la salle de billard conservée dans son état du XIXe siècle et décorée de pastels de Clemens von Pausinger dont un portrait de Yolande d'Albert de Luynes, ainsi que une bibliothèque du milieu du XIXe siècle où sont exposés des ouvrages ayant appartenu à la marquise de Maintenon (classée MH en 1976). La grande galerie, créée en 1856 et elle aussi classée MH en 1976, présente des portraits de membres de la famille de Noailles et se termine par un cénotaphe en mémoire de la marquise ; deux salons sont tapissés de papiers peints chinois de la fin du XVIIIe siècle (classés MH en 1944) et la pièce de Saxe conserve de la porcelaine de Meissen. La tour carrée et l'aile attenante ne sont pas accessibles au public.
La collection de peintures, principalement exposée dans la grande galerie, réunit des portraits et des vues liés au château et à ses habitants, dont des œuvres attribuées à l'école française du XVIIe siècle d'après Mignard représentant Madame de Maintenon, un groupe familial par Pierre Mignard, des portraits par Antoine van Dyck, une réplique du portrait de Louis XIV par Hyacinthe Rigaud (1701), un portrait de Louis XV par Jean-Baptiste van Loo, un portrait de Paul, duc de Noailles, par Paul Delaroche (classé MH en 1993, dépôt de l'État), ainsi que des paysages et vedute du château et de l'aqueduc par François-Edme Ricois.
La perspective et le jardin ont été dessinés par Le Nôtre ; jusqu'en 2013 le jardin se réduisait à un parterre centré sur le monogramme de Louis XIV, puis, à l'occasion des 400 ans de la naissance d'André Le Nôtre, le conseil départemental d'Eure-et-Loir a rétabli un jardin à la française conforme aux plans de Le Nôtre. Deux allées bordant la rivière transformée en canal, nommées « Racine » à l'ouest et « Le Nôtre » à l'est, ont reçu en 2023 le label « ensemble arboré remarquable » : l'allée Racine compte 146 tilleuls disposés en deux alignements espacés de quatre mètres, l'allée Le Nôtre en compte 287 et la hauteur moyenne de ces tilleuls est d'environ 26 mètres. Le trio de platanes à l'entrée du parc, planté aux environs de 1830, est également labellisé et présente une hauteur d'environ 38 mètres avec des circonférences respectives d'environ 4,30 m, 4,60 m et 4,90 m.
Au fond du parc subsistent les vestiges de l'aqueduc destiné à conduire les eaux de l'Eure aux fontaines du parc de Versailles dans le cadre d'un projet long de 80 km ; Vauban est chargé des études et, en 1685, il commence les relevés en vue d'enjamber l'Eure au niveau du parc de Maintenon. L'ouvrage, conçu pour comporter 47 arcades au premier rang, 195 au second et 390 au troisième, n'a pu être achevé en raison de la guerre de la Ligue d'Augsbourg, et ses ruines sont classées au titre des monuments historiques depuis 1875.
Sur le plan de l'histoire des propriétaires, Jean Cottereau est à l'origine des importantes transformations du début du XVIe siècle, puis le domaine passe aux d'Angennes avant d'être vendu en 1674 à Françoise d'Aubigné ; sous Mme de Maintenon le château s'agrandit et s'embellit grâce aux travaux royaux. Le domaine entre ensuite dans la famille de Noailles par le mariage de la nièce de la marquise, et la lignée de Noailles conserve et modifie la propriété jusqu'au XXe siècle. Parmi les faits marquants figurent le séjour de Charles X en 1830, une allusion de Georges Clemenceau en 1926 et, vers 1950, le transfert hors du château du bureau du duc de Noailles vers la collection d'Élie de Rothschild.
La succession des propriétaires va des seigneurs médiévaux mentionnés dès le Xe siècle à la famille Cottereau au début du XVIe siècle, puis aux d'Angennes, à Françoise d'Aubigné en 1674 et à la maison de Noailles à partir de la fin du XVIIe siècle ; en 1983 le domaine est cédé à la Fondation du château de Maintenon, devenue Fondation Mansart, et depuis 2005 le conseil départemental d'Eure-et-Loir assure la gestion, l'entretien, le fonctionnement et l'animation dans le cadre d'un bail emphytéotique avec la fondation. Enfin, le château a servi de décor à plusieurs films et productions télévisées, parmi lesquels Fanfan la tulipe (1952), Le Tour du monde en quatre-vingts jours (1956), Le Capitaine Fracasse (1961), la scène finale du Professionnel (1981), le téléfilm L'Allée du Roi (1995) et une publicité pour EDF (2008).